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Ces seins qui descendent

Être belle à 40 ans c'est juste accepter d'être moins belle et plus vieille. De se remonter le moral en se disant qu'on a du charme.
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Texte de femme qui vieillit. Sûrement pas juste mon texte. Celui de plusieurs femmes, aussi.

Il paraît que les femmes sont belles à 40 ans.

J'ai commencé par rester plus longtemps dans le char pour me regarder, dans le rétroviseur, ce miroir qui nous permet de voir tout ce qu'on ne voit pas dans notre salle de bain. Le rétroviseur du char est comme notre meilleur ami gay: il nous dit exactement ce qui cloche, sans filtre.

Dans le retroviseur, j'inspecte les rides qui creusent mon front. Un genre de fossé à fond de teint qui devient de plus en plus profond. Y'en a aussi qui regarde leur pattes-d'oie. Certaines se faceliftent en s'étirant la face. D'autres cherchent leurs poils disgracieux.

Parce que les poils apparaissent avec l'âge. Un genre de puberté mascu-féminine à presque 40 ans. Un peu dans le visage, dans le cou et, avec un peu de malchance, certains poussent meme autour des mamelons. On surprend donc à tirer sur un poil solitaire apparu sur notre poitrine.

De plus en plus on se surprend à inspecter nos seins. Je les inspecte plus pour leur look que pour détecter un cancer. Penchée pour voir ce que j'ai l'air pendant mes ébats, debout les épaules vers l'avant pour savoir ce que j'aurai l'air à 70 ans, les épaules vers l'arrière en me disant que je ne suis pas si mal.

Inspection de taches sur la peau pour ne pas avoir un décolleté à la Michèle Richard. J'assiste, impuissante, à la descente de mes seins. Certains matins je les remonte, les tire, les colle, tout ça pour mon moral ou par nostalgie du temps ou ils regardaient le ciel.

Pis y'a la peau. On a beau l'étirer momentanément ou par la chirurgie, cette maudite enveloppe trahit toujours notre âge. Quelques chanceuses bien enrobées retardent le processus, mais seulement pour un bien court temps. Mince consolation.

Le cul disparaît quand t'es maigre et s'affaisse quand t'es grassouillette. Les bras deviennent des mollusques qui s'agitent au gré des gestes de la main. Les cheveux deviennent ceux d'une poupée trop brossée. Fatiguées du café, les dents jaunissent. Pis on blanchit. Souvent trop. On a l'air d'avoir un sourire de fille de 17 ans avec un visage de 45. Superbe. On se console comme on peut.

Le bas du ventre devient celui d'une femme enceinte de 4 mois qui n'accouchera jamais.

Pis y'a les varices et la cellulite.

Belle à 40 ans. Ouais. Me semble.

Belle, mais belle habillée. En manches longues. Parce que le bikini nous va comme une corde autour d'un rosbif. Je regarde les one piece. J'en achete. Je fais tranquillement mon deuil de la brésilienne. L'été est moins excitant en one piece. Il est plus chaud aussi. Le one piece devient un saran wrap à 30 degrés au soleil. Un saran wrap qui fait bouillir le ventre de 4 mois.

Et puis, on se trouve quand même bien dans le miroir de la salle de bain, à la fin d'une soirée trop arrosée. La vue est floue, ça aide.

On utilise maintenant avec exces les filtres surexposure quand on se permet un selfie. Avec la lumière bien située, on s'aime. On utilise davantage nos anciennes photos que nos récentes pour nos profils. Mais qu'est ce que 5 ou 10 petites années ont d'une fausse représentation?

On vante la citation du Petit Prince: «On ne voit bien qu'avec le cœur», parce que le cœur, lui, n'a pas de cellulite.

On fait notre deuil des regards sexy par des hommes de moins de 25 ans. On s'habitue tranquillement à ceux des vieux de 60 ans.

Être belle à 40 ans c'est juste accepter d'être moins belle et plus vieille. De se remonter le moral en se disant qu'on a du charme. De chialer contre Photoshop. De refuser les chirurgies, pour finalement se dire qu'un peu ne nous ferait pas de tort.

Être belle à 40 ans c'est être ce que nous sommes devenues et l'accepter, un peu.

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