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Racisme et antisémitisme en Grèce: une dangereuse cécité volontaire

La cécité volontaire concerne la nature nationaliste, xénophobe, raciste et antisémite des «Grecs indépendants», le parti que Syriza a décidé de faire entrer au gouvernement.
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Alors qu'Alexis Tsipras effectue cette semaine ses premières visitesdans les capitales européennes comme premier ministre, une dangereuse cécité volontaire semble s'emparer de nombreux Européens qui, comme pour mieux croire en les espoirs soulevés par la victoire de Syriza, se refusent à voir des faits inquiétants relatifs au racisme et à l'antisémitisme qui l'accompagnent.

En premier lieu, la cécité volontaire concerne la nature nationaliste, xénophobe, raciste et antisémite des « Grecs indépendants », le parti que Syriza a décidé de faire entrer au gouvernement.

Son chef fait des déclarations antisémites et complotistes, accusant par exemple les juifs de ne pas payer d'impôts, et une de ses membres peut déclarer que « les sentiments anti-grecs des Britanniques et des Américains sont propagés par le Mouvement mondial sioniste » en toute impunité.

Pourtant, son intégration au gouvernement par Syriza a été accueillie par l'indifférence de l'UE et de la plupart des forces politiques européennes, et par l'active justification de certains partis de gauche, qui se rendent ainsi coupables de soutien au nationalisme, au racisme et à l'antisémitisme.

Ce volontaire manque de discernement est d'autant plus surprenant que cette intégration s'inscrit dans la poursuite des pratiques politiques des vieux partis corrompus et dans la continuation de la légitimation de l'extrême droite impulsée par l'austérité. En effet, c'est la pression de la troïka - qui souhaitait assurer les votes des plans d'austérité - et les relations douteuses du Pasok et de Nouvelle démocratie qui ont permis à l'extrême droite de revenir au gouvernement grec en 2011 pour la première fois depuis la fin de la dictature des colonels.

Cet aveuglement volontaire laisse également songeur quand on sait que les convergences de vue entre Syriza et les « Grecs indépendants » ne portent pas uniquement sur l'austérité, mais également sur les questions internationales, en particulier sur le soutien à la Russie de Poutine.

Les « Grecs indépendants » la soutiennent par solidarité pan-orthodoxe, quand Alexis Tsipras se fait le relais de la propagande du Kremlin, qualifiant le pouvoir ukrainien de néonazis et saluant l'annexion de la Crimée et le simulacre de référendum qui y a été organisé. Tout juste élu, il reçoit comme premier ambassadeur celui de Russie et demande la fin des sanctions européennes visant à arrêter l'agression russe contre l'Ukraine et, partant, contre l'Europe.

En second lieu, la cécité volontaire concerne la signification du score d'Aube Dorée, qui s'est quasiment maintenu à plus de 6%, conservant 17 députés sur 18. Parti authentiquement néonazi, violemment raciste, antisémite, négationniste, nostalgique du IIIe Reich et liberticide, Aube Dorée s'est rendu coupable de plusieurs meurtres d'immigrés et d'étrangers.

Malgré cela, son score a été accueilli de la même manière que lorsqu'il avait fait son entrée au parlement en mai 2012 : dans l'indifférence quasi générale.

Cette cécité volontaire est symptomatique d'une focalisation obsessionnelle sur les questions économiques et de l'indifférence grandissante sur notre continent au racisme et à l'antisémitisme, alors que l'incrustation dans le paysage politique grec des néonazis, pourtant sous le coup de nombreuses procédures judiciaires et dont les principaux dirigeants sont en prison, est à ce sujet alarmante.

Face à la dangereuse cécité volontaire concernant le racisme, l'antisémitisme et le nationalisme, qui menace de prolonger l'affaiblissement de la démocratie entamé par la dévastatrice politique d'austérité imposée à la Grèce, il est urgent que les démocrates fassent preuve de lucidité et s'engagent.

Cela signifie plusieurs actions.

  • Tout d'abord, pousser Syriza à renoncer à son alliance avec les « Grecs indépendants », Tsipras à abandonner les discours de confusion, comme lorsqu'il parle « d'holocauste social » en Grèce, et à revoir son soutien inconditionnel à Poutine.
  • Ensuite, faire en sorte que la troïka mette un terme à sa politique d'austérité qui a mis la société grecque à genoux et favorisé la montée de tensions extrêmes.
  • Également, exiger de l'UE qu'elle soutienne la société civile pro-démocratie asphyxiée par l'austérité, qu'elle demande et accompagne des réformes de la justice et de la police et le vote de lois pour renforcer la lutte contre le racisme et l'antisémitisme.
  • Enfin, pour la société civile, s'engager avec solidarité aux côtés de la société civile grecque, comme le mouvement antiraciste européen le fait depuis plusieurs années, pour alerter sur la situation, inventer des perspectives de solutions et mener des actions.

C'est en sortant de la cécité volontaire et en combattant le racisme et l'antisémitisme qu'il sera possible de faire véritablement progresser la démocratie en Grèce.

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