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Pourquoi on ne commence jamais trop tôt à faire la lecture à nos enfants

La lecture à voix haute permet à votre bébé d'avoir du plaisir avec vous, d'exercer son langage et de découvrir le monde. Cet amour des communications le préparera à l'apprentissage et à la lecture en milieu scolaire.
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Mon premier enfant et Harry Potter et le prince de sang-mêlé ont fait leur entrée dans le monde à quelques heures d'écart. J'admets avoir été un peu surprise lorsque mon mari m'a laissée à l'hôpital avec notre nouveau-né endormi pour aller chercher l'exemplaire précommandé à la librairie. Lorsque je me suis réveillée d'une sieste, je l'ai trouvé assis dans la chaise d'hôpital en vinyle, notre fillette emmaillotée au creux d'un bras et le bouquin Harry dans la main. Il lisait à voix haute, et notre bébé était ensorcelée.

Pendant ces premiers jours confus de lune de miel avec bébé, c'est devenu notre routine quotidienne. Pendant que je m'habituais à devenir une productrice de lait à temps plein, mon mari a découvert que ce qu'il pouvait donner à notre bébé, à part des couches propres, c'était des histoires. Lorsque le cordon du nombril de notre fillette est tombé, ils avaient fini Harry Potter, tous les écrits de Barbara Reid, et quinze lectures d'Une souris grise.

Nous n'obtenions pas toujours de réaction pendant que nous faisions la lecture à notre bébé, mais à la naissance, le nourrisson peut voir clairement le regard de sa mère qui l'allaite, et nous pouvions souvent constater qu'elle étudiait notre visage pendant que nous lui parlions, que nous lui chantions des chansons ou que nous lui lisions des histoires. Les nouveau-nés reconnaissent les motifs sonores de leur mère, et elle s'arrêtait pendant la tétée, comme si elle voulait me dire: «Je t'écoute. Raconte encore.»

Notre persistance a porté ses fruits. Lorsque nous avons émergé du brouillard de ces premiers mois, elle faisait mieux ses nuits et nos habitudes de lecture étaient bien établies. Nous avons passé des journées toutes douillettes à faire des câlins dans la chaise berçante et à parler des images contenues dans les livres de sa bibliothèque en expansion. Bientôt, les gazouillis et les babillages ont laissé place aux tambourinements et au mâchouillage, si bien qu'elle a littéralement dévoré ses ouvrages favoris (comme il se doit avec un bon livre). À neuf mois, elle pouvait isoler son index et le pointer elle-même vers l'image. C'est alors que la conversation s'est vraiment engagée: «Où est le mouton vert? Il est

Si nous avions attendu d'avoir un poupon grouillant de douze mois, je ne sais pas si cette exposition aux livres aurait été aussi facile. En réalité, les livres ont tout facilité. Le bain, les repas, le petit pot... nos routines (avouons-le, parfois ennuyantes) étaient à la fois rassurantes et plus intéressantes lorsque nous les faisions au rythme d'Une araignée sur le plancher ou de Frère Jacques.

Lorsque notre fille est devenue une grande sœur, elle s'était transformée en tout petit rat de bibliothèque. Nous avions des livres de carton dans toutes les pièces, et la lecture était idéale pour lui donner de l'attention pendant que j'allaitais son petit frère. J'essayais de me procurer seulement des livres qui me plaisaient (heureusement, il y en a beaucoup), parce que nous lisions et relisions ses préférés. Et il était impossible. De sauter. Un seul mot. Les tout-petits apprennent par la répétition, si bien que toute la famille pouvait réciter Ours brun, dis-moi ce que tu vois dans son sommeil.

Petit frère numéro 1, puis numéro 2, nous ont rappelé que les enfants ont besoin de bouger pour apprendre, et les livres n'étaient plus réservés aux moments de calme. Souvent, ils gigotaient, couraient et revenaient régulièrement voir les images pendant que je continuais de leur raconter Gruffalo.

