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Ma fille, je voudrais que tu te trouves belle

Si tu pouvais te voir avec le regard de ta mère, tu verrais comment tu n’as besoin de rien de superficiel pour être crissement la plus belle.
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Je les sais bien que tu compares aux autres, l'affaire c'est que vous n’avez pas le bon modèle.
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Je les sais bien que tu compares aux autres, l'affaire c'est que vous n’avez pas le bon modèle.

Juste parce que nos filles sont tellement belles.

J'aimerais ça que, quand tu regardes ton reflet dans le miroir, celui de la salle de bain quand tu sors de ta douche, tsé, quand tu dessines un cœur dans la buée, j'aimerais ça que tu vois comment tu es belle.

En fait, j'aimerais que tu te voies au naturel. Mettons que tu voyais pas que t'as pas de faux cils, ni de mascara ni de flafla, que tu voyais comment tes yeux sont d'un vert spécial qui vient du mélange entre ton père et moi. Je voudrais que tu voies combien tes cheveux sont longs avec plein de reflets qui ne viennent pas d'une boite en carton à rabais. Je voudrais que tu regardes et que tu remarques que tes joues sont un peu roses sans aucun ajout, sans pinceau, sans fards. Si tu souris un peu, tu vas voir comment tu rayonnes aussi sans gloss et que tes dents sont parfaitement blanches sans aucun traitement.

C'est le fond de teint qui vient ternir la fraicheur de ta jeunesse, c'est la lourdeur de l'ombre à paupières qui assombrit toute ta lumière. C'est si joli, cette petite cicatrice près de ton oreille, en fait, y'a juste toi qui la vois, mais tu cherches tellement à la cacher que tu finis par l'amplifier. Ça fait partie de toi et ça rappelle la fois où t'avais fait un face à face avec le coin de la table à diner. Tu es la seule à avoir ça, ça fait partie de ton identité, pourquoi le cacher ?

J'aimerais ça que tu vois l'image que j'ai mise au monde, celle de la perfection.

J'aimerais ça que tu vois l'image que j'ai mise au monde, celle de la perfection. Ça serait dommage de la détruire à coup de crayon trop foncé et de traits trop larges. Il faudrait que ce soit moi ton miroir au lieu d'être la société. Ce n'est pas moi qui t'ai appris le vernis, les faux ongles, les faux seins, et toute la parade.

Quand tu dis que tu veux perdre du poids, ça me tue un peu parce que vraiment tu n'as pas besoin de ça. T'entraîner autant pour répondre à des standards irréalistes, te priver aux dépens d'images retouchées, publicisées. Fais-le pour toi, pour ta santé, mais fais le pas juste pour l'apparence. Vois-tu vraiment ce genre de fille dans les métros, au cinéma ? À l'école, tes profs, elles ont vraiment l'air de ça ? Le chignon parfait, pas de rides, aucune inégalité, aucun bouton, une taille de rêve, deux seins parfaitement identiques, la peau basanée, huilée et des vêtements qui font comme un gant..

Je voudrais juste que tu regardes sans te demander si tu vas plaire. Ce que ça prend en fait, c'est de la confiance, de l'estime, un brin d'humour, de l'ouverture. Ça prend quelque chose à dire, une opinion à exprimer sans la crainte d'être jugée, pis ça, ça ne se vend pas en bouteille, ça ne se fait pas en différentes couleurs. J'aimerais ça que tu regardes dans la glace et que tu vois que tu as tout ça à mettre en valeur. Pour vrai, tes cils on s'en câlisse un peu, ton acrylique ne te mènera nulle part, pis des faux seins à seize ans, je pense que ça ne devrait pas être une priorité.

Je les sais bien que tu compares aux autres, l'affaire c'est que vous n'avez pas le bon modèle. C'est quand même un beau paradoxe. Tout le monde s'affiche avec le beau discours de s'aimer comme on est, de s'accepter avec nos différences, mais en même temps, on recherche une beauté fatale pour promouvoir le message, pour le rendre plus réaliste. En fait, je n'ai rien contre le maquillage, c'est juste qu'il faut accepter de voir qui on est vraiment avant d'essayer de fitter dans le regard des autres, je veux juste être certaine que tu te trouves belle aussi sans garniture, sans artifice.

Si tu te regardais dans un miroir qui pouvait refléter le regard que je pose sur toi chaque jour, tu verrais la couleur de la détermination qui s'agence parfaitement avec celle du courage.

Si tu te regardais dans un miroir qui pouvait refléter le regard que je pose sur toi chaque jour, tu verrais la couleur de la détermination qui s'agence parfaitement avec celle du courage. Tu verrais le reflet des mille couleurs que laisse l'expérience au passage, tu verrais l'éclat de belles valeurs, telles que l'honnêteté, la fidélité, le dévouement. Près de ton oreille, tu verrais la petite marque laissée par l'envie de foncer vers l'aventure, tête première, fonceuse. Tu remarquerais sur ton visage toute la beauté d'un monde à découvrir pis sur tes mains, les ongles cassés deviendraient le symbole de tout ce que tu as porté.

J'aimerais juste ça que, pour quelques secondes, drette-là, tu puisses te voir avec mes yeux à moi, tu verrais qui tu es vraiment, sans influence, sans aucune pression, prends deux secondes, lèves la tête et sois fière. Si tu pouvais te voir avec le regard de ta mère, tu verrais comment tu n'as besoin de rien de superficiel pour être crissement la plus belle.

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