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L'espoir Trudeau?

La jeunesse de Trudeau semble être un antidote puissant contre l'opportunisme politique qui règne à Ottawa.
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Les politiciens qui nous dirigent ont depuis longtemps renoncé à assumer l'exercice politique de leurs responsabilités, c'est-à-dire, la conduite d'un projet collectif fondé sur des valeurs communes. Aussitôt arrivés au pouvoir, ils se transforment en « supers comptables » hypnotisés par les chiffres du budget, dévorés par les statistiques des fonctionnaires des finances, prisonniers du techno langage des administrations. Leurs promesses et leurs discours deviennent un catalogue de chiffres et de mesures tellement précises que face au mur d'un monde constamment en changement, très peu d'entre elles se réalisent, alimentant ainsi le cynisme des électeurs vis-à-vis du corps politique.

Ce remplacement de la politique par de la « petite » gestion est frappant sur la scène provinciale où le gouvernement semble incapable d'articuler pour les Québécois un horizon commun plus grand et plus excitant que celui de l'équilibre budgétaire. Les lendemains qui chantent sont devenus un jeu d'écritures comptables déprimant. Ce phénomène est également observable à Ottawa. En campagne électorale depuis les dernières élections, le NPD n'a cessé de multiplier les annonces et les promesses démagogiques, alignant des milliards et des pourcentages de croissance qui n'existent que dans l'imagination fertile de son chef et qui se fracasseront sur la première tempête économique que le Canada ne manquera pas de traverser. De l'autre côté, obsédés par leur grand projet d'une colonne des revenus supérieure à celle des dépenses, les conservateurs sont constamment rattrapés par la conjoncture économique qui ne cesse de démentir leurs prévisions. Prisonniers de cette promesse, ils n'ont pas grand-chose d'autre à offrir que de la partisanerie.

La nature ayant horreur du vide, lorsque les politiciens désertent le champ des valeurs, celles-ci se réinvitent sous la pression des événements de la pire des façons. Face aux récentes attaques, Stephen Harper agite le fantasme de la menace islamique et demande aux Canadiens de se redéfinir en se repliant sur eux-mêmes. Face à la menace imaginaire d'une armée de Burqua, les élus québécois envisagent de restreindre les libertés individuelles des femmes musulmanes en leur proposant un choix cruel : croyances contre emploi. La mécanique est toujours la même. Au lieu de proposer un projet commun, on préfère exciter les peurs et dresser les communautés les unes contre les autres.

Dans ce contexte sombre, il faut noter le discours remarquable de maturité prononcé par Justin Trudeau à l'Institut d'études canadiennes de McGill sur la notion de liberté, au cours duquel il se posait avec franchise la question suivante :

«Pourquoi un chef politique s'embarrasserait de faire une allocution sur une notion comme la liberté ? [...] Nous sommes censés parler de mesures très précises, ciblant un « public clé » et des « électeurs indécis » [...] Mon idée est plus traditionnelle. Je pense que la politique est une expression concrète des valeurs. Les priorités sont importantes. Les engagements spécifiques sont importants. Il n'y a cependant aucun moyen de prédire les événements qui auront lieu durant un mandat, et encore moins les mesures qui devront être prises pour les gérer. Les gens ne sont pas naïfs. Ils le savent bien.»

J'ai longtemps fait partie des sceptiques vis-à-vis de Trudeau. Même si je continue d'avoir certains désaccords, je dois reconnaître que mon scepticisme pourrait se transformer en espoir. La jeunesse de Trudeau semble être un antidote puissant contre l'opportunisme politique qui règne à Ottawa. Sa filiation politique peut être la solide garantie qu'il ne négociera pas le modèle libéral canadien, respectueux des libertés individuelles et des différences communautaires, sur l'autel de la peur. Enfin, et surtout, le contenu de ses discours suggère qu'il a des idées, ce qui vaut bien plus que des promesses qui n'engagent, le plus souvent, que ceux qui les écoutent.

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