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(Re)vivre. Le mot est sur toutes les lèvres, dans tous les verres levés entre République et Canal Saint-Martin, comme autant de défis à la peur, au chagrin, au choc. Toute la semaine s'est passée entre sidération, travail et tendresse. Pour les proches-qui-auraient-pu-y-être, pour les amis auxquels on ne dit pas assez qu'on les aime.
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(Re)vivre. Le mot est sur toutes les lèvres, dans tous les verres levés entre République et Canal Saint-Martin, comme autant de défis à la peur, au chagrin, au choc. Toute la semaine s'est passée entre sidération, travail et tendresse. Pour les proches-qui-auraient-pu-y-être, pour les amis auxquels on ne dit pas assez qu'on les aime.

Vendredi, il y avait beaucoup de monde dehors à #21h20 malgré le froid, malgré le fait que «winter is coming», et c'est bon signe.

L'unanimité est plus grande qu'en janvier. Cette fois il est vrai, les Français n'ont pas eu le sentiment qu'on assassinait "les autres" - journalistes insolents, policiers banals ou juifs ordinaires - mais leurs propres enfants. Mais l'heure n'est pas aux mauvaises pensées, la nation est soudée. C'est si rare, profitons-en.

(Re)vivre. Il va falloir "reprendre une activité normale", comme disaient nos Guignols. Il va falloir s'intéresser à autre chose.

La COP 21 démarre dans une semaine, et c'est l'avenir de la planète qui est en jeu, l'avenir des générations qui viennent, et pas seulement les menaces qui pèsent sur celle-ci.

Les élections régionales approchent : dur de s'intéresser au passe Navigo, mais c'est pourtant la vie quotidienne qui est concernée. Et c'est la vie collective : hélas, les drames de la semaine dernière auront donné des ailes à ceux qui prêchent pour la méfiance des communautés les unes envers les autres, pour des mesures d'exception radicales, pour des camps d'internement, pour la fin de l'Europe et des frontières de l'Union. Re(vivre), c'est aussi résister à ces mauvais génies qui demandent toujours plus de barbelés, de repli. C'est se réjouir de cet élan qui a traversé la France, ses églises, synagogues et mosquées pour dire "no pasaran".

(Re)vivre, ce n'est pas pour autant gommer les vraies questions sur la guerre qu'on nous a déclarée. Attention toutefois à ne pas inverser la charge de la preuve, à ne pas tomber dans la rhétorique djihadiste, qui se diffuse étrangement chez quelques intellectuels : si nous bombardons l'Etat Islamique c'est bien parce qu'il nous a attaqués, et cela, avant que nous ne ripostions. Mais cette guerre, pourquoi la veulent-ils? Dans quel but, sinon la division, la guerre civile, l'apocalypse pour tous? Quel est l'ennemi, sinon le fondamentalisme, cette approche religieuse globale de l'organisation des sociétés, contre la réduction de la religion à sa sphère privée, comme en Occident depuis deux siècles et demi?

Marcel Gauchet, le philosophe que j'interrogeais samedi au micro d'Europe1, à la question "que faire d'autre que la guerre ?" répondait : avoir un peu de modestie, comprendre que tout le monde ne nous aime pas, que la haine est même incroyablement violente, que nous n'avons pas forcément apporté le bonheur à l'humanité, et que notre modèle pour séduire, doit se montrer plus convaincant.

La tentation du relativisme (ce qui est bon pour nous ne l'est pas pour les autres) n'est pas loin, et il faut la combattre si on croit à une forme d'universalisme, mais mettre notre fonctionnement en perspective, notre façon de diffuser nos idéaux à l'examen, notre compréhension des autres mondes que le nôtre, serait déjà un premier pas, si on tient dur comme fer à préserver notre modèle de développement.

Staline disait - selon de Gaulle qui le rapportait dans ses Mémoires de guerre - qu' "à la fin, c'est toujours la mort qui gagne". Non, c'est la vie, et la démocratie telle que nous la concevons, qui finissent par l'emporter. C'est aussi à nous d'essayer de faire en sorte que le prix à payer ne soit pas trop cher.

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