À vrai dire, j'étais déterminée à partager les livres avec mes enfants bien avant l'entrée de Harry Potter dans ma chambre d'accouchement. Expliquer aux parents l'importance de lire à leurs enfants est devenue la norme des soins en pédiatrie. En qualité de pédiatre, je demande souvent aux parents s'ils ont commencé à faire la lecture à leur bébé. Certains sont surpris d'apprendre qu'on peut lire aux bébés avant qu'ils sachent parler. Certains, comme mon mari, ne se sont jamais fait faire la lecture dans leur enfance et ne savent pas trop par où commencer. Tous veulent donner le meilleur départ possible à leur enfant et se sentent soutenus dans leur fonction de premier enseignant.

Bien sûr, les parents font la lecture aux enfants depuis des générations, mais désormais, la science fondamentale corrobore ce que Ma mère l'Oye et Dr Seuss savaient déjà. Le cerveau du bébé se développe grâce aux relations. Des relations réelles, bidirectionnelles, d'aller et retour avec des figures d'attachement aimantes. Elles ne se forment pas avec des écrans. Les interactions positives doivent être répétées et renforcées pour promouvoir la formation de liens neuronaux optimaux. Pendant les quelques premières années, des relations sécuritaires, stables et nourricières favorisent le développement sain du cerveau en réduisant le stress toxique et en encourageant les capacités intellectuelles fondamentales.

Pendant les premières années de la vie d'un enfant, les parents sont leurs principaux enseignants, et l'environnement verbal qu'ils leur fournissent en leur parlant, en leur faisant la lecture et en leur chantant des chansons ouvre la voie à l'apprentissage de la parole. Les parents ont tendance à utiliser un langage plus complexe et plus descriptif et à poser plus de questions lorsqu'ils font la lecture que dans le cadre des autres activités quotidiennes. En fait, les livres pour enfants contiennent 50 % plus de mots rares que les émissions de télévision aux heures de grande écoute, ou même les conversations entre cégépiens.

La lecture à voix haute permet à votre bébé d'avoir du plaisir avec vous, d'exercer son langage et de découvrir le monde. Cet amour des livres, de la langue et des communications le préparera à l'apprentissage et à la lecture en milieu scolaire.

À ma clinique, il est rare que les parents aient un livre dans leur sac à couches à leur arrivée, mais j'essaie de m'assurer qu'ils en aient tous un à leur départ. Ce que la plupart des parents possèdent, c'est un écran portatif. J'ai même vu des bébés posséder leur propre téléphone intelligent, attaché au cordon de leur suce. Ces appareils n'existent pas depuis assez longtemps pour qu'on en connaisse les effets sur les jeunes enfants, mais il est évident que le meilleur Facebook pour les bébés, c'est le visage de leurs parents et un livre favori.

Comme la plupart des parents, je remets en question certaines de mes décisions, mais je n'ai jamais regretté d'avoir entouré ma famille de livres, de mots et de chansons. Cette année, mon plus jeune a décrypté le code et nous sommes devenus une famille de lecteurs autonomes, ce qui est de loin mon étape de développement favorite et qui rendra la prochaine Journée de l'alphabétisation familiale si spéciale.

Avec mes enfants, je suis à la fois sentimentale et pragmatique. Les vêtements trop petits ont été amoureusement emballés et remis à des amis. J'ai gambadé jusqu'au centre de don pour me défaire de la balançoire pour bébé qui nous a permis de demeurer sains d'esprit, mais qui prenait tant d'espace dans la cuisine. Avec les premiers livres, je suis perplexe. Ces premières années ont été un tourbillon de nouvelles étapes et de premières, et nos humbles histoires en étaient les ancres. Après le bain et l'enfilage du pyjama, l'histoire au coucher était une période sacrée où nous oubliions toute incartade commise pendant la journée.

Ma fillette est devenue une ado efflanquée, qui peut lire elle-même Harry Potter depuis longtemps. Pourtant, nous lisons encore ensemble, et j'espère que nous le ferons toujours, nous relayant un chapitre après l'autre.

La docteure Alyson Shaw est porte-parole de l'alphabétisation pour la Société canadienne de pédiatrie (SCP) et pédiatre au Centre hospitalier pour enfant de l'est de l'Ontario (CHEO), à Ottawa.

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