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Viens donner un beau bec à matante!

Ça me «bogue» un peu quand je vois passer des trucs sur le consentement des enfants à recevoir des câlins ou des becs.
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Ça me bogue un peu quand je vois passer des trucs sur le consentement des enfants à recevoir des câlins ou des becs.

Ce qui me rend inconfortable, ce n'est pas le message, je sais qu'il est important d'éduquer ses kids sur leurs limites, de leur enseigner à dire non, je le sais. Je viens d'une génération où, quand on refusait de quoi à quelqu'un, on faisait de la peine au petit Jésus. Fallait obligatoirement prêter nos bébelles, sinon on n'était pas fine.

C'est de cette mentalité que je viens, pis j'ai appris que j'avais le droit de dire non dans ma vingtaine. C'est avec la quarantaine que j'ai appris à moins me sentir coupable, pis je travaille encore là-dessus.

Il y a une chose dont je me rappelle aussi, c'est la tournée de becs qui ne finissait plus. C'était interminable, mais c'était de même pis on ne se posait pas de question parce que tout le monde le faisait. J'ai appris que je n'aimais pas la barbe qui pique ni l'haleine de whisky, pis un moment donné j'ai grandi pis c'est devenu «ciao-bye-tout-lmonde». Je n'ai jamais eu l'impression que ma famille m'avait violée ou agressée, je n'ai jamais senti qu'on ne m'avait pas respectée. C'était les convenances, comme dire «s'il vous plait» et «merci», ça faisait partie des règles de bienséances.

J'ai l'impression que la société me fait devenir un agresseur potentiel, l'impression qu'on voit le mal partout, même au sein de notre famille.

Le droit de refuser

Je suis d'accord de montrer aux jeunes qu'ils ont le droit de refuser quand ils sont petits. Ils apprennent à se positionner, à se distancer, à s'écouter pis ça, c'est essentiel dans une vie d'adulte si tu ne veux pas te faire manipuler. Refuser de prêter sa bébelle, refuser de partager son chocolat, refuser d'aller au parc avec le p'tit baveux du deuxième bloc d'appartements, refuser de chanter la p'tite toune de l'école ou de faire chorégraphie devant toute la famille après le souper, c'est correct. C'est important le «ça me tente pas maman», qui se suit du «C'est correct ma belle, c'est ton choix, t'as le droit tsé».

J'étais enfant dans les années '70. On a changé ma couche sur la table de cuisine devant des invités, on m'a fait essayer des petites robes dans les magasins sans passer par la cabine d'essayage, on est rentré dans la salle de bain pendant que je faisais pipi, on m'a lavé sur un quai en plein jour avec l'eau du lac au chalet pis malgré tout ça, j'ai jamais senti qu'on m'exposait. Je ne pensais même pas que ça pouvait être malsain, je ne savais même pas que j'avais le droit de m'opposer, je ne savais même pas que j'avais de quoi à dire.

Tsé...

Le faire contre son gré?

J'ai l'impression que la société me fait devenir un agresseur potentiel, l'impression qu'on voit le mal partout, même au sein de notre famille. Je me sens mal maintenant d'embrasser un enfant, je sais plus quoi faire quand sa mère lui dit de me donner un bec en partant. J'ai peur qu'on voit les agresseurs partout, qu'on devienne froid et distant.

Pis on gère ça comment maintenant les obligations, le faire contre son gré, parce que ça aussi ça existe. JE NE PARLE PAS DE VIOL OU D'AGRESSION, on se calme! je parle des fois où on n'a pas le choix, du kid qu'on oblige à donner la main à une autre équipe après une partie de soccer même s'il ne veut pas, de sourire à notre employeur même s'il nous écœure, de collaborer avec un policier, on doit aussi apprendre à piler sur notre orgueil, à gérer des obligations, à faire la différence entre une demande pis un abus de pouvoir.

À 13 ans, j'te jure que même si ça ne te tente pas de vider le lave-vaisselle, même si ton p'tit cœur te dit que t'as le droit de refuser, j'te jure que tu vas le vider, pis que le petit Jésus n'a rien n'a voir là-dedans. C'est une question de partage, d'entraide pis d'apprendre à gérer des responsabilités.

C'est correct d'enseigner le choix, mais il ne faut pas oublier d'enseigner aussi les conséquences. C'est beau de respecter sa petite qui ne veut pas prêter ses bébelles, mais elle va aussi apprendre à ne pas être choisie.

Elle a le droit, mais ça se peut que la petite voisine préfère une autre amie le jour de sa fête pour aller au ciné ou à la crèmerie. On leur montre à dire non, mais il faut continuer le message, il faut aussi leur apprendre à recevoir le «non». D'après ce que je vois aujourd'hui, y'a un boutte qui suit pas: quand c'est le nôtre qui est rejeté. On crie à l'injustice en traitant l'autre d'égoïste, on juge les parents pour avoir accepté que le nôtre ne soit pas sur la liste d'invitation.

Je vois passer de beaux messages qui demandent aux familles de respecter l'enfant qui dit non à un câlin. Ça me fatigue. Je voudrais des exemples communs de bébelles pis de bonbon, pis de petites chansons devant les invités. Je voudrais que si on oblige un kid à faire quelque chose contre son gré, on lui demande ensuite comment il s'est senti, pis comment il pourrait le dire autrement la prochaine fois quand on va lui redemander. Je voudrais que les kids développent leur notion d'intégrité physique ailleurs que dans les bras d'un être cher. Parce que des bras, souvent, c'est rassurant.

Je voudrais qu'on ne cible pas la famille proche, mais le voisin, le collègue, la nouvelle conquête du cousin, je voudrais qu'on reconnaisse le non parce qu'on est timide, gêné, parce que c'est quelqu'un qu'on n'a jamais vu. Je voudrais qu'on reconnaisse le non parce que la voix est grave, le geste est brusque, les ongles sont trop longs, je voudrais qu'on reconnaisse le non parce que le p'tit est fatigué pis que ça ne lui tente pas de faire la tournée, que peut-être la prochaine fois ça va être différent. Je voudrais juste pas qu'on généralise le non.

Savoir dire non, c'est aussi savoir l'assumer. C'est bien beau pis c'est riche, mais encore faut-il savoir pourquoi on n'a juste pas envie de dire oui.

C'est beau de dénoncer le fait qu'un enfant ne devrait pas se faire embrasser s'il n'est pas à l'aise, mais encore faut-il dénoncer celui qui se fait taper sur la gueule par un parent violent.

Le principe veut qu'on respecte les enfants dans leurs droits d'enfants, qu'on les amènent à se positionner selon leurs limites, je suis peut-être vieille pis issue d'une drôle de génération, mais je pense encore aujourd'hui que quand une grand-mère veut embrasser son p'tit dernier, on gagne à insister un peu.

Je pense qu'apprendre à démontrer des formes d'affection saines et sans arrière pensée est important, déjà qu'on se parle pu ben ben, à moins d'avoir un clavier et un écran.

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