Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Les paradoxes inquiétants de Vladimir Poutine

Des paradoxes inquiétants, l'homme n'en manque pas. A commencer par cette manie de dénoncer l'ingérence de l'Europe ou des États-Unis dans les affaires ukrainiennes, alors que la communauté internationale est forcée de s'en mêler parce que la Russie ne cesse de s'ingérer et déstabiliser l'Ukraine. Dans cette région du monde, les mots n'ont tout simplement plus de sens.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

Des paradoxes inquiétants, l'homme n'en manque pas. A commencer par cette manie de dénoncer l'ingérence de l'Europe ou des États-Unis dans les affaires ukrainiennes, alors que la communauté internationale est forcée de s'en mêler parce que la Russie ne cesse de s'ingérer et déstabiliser l'Ukraine. Dans cette région du monde, les mots n'ont tout simplement plus de sens. Tellement la propagande russe retourne la réalité contre elle-même pour mieux préparer les esprits au pire: la guerre.

Quand des manifestants occupaient la place Maïdan, la Russie a poussé le président d'alors, Viktor Ianoukovitch, à se montrer intraitable, jusqu'au bain de sang que l'on sait. Un massacre à coups de snipers -sur lesquels il faut absolument qu'une commission indépendante puisse enquêter- l'a fait passer de la case de président élu à celle de président illégitime. Au lieu de rendre des comptes, il s'est enfui, avant d'être remplacé par un gouvernement transitoire qui n'est pas élu directement par le peuple, mais pas ses représentants: le Parlement. On est loin du "coup d'État fasciste" comme l'appelle Moscou.

Ce gouvernement d'union nationale, provisoire, comporte bien quelques représentants de la pire extrême droite ayant pris part aux manifestations de Maïdan: le Secteur droit et Svoboda. Mais ses militants ne tiennent pas du tout les rênes du gouvernement. Lequel s'est comporté de façon incroyablement maîtrisée et calme face aux agressions répétées et systématiques venant de Moscou pour faire échouer cette transition, par définition transitoire... Ce qui change tout.

Ce gouvernement doit rendre les clefs le 25 mai prochain, lors d'élections libres, sauf si elles sont gâchées par le chaos que Moscou tente de créer. L'extrême droite y est annoncée plutôt bas dans les sondages, bien plus que l'extrême droite européenne ou française, dont les dirigeants sont si proches de Vladimir Poutine. Au point que Moscou a même fait venir des néo-fascistes européens en "observateurs" pour valider son référendum fantoche en Crimée. Encore un paradoxe.

Révolution populaire contre provocations anti-élections

Le plus flagrant d'entre eux, c'est sans doute ce que dit la Russie des opérations de déstabilisation à l'Est. Moscou va jusqu'à qualifier de "manifestants pacifiques" des hommes armés, en uniformes, prenant d'assaut des bâtiments officiels comme des postes de police, alors que la Russie continue de considérer comme "terroristes" les manifestants spontanés de la Place de Maïdan. Ce n'est plus du cynisme, ni "du deux poids, deux mesures", c'est carrément le monde à l'envers...

Moscou se défend d'être à la manœuvre, mais qui peut y croire? Qui peut d'ailleurs encore croire un seul mot venant de Vladimir Poutine? L'homme qui a juré de ne pas annexer la Crimée et l'a fait quelques semaines plus tard... Si les troupes qui opèrent en ce moment même dans la région de l'Est étaient si spontanées, on se demande bien pourquoi elles portent des uniformes, comment font-elles pour être si bien armées, si coordonnées, et surtout pourquoi avoir attendu que la situation se stabilise en Crimée, que la communauté internationale commence à s'assoupir, pour passer à l'offensive? S'il ne s'agissait que de citoyens réellement apeurés par le gouvernement transitoire, pourquoi ne pas être sortis dans les rues pour manifester dès les premiers jours? Pourquoi prendre d'assaut des sites stratégiques et non des places? Pourquoi maintenant et pour quoi vouloir tenir, alors que le gouvernement transitoire promet une consultation sur la fédéralisation en même temps que les élections?

Si ce n'est non pas pour qu'on écoute le peuple ukrainien, mais, tout au contraire, pour perturber et pourrir la consultation populaire du 25 mai? Une élection où les pro-Russes pourront voter, s'ils le souhaitent, pour un candidat du Parti des Régions (plutôt pro-Russes). Comme celui que viennent d'agresser des manifestants d'extrême droite pour lui faire payer ce qui se passe à l'Est. Une violence qui mérite des sanctions, et que Moscou recherche. C'est le but de toute cette mascarade. Pousser les Ukrainiens à la faute, créer le chaos et si possible des représailles permettant à Moscou d'appliquer sa nouvelle règle: s'ingérer dans tout le territoire où des citoyens russes peuvent se dire en danger. Exercer ce chantage pour obtenir une fédéralisation de l'Ukraine, si ce n'est par les urnes, par l'intimidation. Ce qui lui permettra de garder la main sur les gouvernements locaux de ces territoires.

L'Europe ne peut pas céder à un tel chantage

L'Europe et les Nations Unies doivent réagir. Mais l'ONU, on le sait, est paralysée par le veto de la Russie. On le voit en Syrie, et de façon encore plus flagrante en Ukraine. Pourtant, si la communauté internationale n'arrive pas à se montrer extrêmement ferme, elle se prépare à des lendemains bien plus coûteux que la flambée des prix du gaz. Le retour à l'ordre international d'avant 1945, dicté par la loi du plus fort et soumis à l'impérialisme cynique, décomplexé, qui n'a même plus besoin de faux semblants pour violer les frontières d'un autre pays. Juste un exemple, au cœur de l'Europe... Que se passerait-il si le populiste hongrois Viktor Orban décidait un jour d'imiter son ami Poutine et d'envahir tout pays limitrophe ayant des citoyens parlant hongrois, comme la Transylvanie, cette région roumaine que l'extrême droite hongoise -qu'il rêve de séduire- propose d'annexer depuis des années?

Ce jour-là, nous payerons tous un très lourd tribut, bien plus lourd que l'explosion du prix du gaz. C'est tout le drame des relations internationales. Il n'existe jamais aucun précédent impuni qui ne promette pas d'autres drames. C'est valable quand les États-Unis se dispensent de l'ONU pour mener des actions punitives préventives en Irak. C'est valable quand le cynisme impérialiste de Moscou atteint de tels sommets. L'Union européenne joue décidément son honneur, son image et une partie de son avenir dans ce face à face qu'elle n'a pas souhaité avec Vladimir Poutine.

VOIR AUSSI SUR LE HUFFPOST

Vladimir Poutine fait de la natation

Les activités sportives de Vladimir Poutine

Retrouvez les articles du HuffPost sur notre page Facebook.
Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.