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Le 25, on est un maudit beau peuple sensibilisé à la cause de la santé mentale. Puis arrivent le 26, le 27 et tous les autres jours de l'année. Ces autres jours-là, la santé mentale, c'est tabou.
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Le 25 janvier, on est vraiment là, en gang, à se dire que la santé mentale c'est important. On y croit vraiment, parce que ça l'est. On raconte nos trucs personnels, nos antécédents, notre histoire. On se fait presque une fierté, de dire, sur les médias sociaux, qu'on a déjà eu besoin d'un anti-dépresseur, qu'on a déjà fait une dépression ou qu'on a été diagnostiqué anxieux. On partage des statuts Facebook et Twitter sur le sujet. Les artistes sortent du placard avec leur histoire de maladie mentale. Ce jour-là, les politiciens prennent à cœur les besoins en santé mentale. On louange les ressources communautaires, les services en santé et tous les intervenants. Le 25 janvier, on donne pour la cause.

Le 25, on est un maudit beau peuple sensibilisé à la cause de la santé mentale. Puis arrivent le 26, le 27 et tous les autres jours de l'année.

Ces autres jours-là, la santé mentale, c'est tabou, ce sont peu de ressources, ce sont des services communautaires tenus à bout de bras par des intervenants essoufflés, ce sont des listes d'attente, ce sont des suicides dans les communautés autochtones qu'on oublie trop vite, c'est caché et c'est honteux.

La santé mentale c'est un paquet de ressources coupées et amputées par le gouvernement.

La santé mentale, c'est de ne pas savoir où aller quand on n'en peut plus.

La santé mentale, c'est de ne pas savoir quand on va s'occuper de nous parce qu'on est 467e sur la liste pour recevoir des services.

La santé mentale, c'est ne pas avoir de services pour son enfant et ne pas avoir d'argent pour s'en offrir.

Le 26, le 27 et les autres jours de l'année, la santé mentale, c'est tout sauf ce qu'on est le 25 janvier quand on cause pour la cause.

Le 5 janvier, c'est Patrick, 46 ans, qui ne sait pas où appeler parce qu'il a fait un plan pour mourir et qu'il a même une date pour en finir. Il n'a pas de médecin famille, comme 25 % des Québécois. Il a déjà été à l'urgence pour recevoir de l'aide, mais après avoir attendu 7 heures dans la salle d'attente, seul, il a quitté en se disant que ça allait passer. Patrick ne peut pas se payer un psychologue au privé, parce que Patrick n'a pas les moyens. Qui va aider Patrick ? Patrick, ça pourrait être toi, ou moi.

Le 20 janvier, c'est Anjij, 14 ans, qui vit dans une réserve, qui consomme depuis trop longtemps pour son jeune âge et qui, aujourd'hui, n'en peut plus de la vie, de sa vie. Anjij, n'a pas de ressources, pas de soutien. Autour d'elle, le suicide, c'est tabou, et ça, même s'il y a en a eu plusieurs dans la communauté. Aujourd'hui, il n'y a malheureusement personne qui ne se préoccupe de son état. Ni de la sienne ni des autres ados. On ne cause pas pour sa cause à elle.

Le 24 janvier, mon amie Claudie pleure seule chez elle. Claudie a 37 ans. Elle est infirmière à l'urgence. Claudie est exténuée. Elle a pris plusieurs jours de maladie, juste pour se reposer, mais le repos ne vient pas. Elle est toujours aussi fatiguée, même au travail. Claudie est plus négative. Son travail est très exigeant, on lui en demande toujours plus. Plus d'heures, plus de temps supplémentaires, plus de tâches, plus, plus, plus. Pourtant, personne n'a rien remarqué, ni son boss, ni les gens qu'elle côtoie. Ça doit être parce qu'on n'est pas encore le 25 janvier. C'est en ce 24 janvier, à 22 h que Claudie craque. Pas le 25, le 24 au soir.

Le 26, ce sera un médecin qui ne saura pas où et quand avoir de l'aide. Parce qu'un médecin, c'est fort. Un médecin, ça ne craque pas.

Le 30, ce sera un président de compagnie. Le 2 février, une travailleuse sociale. Le 5, un étudiant. Le 9, une nouvelle maman. Le 13, un chômeur. Le 15, un commis de dépanneur. Le 17, ton enfant. Le 22, ta meilleure amie. Le 26, peut-être moi ou toi.

La santé mentale, c'est pas juste le 25 janvier. Pensons-y.

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