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Laïcité: M. Legault, c'est correct de dire «non»

Parce que la laïcité, ce n’est pas adapter l’État à toutes les religions.
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Tout comme nous, elles aimeraient que quelqu’un prenne la parole à leur place et que des mots aussi simples que «NON» soient prononcés de temps à autre.
sarote pruksachat via Getty Images
Tout comme nous, elles aimeraient que quelqu’un prenne la parole à leur place et que des mots aussi simples que «NON» soient prononcés de temps à autre.

Nous sommes deux immigrantes, originaires de l'Uruguay, un tout petit pays avec une très longue et solide histoire de laïcité de l'État, où les questions de discrimination ne se posent même pas.

Arrivées au Canada il y a plus de 10 ans, nous nous intéressons à tout ce qui se passe dans ce pays qui est devenu le nôtre et que nous aimons et respectons profondément.

Respect: voilà le mot-clé

Il y a en ce moment de nombreuses discussions à propos du respect des religions, des accommodements raisonnables, des signes religieux (ostentatoires ou pas), de l'égalité homme-femme, des droits des femmes, etc. Ce sont des discussions de plus en plus fréquentes et qui n'ont, à notre avis, aucune raison d'être, d'autant plus que leur ton ne fait que s'envenimer au fil du temps.

En fait, le Canada en général et le Québec en particulier ont des lois et des règles très claires, parfaitement accordées aux mœurs et coutumes d'une société laïque, moderne et plurielle avec un grand respect des droits de la personne, qui ouvre ses bras et ses portes à tous ceux qui veulent en faire partie. Ce qui signifie: «qui veulent S'INTÉGRER». Et s'intégrer, c'est avant tout respecter les lois et les normes qui nous régissent au sein du pays d'accueil.

Voilà pourquoi il existe des questions qui ne devraient même pas être posées. Et qui ne devraient, en aucun cas, être admises par les autorités compétentes ni générer des accommodements raisonnables, qui sont tout sauf raisonnables!

Par exemple, accepter qu'une femme témoigne en justice à visage voilé. Ou qu'un policier porte un turban. Ou qu'on accorde des horaires spéciaux de travail pour la prière. Ou qu'on installe des rideaux dans un local du YMCA pour ménager certaines sensibilités religieuses ultra-orthodoxes. Etc., etc., etc.

La liste est longue...

Chaque fois que les autorités refusent une exemption, la pression devient énorme et on crie à la discrimination (religieuse, de races, sexuelle, et j'en passe!) alors que c'est complètement faux. Plusieurs accommodements «raisonnables» auraient dû être refusés tout simplement parce qu'ils vont à l'encontre des règles et des us et coutumes de la société canadienne.

C'est très important, pour l'énorme majorité de Canadiens, de voir le visage des gens avec lesquels ils interagissent (en justice, il s'agit même un droit de l'accusé), ça ne les dérange pas du tout de voir les sportifs en shorts courts qui font de la bicyclette fixe, la police est censée porter un uniforme qui n'inclut pas le turban, et on ne comprend pas très bien pourquoi on devrait accorder des horaires spéciaux au nom d'une religion, alors que l'État se prétend laïque.

Parce que la laïcité, ce n'est pas adapter l'État à toutes les religions

La laïcité, c'est accepter toutes les croyances... à condition que leur pratique n'aille pas à l'encontre des règles de l'État. Essayer de faire le contraire est un non-sens, une absurdité et un exercice voué à l'échec.

D'abord, parce que c'est virtuellement impossible d'accorder des exemptions dans tous les cas de figure qui peuvent se présenter concernant les centaines de religions existantes. Et alors ça devient discriminatoire en faveur de certaines religions.

Ensuite, parce qu'un État laïque ne devrait pas accorder plus d'importance aux pratiques religieuses qu'à celles liées, par exemple, à des traditions ancestrales. Une fois encore, ce serait discriminatoire en faveur des religions.

Finalement, parce qu'à force d'essayer d'adapter l'État, on va bien finir par le transformer. Si cela se produit, le Canada pourrait ne plus être le pays vers lequel tant d'immigrants et de réfugiés se sont tournés dans leur quête d'une vie meilleure.

Ce sont ces accommodements, complètement déraisonnables, qui menacent notre belle société canadienne.

Ils créent de l'injustice, de la discrimination inversée, des situations inéquitables qui dérangent et qui commencent à se traduire par de la xénophobie et de la haine raciale et religieuse, alors que le but était, au contraire, de rassembler et de contribuer à l'intégration des immigrants.

Hypothéquer ses propres principes, mais au nom de quoi?

Au nom de la laïcité et de l'ouverture d'esprit, on dirait qu'on est en train d'hypothéquer nos principes et que l'on fait fi de ce que pense l'énorme majorité des Canadiens.

Et pourtant, ce serait tellement simple d'établir une seule et unique règle et de s'y tenir:

«Le Canada accepte toutes les religions, les ethnies et même les habitudes des gens en provenance du monde entier, à la seule condition que celles-ci n'aillent pas à l'encontre des lois et des us et coutumes canadiens. En cas de conflit, c'est aux immigrants de s'adapter. Aucun accommodement ne sera autorisé, en aucun cas, sauf pour des raisons de santé.»

Nous ne sommes que deux Canadiennes nées quelque part dans le monde, mère et fille, fières de notre nouvelle nationalité et très reconnaissantes envers ce pays qui nous a ouvert les portes.

Nous sommes prêtes à parier qu'il existe plusieurs milliers de personnes au Canada qui pensent comme nous, qui intègrent une majorité silencieuse et qui ne s'exprimeront sans doute pas avant qu'il ne soit trop tard. Pas avant, par exemple, de basculer vers le populisme, le fascisme ou l'extrême droite, comme c'est déjà le cas dans beaucoup de pays.

Tout comme nous, elles aimeraient que quelqu'un prenne la parole à leur place et que des mots aussi simples que «NON» soient prononcés de temps à autre.

Notre message aux immigrants doit être clair et sans équivoque: vous êtes venus ici parce que nous sommes une terre d'accueil laïque et plurielle, ce qui est possible grâce à des lois et à des habitudes qui vous ont bien servit pour obtenir votre statut... et maintenant vous voulez les modifier, les contourner, les piétiner, les ignorer? Il n'en est pas question.

Vous devez vous adapter et les respecter. