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Pourquoi je parle de ma dépression (et pourquoi vous devriez faire de même)

TÊTE À TÊTES - Depuis quatre ans, je parle ouvertement de ma dépression. Une dépression qui m'a mené à une tentative de suicide à 16 ans et deux à 27 ans. Une dépression qui est toujours présente et qui m'affecte encore aujourd'hui.
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Depuis quatre ans, je parle ouvertement de ma dépression.

Une dépression avec laquelle je vis depuis l'âge de 13 ans. Une dépression qui va et vient. Va et vient. Va et vient...

Une dépression qui m'a mené à une tentative de suicide à 16 ans et deux à 27 ans. Une dépression qui est toujours présente et qui m'affecte encore aujourd'hui.

Une dépression qui ne me définit pas. Qui ne me contrôle pas. Une dépression que je contrôle, que je comprends, que je gère. Une dépression dont je parle.

Tant et aussi longtemps que j'aurai de l'air dans mes poumons et que des mots sortiront de ma bouche, j'en parlerai.

Pourquoi?

Parce que je suis fier de mon parcours. Je suis fier de raconter ce que j'ai traversé. Je suis fier des leçons que j'ai apprises à la dure. Je peux vous en assurer : il n'y a pas une partie de moi, ne serait-ce qu'une toute petite, qui ait honte de mes tentatives de suicide, de ma maladie mentale, de mes imperfections.

Est-ce que la douleur d'un bras cassé est plus crédible que la douleur d'une âme en peine?

Il a fallu beaucoup de travail et de temps de guérison avant d'éprouver ce sentiment de fierté. Mais aujourd'hui, il est bien réel. Je crois que toutes les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale peuvent en arriver là.

Nous luttons tous. Nous souffrons tous. Alors, pourquoi la maladie mentale devrait isoler dans le silence tous ceux qui en sont victimes? On dit qu'ils sont faibles. Qu'ils doivent s'endurcir... Est-ce que la douleur d'un bras cassé est plus crédible que la douleur d'une âme en peine?

On m'a élevé en me faisant croire que la douleur physique est réelle et que la douleur émotionnelle est temporaire, qu'elle ne dure pas plus de temps qu'il n'en faut pour se secouer et se concentrer sur le positif. Ce n'est pas la faute de mes parents ou celle de mes amis ou encore de mes enseignants. C'était comme ça, tout simplement.

Ayant été un golfeur presque toute ma vie, cette douleur émotionnelle me guettait souvent après une mauvaise ronde. Le score élevé que je voyais après mon nom m'a souvent dévasté. Je ne valais rien. On me disait - et je me disais aussi à moi-même - de passer à autre chose et de me concentrer sur la ronde du lendemain. Le fait de jouer mieux le jour suivant serait le remède à cette douleur émotionnelle.

J'ai réalisé que mon histoire n'était pas rare. En fait, c'est très commun. Je suis loin d'être seul au monde.

Le problème, c'est que c'est beaucoup plus facile à dire qu'à faire. C'est comme dire à quelqu'un de se réveiller plus heureux demain. Ce n'est peut-être pas le meilleur conseil... Pourtant, c'est ce que je m'efforçais à faire chaque fois. Parce que quand je jouais mieux le lendemain, j'allais effectivement beaucoup mieux. Ce faisant, je bâtissais un château de cartes...

En 2011, le château s'est effondré. On m'hospitalisait après la troisième tentative de suicide de ma vie. À l'hôpital, j'ai été confronté à deux choix : me rétablir et passer à autre chose ou me rétablir et parler.

J'ai choisi la deuxième option. J'ai choisi de parler de ce que j'avais vécu. De parler de suicide, de dépression, de ma santé. Si j'avais été admis à l'hôpital pour un cancer, les gens m'auraient écouté. Alors pourquoi ne pas voir s'ils allaient écouter mon histoire de suicide.

Et ils m'ont écouté. Ils se sont souciés de moi. Ils ont parlé à leur tour.

Mes tentatives de suicide sont rapidement devenues des catalyseurs. Plusieurs membres de ma famille se sont ouverts. Ils ont commencé à parler de leurs problèmes de santé mentale, de la honte qu'ils vivaient, de choses qu'ils cachaient par crainte de l'image qu'ils pouvaient projeter.

Un an après mon hospitalisation, j'ai parlé pour la première fois devant un public. À mon ancienne école secondaire. J'ai parlé à un groupe d'élèves qui marchaient dans les mêmes corridors où je m'étais senti si troublé, peiné, déprimé lorsque j'étais adolescent et que je croyais être seul dans ma situation.

Je n'étais pas seul.

Je ne suis pas seul.

La réaction de ces jeunes a donné un sens à toute cette peine, toute cette douleur que j'avais pu vivre. En une heure, j'ai réalisé que mon histoire n'était pas rare. En fait, c'est très commun. Je suis loin d'être le seul au monde. En une heure, j'ai réalisé que, tant que j'aurais une plateforme en tant qu'athlète professionnel, je continuerais à parler fièrement de mes problèmes.

Pour moi, c'est comme s'asseoir avec ses amis autour de la table et parler de nos cicatrices. «Celle-là, c'est quand je suis tombé du quai.» «Celle-ci, c'est dû à un accident de ski.» «Et ça, c'est quand j'étais saoul et que j'ai trébuché dans la rue.» On peut en discuter, en rire, en pleurer et montrer les marques sur notre corps qui prouvent les blessures.

Je n'ai pas de cicatrices sur mon corps. Mes cicatrices ne sont pas visibles. Je ne peux pas les montrer. Mais les gens autour de moi les connaissent. Mes amis les plus proches peuvent s'asseoir autour de la table et m'écouter en parler, se reconnaître. Parce qu'eux aussi ont vécu des périodes difficiles. Peut-être pas de la même trempe, mais quand même. Nous pouvons en discuter, en rire, en pleurer. Ils ne me jugeront jamais et ne penseront jamais que je suis faible parce que je parle de tout ça.

Je parle parce que je crois qu'une cicatrice est une cicatrice. Peu importe si elle est visible ou pas. Je crois que nous pouvons apprendre les uns des autres, bien plus que nous le croyons. Je crois que nous pouvons bâtir un monde où il n'est pas tabou de parler de ses peines, de ses douleurs. Je crois que c'est tout à fait normal d'être blessé et ce l'est tout autant d'en parler.

C'est pour ça que je parle. Et vous devriez en faire autant.

Ce texte initialement publié sur le Huffington Post Canada a été traduit de l'anglais.

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