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Après avoir porté le voile pendant 22 ans, je me suis désendoctrinée

À ma sortie du couvent en 1972, libérée, la première chose que je me suis donné comme «priorité», c’est de prendre connaissance de l’Histoire des religions, afin de m’assurer que mes doutes étaient fondés.
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«Je souhaite aux femmes portant des signes religieux de se questionner et de se faire un devoir de s’instruire auprès d’Historiens reconnus. Peut-être seront-elles ensuite, tout comme moi, désendoctrinées!» (la photo date de 1968)
Andréa Richard
«Je souhaite aux femmes portant des signes religieux de se questionner et de se faire un devoir de s’instruire auprès d’Historiens reconnus. Peut-être seront-elles ensuite, tout comme moi, désendoctrinées!» (la photo date de 1968)

Ancienne religieuse, j'ai porté le voile pendant 22 ans.

Avant d'entrer chez les Petites Sœurs des pauvres, en 1950, j'ai dit à l'une de mes sœurs: «Pourquoi faut-il s'habiller comme des veuves, toutes de noir vêtues, avec un voile cachant nos cheveux qui, pourtant si naturellement, faisaient partie de notre corps?» J'appréhendais cette contrainte.

Chaque fois que nous sortions dans le public, je me sentais mal à l'aise. Comme religieuse, j'aurais voulu être habillée comme tout le monde, et ce, tout en faisant mon travail auprès des pauvres.

Lorsqu'on m'a imposé un nom, Sœur Xavier-Marie-de-la-Trinité, j'ai eu l'impression de perdre mon identité. Le soir, dans mon alcôve, j'ai pleuré, car je n'étais plus moi-même, Andréa.

Andréa Richard, Carmélites, en 1970.
Andréa Richard
Andréa Richard, Carmélites, en 1970.

Notre identité repose avant tout sur notre citoyenneté, dans le partage des mêmes droits et des mêmes devoirs. L'appartenance à une religion ne fait pas partie de notre identité citoyenne. On ne peut donc pas réclamer des privilèges au nom d'une religion.

À ma sortie du couvent en 1972, libérée, la première chose que je me suis donnée comme «priorité», c'est de prendre connaissance de l'Histoire des religions, afin de m'assurer que mes doutes étaient fondés.

Je me suis donc documentée. Les dogmes sont de pures inventions. Un exemple parmi beaucoup d'autres: au IIIe siècle, Arius, prêtre d'Alexandrie, niait que le Christ soit Dieu. Aux IV et V siècles, sous le règne de Julien Byzantin, des désaccords profonds existaient en matière dogmatique, christologique, théologique et doctrinale entre les cardinaux appelés alors pères de l'Église.

Instruite, j'ai alors compris que les religions viennent des hommes et que leurs dogmes et doctrines relèvent du mensonge. J'ai alors demandé que les autorités religieuses catholiques enlèvent mon nom comme membre de l'Église Catholique. Ce qui fut fait.

En voyant des gens ayant des formations universitaires, donc censées être instruits, qui tiennent à porter un signe ostentatoire religieux pour diverses raisons; je me suis dit qu'ils doivent être ignorants de l'Histoire des religions.

La remontée récente et géopolitique des intégrismes religieux ne vise rien de moins qu'à empiéter sur les lois de l'État. Il faut donc des balises qui à la fois protègeront l'État et la liberté de religion. À cette fin, les signes religieux ostentatoires devraient aussi être interdits dans les écoles et dans les hôpitaux.

Si le même esprit d'ouverture à la modernité n'est pas toujours obtenu aujourd'hui des imams ou des rabbins, une loi bien pensée les y obligera avec tous les égards dus à des citoyens croyants et pacifiques. Ils seront sensibles à la nécessité du respect de la loi qui, en vérité, les protège dans leurs lieux de culte.

Ceux qui demandent aujourd'hui des accommodements de nature religieuse sont considérés par leurs communautés respectives comme des «fanatiques». En leur accordant ce qu'ils demandent, nous ne servons pas le progrès de notre société, mais favorisons tout au contraire un fondamentalisme religieux qui freine son évolution.

Je souhaite aux femmes portant des signes religieux de se questionner et de se faire un devoir de s'instruire auprès d'Historiens reconnus. Peut-être seront-elles ensuite, tout comme moi, désendoctrinées!

Andréa Richard, l'auteure de ce billet de blogue.
Andréa Richard
Andréa Richard, l'auteure de ce billet de blogue.

Notre gouvernement de la CAQ, avec raison, veut interdire le port des signes religieux, entre autres, pour les enseignants. C'est la pédagogie moderne, plus éclairée, qui nous y oblige.

Bien sûr, pour nos enfants et nos jeunes, la neutralité des personnes significatives qui interviennent auprès d'eux est de mise parce que la montée du fait religieux risque de mener à l'empiètement des religions sur les lois de l'État. Il faut donc des balises.

Une véritable laïcité, en nos institutions et appliquée à tous les éléments de la vie sociétale et culturelle, sous réserve des lieux de culte protégés par la loi, serait un remède à bien des maux passés et une prévention pour ceux que l'avenir nous réserve.

La loi 21 sur la laïcité, appliquée, ne pourra que restaurer une paix aujourd'hui menacée par la montée fondamentaliste et intégriste des religions, constatée dans les pays occidentaux et à laquelle le Québec n'échappe pas. Chacun est libre de croire ou de ne pas croire en des dieux, mais la laïcité unie et devrait primer dans le monde entier. Les religions divisent et engendrent des guerres. Nous en avons les preuves historiques.

J'approuve la loi 21 pour la laïcité. La laïcité unie. Il est donc grand temps qu'elle soit appliquée.

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