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Pourquoi j'ai abandonné mon rôle de mère au foyer

J'étais jalouse de mon mari quand il partait le matin, je rêvais d'avoir une activité créative, de parler avec d'autres adultes et d'avoir une raison de m'habiller pour sortir.
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J'ai exercé différents boulots un peu partout. J'ai été serveuse dans un café branché, assistante de direction dans la finance, directrice d'une maison de retraite et, récemment, maman à plein temps d'un petit garçon très remuant aux cheveux roux.

Quand j'ai appris que j'étais enceinte, alors que mon emploi du temps était déjà surchargé, j'ai eu un choc et un gros coup de déprime. Dans mon esprit, je n'avais pas encore accompli ce que je voulais faire, et j'envisageais ce petit bout non prévu comme un désagrément. Je me disais que la maternité réduirait le champ des possibles, mettrait un terme à mes aspirations et, surtout, que le fait de m'occuper de quelqu'un d'autre m'empêcherait de prendre soin de moi. Je me suis néanmoins résignée à ce nouveau chapitre que la vie m'imposait, les poches pleines de rêves inassouvis.

J'étais impatiente de reprendre le travail après la naissance de mon fils. Je l'avais même inscrit un peu à la hâte à la crèche. Etant donné que je suis une personne très introvertie qui s'ennuie facilement, je préférais retourner au boulot, avec l'aide de mon mari et de mes amis, même si je devais pour cela consacrer la plus grande partie de mon salaire en frais de garderie.

Mais je me suis découvert une passion pour la maternité. J'avais prévu de reprendre le travail douze semaines après l'accouchement, mais j'étais de plus en plus triste à mesure que les jours passaient. Je me souviens d'un soir en particulier, alors que je bataillais avec un petit affamé de deux mois qui ne tétait pas correctement. Je me suis installée dans la baignoire, je l'ai pris dans mes bras, et j'ai éclaté en sanglots. Comment pouvais-je abandonner ce petit être à quelqu'un d'autre? Qui lui chanterait les chansons qui l'apaisaient? Qui le bercerait jusqu'à ce qu'il s'endorme? Poussée d'hormones ou intervention divine, j'ai su cette nuit-là que je ne pourrais pas reprendre le chemin du travail.

J'ai donc ajouté la qualification de mère au foyer à mon cv, ce qui a surpris tout le monde, moi la première. La garderie est devenue mon nouveau bureau, les seins qui coulent, mon quotidien, et les Kardashian, mes collègues. Je m'ennuyais mais il y avait toujours quelque chose à faire (assurer la survie de son enfant, réapprendre à faire pipi, tenter de garder son calme tandis qu'un nouveau-né fatigué poussait des hurlements dans l'autre pièce).

J'ai surtout renoué avec la créativité, pour trouver l'équilibre entre les tâches quotidiennes et les petits plaisirs de l'existence. Les premiers jours, quand il n'arrêtait pas de dormir, j'ai pu explorer la tendresse que je découvrais en moi, et dans les temps libres des premiers mois, je me suis remise à écrire, le bébé installé près de moi.

Quand Ollie est devenu plus grand, les choses sont devenues plus compliquées. Comment pouvais-je écrire et surveiller un bébé qui avait la bougeotte? Comment prévoir quoi que ce soit quand je passais ma journée à lui courir après? Rapidement, j'ai profité de ses heures de sommeil pour me consacrer à ce que j'avais négligé depuis que je travaillais. Peu à peu, mot après mot, j'ai effeuillé les multiples identités que je m'étais forgées et, sans y prendre garde, je me suis retrouvée.

J'aime mon fils et, comme dans mes autres boulots, il y a des moments où j'aime rester à la maison. Mais à mesure qu'il grandissait, mon impatience en faisait de même. J'étais jalouse de mon mari quand il partait le matin, je rêvais d'avoir une activité créative, de parler avec d'autres adultes et d'avoir une raison de m'habiller pour sortir. Je regardais sans arrêt la pendule, dans l'attente de la prochaine sieste pour me remettre à mes piges. Je n'arrêtais pas de me demander s'il n'existait pas une manière plus productive d'exploiter mes capacités. Est-ce que je ne pourrais pas trouver des missions mieux rémunérées? Est-ce que j'étais capable de gagner ma vie en écrivant? Et, d'abord, est-ce que je pouvais me résoudre à laisser mon fils à quelqu'un d'autre pour faire ce qui me convenait le mieux?

Quand j'ai franchi le pas, je me suis rendu compte que le fait d'être attentive à mes besoins faisait de moi une meilleure mère. Je m'occupais mieux d'Ollie quand je le déposais à la garderie, au lieu de le laisser devant la télé pour terminer un article en temps et en heure. Il y allait deux fois par semaine, ce qui me permettait de poursuivre mon activité en freelance, et nous avions trouvé notre équilibre: il adorait la garderie, j'adorais travailler, et nous avions hâte de nous retrouver à la fin de la journée.

Mon fils a aujourd'hui presque deux ans, et j'ai accepté, un peu par hasard, un plein temps de rêve: je suis rédactrice pour une agence de presse. Tout ça parce que j'ai démissionné il y a deux ans et que j'ai eu le temps de me consacrer à ce qui me plaît, un temps que je n'aurais jamais eu si je n'étais pas devenue mère au foyer pendant quelques mois.

Je n'avais jamais écrit à plein temps, et je ne sais pas comment je ferai quand j'aurai d'autres enfants, mais j'ai confiance. Je suis certaine d'être à ma place, et de faire ce que j'ai à faire. Pour tout vous dire, c'est beaucoup plus facile quand on est entourée des bonnes personnes. Comme un petit garçon aux grands yeux et son papa.

Cet article, publié à l'origine sur le Huffington Post américain, a été traduit par Bamiyan Shiff pour Fast for Word.

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