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Michel Galabru, un homme génial sans ostentation

Michel était un homme magnifique. Un immense acteur. Il ne s'est pas cantonné aux seconds rôles et aux comédies populaires, comme on l'entend parfois. Cassons cette image-là, elle est erronée.
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Michel était un homme magnifique. Un immense acteur. Il ne s'est pas cantonné aux seconds rôles et aux comédies populaires, comme on l'entend parfois. Cassons cette image-là, elle est erronée.

Il a été formidable dans des rôles très sérieux comme celui de L'Été meurtrier de Jean Becker, de Section spéciale de Costa-Gavras, de Confidences pour confidences de Pascale Thomas. Il m'a aussi fait beaucoup rire dans Bienvenue chez les Ch'tis, son apparition y est magistrale, comme dans Les Rustres de Goldoni.

C'est un acteur qui m'a donné des joies immenses. Avant de commencer à tourner Le Juge et l'assassin, je me disais qu'il allait devoir oublier certains des films qu'il avait faits. Dans le bonus du DVD, il raconte d'ailleurs qu'il avait appelé Philippe Noiret pour lui demander comment on jouait «dans un bon film». Noiret lui aurait répondu: «tu verras, c'est très facile». Dès le premier plan, j'ai compris que j'avais affaire à un homme blanc comme neige, neuf, dans l'émotion, la cocasserie, dans l'instantané, il était au coeur et savait le traduire de manière surprenante.

Parmi ces joies immenses que Michel m'a offertes, je me souviens de cette scène incroyable où son personnage doit lancer des pierres sur un berger pour le faire fuir, puis se raviser et ne pas l'attaquer. Un mélange délicat de violence et de frustration. J'imaginais qu'il irait loin dans l'émotion, mais pas autant! Michel a commencé à jouer la scène, puis il s'est mis à frapper la terre avec ses poings en rugissant de douleur. Un moment d'une intensité rare. Avant la prise, il n'a pas fait de numéro, pas de chichis, n'a pas non plus demandé quarante minutes de concentration. Je lui ai dit: «Michel, tu crois que tu peux faire la scène ?» Il m'a répondu: «Oui, on y va». Et la première prise fut celle-là, cette crise incroyable.

J'ai aussi le souvenir d'une journée de tournage épuisante, sous la neige. Au lieu de se reposer dans sa loge, il se mit à aider les gars qui transportaient les caisses de matériel. À un moment, la mince couche de glace sur laquelle il marchait céda sous son poids, il se retrouva dans l'eau glacée à mi-cuisse. Il déclara alors: «Maintenant, je sais ce qu'ont dû ressentir les soldats de la Grande Armée pendant la Bérézina». On en a ri pendant des heures. C'était un homme magnifique.

La seule chose qu'il n'ait jamais su faire, c'est de prendre l'accordéon et d'être synchrone avec la mélodie. Le doublure s'arrachait les cheveux pour suivre ce qu'il faisait sur le clavier.

Il était aussi excellent dans le second film que nous avons fait ensemble, Une semaine de vacances. Il avait une grande tirade sur la difficulté d'être un cancre, lors d'une scène de repas avec Philippe Noiret et Nathalie Baye. Il disait «on croit que c'est facile d'être un cancre, mais c'est terrible».

Je regrette sa mort, car on avait un projet commun, faire une discussion sur sa vie, son parcours théâtral, son amour pour Sacha Guitry, Marcel Pagnol, Yvonne Printemps, et tous ces souvenirs partagés ensemble.

Michel était un homme que j'adorais. On pouvait parler avec sérieux et rire la minute d'après. Il était génial sans ostentation, sans publiciser son propre génie. il était très généreux avec ses partenaires, il défendait les autres acteurs. Tous adoraient travailler avec lui. Un homme formidable, assurément.

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