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Terroristes et réfugiés...

Dans ma classe, on retrouve 16 élèves, dont deux musulmans. Il me fallait poursuivre la discussion entamée sur les réfugiés et explorer les sentiments générés par les événements survenus à Paris.
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Lundi matin, 16 novembre, 8h05. Mes élèves de 14 et 15 ans entrent tranquillement dans ma classe, comme tous les lundis. Les poussières du week-end encore présentes dans leurs yeux, ils s'installent.

Dans ma classe, on retrouve 16 élèves, dont deux musulmans: une fille portant le voile, et un garçon. Les origines ethniques sont bien métissées: chez ces Québécois francophones et anglophones, les noms de famille d'origine italienne, salvadorienne, égyptienne, syrienne, algérienne, etc., en témoignent. D'ailleurs, l'enseignante malgache d'origine chinoise vient ajouter des couleurs au tableau (hic).

Tout le week-end précédent, j'avais la conviction qu'il faudrait parler. Il me fallait poursuivre la discussion entamée sur les réfugiés et explorer les sentiments générés par les événements survenus à Paris le 13 novembre. En tant qu'éducatrice, je considère que mon rôle est de fournir une plateforme harmonieuse pour développer le jugement critique. Je ne leur impose en rien mes propres idées, et cela est clarifié dès le départ. J'aimerais simplement qu'ils aient conscience des éléments qui composent la problématique sociale.

Il y a quelques semaines, l'une d'entre eux a raconté la réalité de la guerre, pour sa famille et ses cousins, en Syrie. La maison familiale est éventrée, son oncle fut tué à bout portant en pleine rue, les enfants ne vont plus à l'école, les gens ne travaillent pas et se cachent... À travers ses yeux embués, elle explique que sa mère essaie de faire venir sa tante et ses cousins, mais c'est long, c'est complexe et, parfois, lorsqu'ils se déplacent, c'est dangereux.

La semaine suivante, nous avons abordé les inégalités sociales... La loto de la vie fait que certains naissent dans un HLM et d'autres dans un quartier cossu. Nous avons simulé l'expérience, avec la technique d'impact de la boulette de papier. Nous avons visionné Intouchables et discuté de cette amitié improbable de deux êtres nés aux antipodes de l'échelle sociale.

Ce lundi 16 novembre 2015, je voulais explorer leur peur. Je pose des questions simples et je les laisse parler, en répondant à leurs questionnements par des faits (statistiques, événements historiques, etc.)

C'est l'occasion triste, mais rêvée; nous faisons le lien entre nos discussions sur les migrants, les inégalités sociales, les cités françaises, dont Drice, l'un des 2 personnages principaux du film Intouchables, et les terroristes.

Que s'est-il passé à Paris vendredi soir dernier?

Qu'est-ce qu'un terroriste?

Quel est le but des organisations terroristes?

Sont-ils tous arabes? Sont-ils tous musulmans?

Les musulmans sont-ils nécessairement terroristes?

Quelles sont les valeurs prônées par l'islam, dans le Coran? Quelles religions ont les mêmes valeurs?

Comment la peur viendra-t-elle influencer notre décision d'accueillir des réfugiés syriens ou de tout autre pays en crise?

Finalement, comment fait-on pour ne pas laisser gagner les terroristes?

À chaque fois, je suis émue, parce qu'à force de partage, il en ressort des perles: On travaille sur la peur... On a le droit d'avoir peur, mais si on s'empêche de vivre, de faire des choses qu'on aime parce qu'on a peur, ils gagnent.

Madame, les terroristes gagnent quand :

• on encourage les préjugés et qu'on se ferme...

• on transmet notre peur à nos amis, notre famille, à nos enfants, à la place d'en parler pour la vaincre.

• on s'enferme avec seulement des gens qui nous ressemblent...

Alors si on est capable d'aider, pourquoi on dirait non aux réfugiés syriens?

Nous allons poursuivre nos discussions, tout au long de l'année, parce que ces futurs citoyens auront à leur tour la lourde responsabilité de décider.

Amen, Inch'Allah.

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