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Le Québec a tout ce qu'il faut pour être le personnage principal d'un roman qui n'a rien de prévisible ou de similaire aux autres. Pour être beaucoup plus qu'un chapitre d'un pays qui n'est pas le sien. Dommage qu'il soit encore nécessaire de le rappeler à ceux qui devraient porter fièrement les couleurs de cette histoire.
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Vous commencez un roman et vous vous rendez compte que celui-ci est écrit en calquant le style d'un autre et qu'il rassemble maladroitement les éléments qui sont, supposément, un gage de succès. Bref, un roman qui n'est qu'une recette, un mélange d'ingrédients en quête d'un public le plus large possible.

Au fil des pages, vous vous rendez bien compte qu'il n'apporte rien de nouveau. Peut-être en finirez-vous la lecture. Si tel est le cas, ce sera probablement avec une forte impression de déjà vu, peut-être même un certain ennui, mais incontestablement ce récit ne se taillera pas une place parmi ceux qui vous ont marqués, ceux qui vous hantent longtemps après la dernière page, ceux qui changent votre vie. Vous n'imaginerez pas les personnages ou leur destin une fois le roman achevé, vous refermerez probablement le livre avec une certaine indifférence. Vous oublierez, tout simplement.

Ce fameux roman, probablement doté d'une couverture flamboyante qui avait d'abord retenu votre attention, s'apparente drôlement à un politicien. Celui qui reprend les mots des autres, qui les tourne à son avantage, qui tente de plaire au public avant tout.

Il y a beaucoup de politiciens dans le parti que plusieurs considèrent encore comme le navire amiral de la cause indépendantiste. Ceux-ci sont un peu comme un écrivain qui devant une impasse a deux choix s'offrent à lui: réécrire de A à Z et chercher à innover ou encore s'en tenir à la même histoire récupérée et légèrement remise au goût du jour.

Elle est là la différence fondamentale entre un politicien et un leader. Et alors qu'il serait grand temps qu'un leader indépendantiste se lève, il n'en est rien. Alors que le moment serait venu de donner une place à une voix claire, porteuse de convictions et inspirante, on nous ressort la même histoire. On révise simplement quelques lignes avant la publication, dans l'espoir que notre lecteur captif n'y verra que du feu.

Le propre d'un bon roman, comme celui d'un leader, c'est d'être porteur de ses propres mots, de sa propre vision du monde. C'est d'ébranler, de secouer, peut-être, par moment, saura-t-il faire rire, pleurer ou même provoquer la colère, mais une chose est sûre, il ne laisse pas indifférent, il ose, il crée un mouvement et amène celui qui le lit plus loin. Il ne cherche pas nécessairement à plaire à tous, mais qu'on l'aime ou non, sa qualité demeure indéniable. Son apport est palpable. Et c'est exactement ce qui manque actuellement au Parti québécois: quelqu'un qui ose lever la voix et sortir de ses réflexes programmés de politicien pour mettre fin à l'indifférence, pour amener ce mouvement qui stagne depuis trop longtemps à avancer de nouveau, à écrire quelque chose dont on se souviendra et qui sera porteur de sens.

Malheureusement, aucun des candidats potentiels à la chefferie de ce parti ne semble prêt à écrire quelque chose dont on se souviendra. Pire encore, ils donnent encore tous une place à cette vision défaitiste selon laquelle le Québec n'a pas ce qu'il faut pour aspirer à davantage que le ressassement des vieilles histoires provinciales. Qu'il n'a pas ce qu'il faut, pour le moment, pour aspirer à plus. Il devra attendre le moment opportun, quand le chapitre sur le redressement des finances sera écrit, quand les lecteurs auront envie de lire leur livre, quand le gouvernement canadien aura une fois de plus rayé les lignes importantes de la spécificité québécoise ou quand celui-ci s'opposera à la publication d'un millième livre blanc. Ou pire, quand le parti qui devrait défendre l'idée aura obtenu assez de redevances à son goût.

La vérité quand on écrit, c'est qu'il est bien possible que le lecteur ne reçoive pas nos mots comme on le voudrait, qu'il ne les apprécie pas pour une raison ou pour une autre, qu'il ne s'identifie pas à notre personnage principal, mais cela n'a jamais empêché un écrivain d'écrire et ne devrait pas empêcher ceux qui se présentent comme des leaders politiques de porter davantage que cette impression trop répandue que le Québec ne se mérite pas lui-même. Qu'il n'est pas déjà un pays distinct. Qu'il n'a pas déjà ce qu'il faut pour créer bien plus que d'autres aventures provinciales.

Bref, à ce rythme-là, on relira encore longtemps la même histoire et on finira par convaincre le peuple québécois qu'il n'en existe pas d'autre. Qu'on ne peut plus imaginer sortir des frontières de ce pays étranger, qu'au mieux on peut écrire quelques péripéties nationalistes en espérant qu'un jour le contexte soit peut-être/potentiellement/presque favorable à voir plus loin.

Non, aucun doute, l'élite actuelle du mouvement indépendantiste ne manque pas de discours écrits et réécrits selon les publics, calculés et vides. Une nouvelle génération commence même à se tailler une place, en proposant de polir le discours ou en appuyant des sorties désolantes qui ne font que marteler la nécessité d'attendre avant d'oser, de plaire avant de proposer. Ainsi, on lira encore bien longtemps les multiples rééditions des navets péquistes.

Et pourtant, le Québec a tout ce qu'il faut pour être le personnage principal d'un roman qui n'a rien de prévisible ou de similaire aux autres. Pour être beaucoup plus qu'un chapitre d'un pays qui n'est pas le sien. Dommage qu'il soit encore nécessaire de le rappeler à ceux qui devraient porter fièrement les couleurs de cette histoire.

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