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Le jour de la marmotte

Si les élus de Montréal voulaient autant lutter contre la pauvreté dans leur ville que le maire Labeaume veut son amphithéâtre à Québec -- ou autant que le maire Tremblay voulait ramener le Grand Prix à Montréal... ils agiraient en conséquence et arriveraient à leur fin.
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AFP/Getty Images

En juin dernier, Mario Hamel, un sans-abri en état de crise, était abattu par les policiers, emportant avec lui Patrick Limoge, un cycliste, mort d'une balle perdue. À peine quelques mois plus tard, Farshad Mohammadi, réfugié de guerre devenu sans-abri à Montréal, a été tué à peu près de la même façon, pour les mêmes raisons, dans la station de métro Bonaventure. Étrange impression de déjà-vu... Combien de fois l'histoire devra-t-elle se répéter pour nous faire bouger?

Les réactions à l'événement de janvier ont été semblables à celle de juin. Les journalistes se sont emparés de l'histoire. À qui la faute? Aux policiers trop vite sur la gâchette et mal formés? Peut-être, en partie. Mais l'enjeu est plus grand. On parle d'un problème de santé publique. Trop de personnes souffrant de graves problèmes de santé mentale se retrouvent dans les rues de Montréal, sans suivi ni ressources. Les policiers doivent alors gérer des situations qui dépassent leurs compétences.

Les questions ont fusé vers la Ville de Montréal. Qu'allez-vous faire pour éviter de telles situations? «Nous avons réitéré les six demandes déposées en juin dernier à Québec, après la mort de Mario Hamel», répond Jocelyn-Ann Campbell, responsable de la question de l'itinérance à la Ville, lors d'un point de presse début janvier. «Ce n'est pas de notre responsabilité, mais celle de Québec», précise-t-elle. Vous réclamez combien à Québec? «Ce n'est pas à moi de chiffrer les besoins, c'est la responsabilité de Québec», reçoit-on en guise de réponse. Et qu'a fait le gouvernement Charest depuis le dépôt de vos demandes, il y a plus de six mois? Silence. Un silence qui en dit long. «C'est une situation urgente et nous en sommes conscients. Il faut agir vite et de façon permanente», répète Mme Campbell. Mais que ferons-nous alors, puisque c'est urgent et que Québec ne réagit pas, demandent finalement les journalistes? Autre silence. Un silence encore plus long. Un silence dans lequel on pouvait entendre : «aucune idée»...

Une bavure de société

Pendant que tout le monde se renvoie la balle, la situation est loin de s'améliorer. Après la mort de Mario Hamel, j'avais écrit dans un éditorial du magazine L'Itinéraire qu'il n'avait pas été victime d'une bavure policière, mais d'une bavure de société. Idem pour Farshad Mohammadi. Je me répéterai donc (c'est le jour de la marmotte ou ça ne l'est pas...) : Avec la désinstitutionalisation, des milliers de personnes ont été abandonnées par le système. Le hic, c'est que plusieurs n'ont pas les outils pour réussir à vivre dans notre monde actuel, et la société manque de ressources pour les accueillir et en prendre soin.

Ce n'est pas un hasard si les refuges sont remplis de gens comme Mario Hamel et Farshad Mohammadi, qui souffraient tous deux de graves problèmes de santé mentale. Mais notre société semble accepter qu'il en soit ainsi. On laisse les «fous» déambuler dans le métro en ne se posant pas trop de questions. Ils font partie du paysage. On les laisse vivre dans leur folie, dans leur misère...

Jusqu'à ce que ça dérape et qu'il soit trop tard.

Patrouille mixte

En réponse à la mort de Farshad Mohammadi, la création d'une patrouille mixte a été réitérée. Un policier et un travailleur social feront équipe pour sillonner ensemble les rues de la ville. C'est une bonne nouvelle. Par contre, ce ne sont pas deux ou trois patrouilleurs qui règleront le problème. Cette patrouille est un premier diachylon apposé sur un très gros bobo. C'est mieux que rien, comme on dit. Mais c'est loin d'être suffisant. Tant qu'on ne s'attaquera pas aux causes de l'itinérance afin de la prévenir et de la «guérir», des crises continueront à éclater, et ce, en nombre croissant.

Les différents paliers de gouvernements doivent prendre leurs responsabilités, et surtout travailler ENSEMBLE pour régler un problème vaste et majeur. La guerre des juridictions est une excuse à l'inaction. La situation est urgente, comme l'a dit Jocelyn-Ann Campbell. Chacun a son bout de chemin à faire. La Ville fait-elle vraiment tout ce qu'elle peut pour lutter contre l'itinérance? Si les élus de Montréal voulaient autant lutter contre la pauvreté dans leur ville que le maire Labeaume veut son amphithéâtre à Québec -- ou autant que le maire Tremblay voulait ramener le Grand Prix à Montréal... , ils agiraient en conséquence et arriveraient à leur fin.

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