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Pourquoi le PLQ n'aime pas l'éducation?

Veut-on réellement que les universités utilisent des fonds publics pour faire de la publicité, pour se dénigrer les unes les autres, pour attirer «des clientèles étudiantes»?
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«Tout autre chose qu'un dressage, l'éducation vise l'exercice concret de la liberté, l'épanouissement d'un agir vraiment personnel. C'est pourquoi nous en parlons en termes d'éveil progressif et d'autonomie croissante.» - Thomas De Koninck, Philosophie de l'éducation pour l'avenir.

Ballons d'essai ou non, le gouvernement Couillard, dont le véritable capitaine est clairement Martin Coiteux, poursuit, tronçonneuse à la main, son oeuvre de démolition du modèle québécois. Couper des centaines de millions à l'aveugle, laisser planer le doute sur l'abolition du siège social de l'UQ ou carrément menacer de fermer la TÉLUQ, le ministre de l'Éducation, François Blais, qui, le croirait-on, devrait se porter à la défense de l'enseignement supérieur, semble obéir docilement à toutes les commandes du président du Conseil du trésor. On songe à fermer une université et, pourtant, on ne l'entend pas s'y opposer!

Créé en 1968, le réseau de l'UQ s'est déployé dans toutes les régions du Québec. Partout, il a été un moteur socioéconomique, il a contribué à l'accessibilité et à la démocratisation de l'enseignement universitaire et à garder les jeunes dans les régions, il a joué un rôle clé dans le rattrapage en enseignement supérieur dont le Québec des années 1960 avait grandement besoin. Sous de fausses prémisses économiques - disons plutôt la vérité, idéologiques - , le ministre parle d'économies possibles grâce à l'abolition du siège social, un budget de 15M$ par an.

Ces vues purement comptables nient la réalité, c'est à dire que la disparition du siège social affaiblira le réseau de l'UQ et limitera l'accès aux universités, notamment dans les régions, tout en entravant le rôle social, culturel et économique, en région comme en ville, joué par les universités de l'UQ. L'absence d'un organisme de coordination du réseau de l'UQ contribuera à mettre toutes les universités en compétition les unes avec les autres. Est-ce vraiment ce que l'on souhaite? Veut-on réellement que les universités utilisent des fonds publics pour faire de la publicité, pour se dénigrer les unes les autres, pour attirer «des clientèles étudiantes»? Quelle place occuperont les «petites universités» dans un tel «marché»? Le siège social avec son rôle de coordination des universités du réseau contribue à la santé et à la force de nos universités du Québec.

Le ministre sait pertinemment qu'il est plus économique de concentrer l'administration et de coordonner le réseau en un seul lieu plutôt que de multiplier les mêmes services dans chacune des universités. Le siège social est donc, non seulement plus économique, mais permet aussi de coordonner les orientations de notre réseau universitaire. Cette proposition est économiquement et politiquement mal avisée. Le réel objectif derrière l'abolition du siège social s'inscrit dans la logique gouvernementale de réduction, voire de disparition, des instances de gouvernance et des lieux décisionnels pour ainsi accroître son contrôle sur nos institutions publiques.

Le capitaine Coiteux, commandant en chef du grand navire néolibéral, souhaite mettre les universités en concurrence les unes contre les autres, sans régulation, coordination ou contrôle. Le «libre marché du savoir» sera l'arbitre et, comme on le voit dans le reste de la société, le libre marché trouve toujours un équilibre favorisant la diversité, l'égalité et l'accessibilité. Nous pensons que les universités ont au contraire tout intérêt à collaborer entre elles, et que c'est ainsi qu'elles pourront mieux mener à bien leur mission éducative.

Autre proposition ubuesque, le gouvernement Couillard évalue la fermeture d'une université. La TÉLUQ, crée en 1972, avait comme principal objectif de favoriser l'accessibilité aux études universitaires. Elle est, encore aujourd'hui, la seule université francophone d'Amérique du Nord à offrir tous ses cours en ligne. Dédiée à l'enseignement à distance, elle dispose d'une expertise solide de ce mode d'enseignement et elle contribue ainsi à l'accroissement du nombre de diplômés au Québec. M. Blais connait pertinemment l'urgence de valoriser la profession enseignante. Pourtant, il préfère plutôt dénigrer l'expertise du personnel enseignant de la TÉLUQ, dont celle des tutrices et des tuteurs de la TÉLUQ, en évoquant la fermeture d'une institution aussi importante qu'une université.

On se souvient du PLQ des années 1960 comme l'architecte du ministère de l'Éducation. Eh bien, on se souviendra du PLQ des années 2010 comme celui qui l'aura fermé! Car c'est bien de cela dont il s'agit. Abolir le siège social de l'UQ et fermer la TÉLUQ, c'est mettre en péril l'ensemble d'un réseau public, fort et divers. C'est mettre en péril l'UQAM, l'UQAR, l'UQTR, l'UQAC, l'UQO, l'UQAT, l'ÉTS, l'INRS, l'ENAP, et bien sûr la TÉLUQ.

Le Québec peut maintenant compter sur un grand nombre de diplômés, mais tous s'entendent que rien n'est gagné et qu'il reste du travail à faire. Le manque de vision du gouvernement actuel est scandaleux, mais le manque de courage et l'aveuglement du ministre de l'Éducation est absolument indigne d'un universitaire de la trempe de M. Blais.

On dira ce qu'on voudra, mais détruire un système après en avoir bénéficié soi-même, profiter de tous les avantages et bénéfices qui découlent d'un diplôme universitaire et vouloir en modifier tellement l'essence que cela empêchera les jeunes de partout au Québec de bénéficier du même accès, des mêmes avantages, est un geste irresponsable de la part d'un spécialiste de l'évolution des politiques de sécurité du revenu et de l'éthique économique et sociale.

C'est bien beau le déficit zéro, mais qu'en est-il de la justice sociale et des droits à l'égalité?

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