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90 secondes pour mettre les enfants à l'abri des roquettes: un psychologue à Jérusalem

Ma femme et moi avions décidé de passer les grandes vacances en Israël avec les enfants. J'avais besoin d'interviewer des ados israéliens. Malheureusement, une sinistre sirène annonçant un tir de missiles a mis fin à notre bel été.
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Ma femme et moi avions décidé de passer les grandes vacances en Israël avec les enfants. J'y retrouverais de la famille et des amis, mais je venais également de mettre en route une étude interculturelle sur l'adolescence et j'avais besoin d'interviewer des ados israéliens. C'était l'occasion de faire d'une pierre deux coups.

Nous sommes à Jérusalem depuis quelques semaines. Mes enfants raffolent de la cuisine locale et de nos excursions, car je profite d'une pause dans mon emploi du temps pour commencer à collecter des données pour mon étude. Malheureusement, une sinistre sirène annonçant un tir de roquettesa mis fin à notre bel été.

C'est ma femme qui s'en est d'abord rendu compte, et elle m'a demandé de baisser la musique pour savoir si j'entendais moi aussi quelque chose. C'était assez net. Comme je l'avais remarqué aux actualités américaines, la sirène montait dans les aigus avant de retomber dans les graves, plusieurs fois de suite. Nous savions que le sud du pays était attaqué depuis quelques jours, mais nous ne pensions pas que Jérusalem serait touchée.

Nous avions environ 90 secondes pour nous réfugier dans l'abri antiaérien. Nous avons dit à nos deux aînées, douze et quatorze ans, d'y aller directement pendant que ma femme et moi nous précipitions dans la chambre des enfants pour les tirer du lit. Notre fils de huit ans, qui n'était pas encore couché, a couru rejoindre ses sœurs, mais son frère de six ans et notre petite dernière dormaient profondément. Nous les avons pris dans nos bras, sans les réveiller, et sommes partis nous mettre à l'abri, avec vingt secondes de marge.

Quand nous nous sommes retrouvés dans l'abri, la réaction des enfants face à cette situation difficile m'a fasciné, en tant que psychologue du développement. Ma femme et moi nous sommes efforcés de rester calmes et de donner l'impression que nous maîtrisions la situation, ce qui a semblé les rassurer. Ils avaient l'air d'aller, mais nous posaient plein de questions techniques sur ce qui se passait. Était-ce un gros missile? Pourquoi étions-nous en sécurité dans l'abri? Comment l'armée faisait-elle pour nous avertir? Quand saurions-nous que nous pouvions sortir? Mon fils de huit ans s'inquiétait particulièrement de savoir ce qui se passerait s'il entendait la sirène pendant qu'il était aux toilettes. Question légitime, et de son âge.

Ma femme et moi avons répondu honnêtement à toutes leurs questions, en essayant encore une fois de donner un sentiment de contrôle. Pendant notre attente, sans histoire, mon fils a annoncé qu'il était impatient de raconter ce qui s'était passé à ses copains de classe. Puis, après avoir reçu le feu vert de la radio de l'armée, nous sommes sortis de l'abri pour ramener tout le monde au lit.

Quand les choses se sont calmées et que nous avons bien expliqué aux enfants ce qu'il fallait faire en cas d'alerte nocturne, tout le monde a repris ses petites affaires, mais nous avons remarqué qu'ils mettaient plus de temps que d'habitude à s'endormir.

Avant de me coucher, j'ai décidé d'aller voir s'ils dormaient bien. En entrant dans la chambre des garçons, j'ai trouvé mes deux fils endormis dans les bras l'un de l'autre, dans le lit du plus grand. Tout ce que nous leur avions dit n'avait pas suffi à les rassurer. Ce qui comptait, c'était de pouvoir compter l'un sur l'autre en s'endormant.

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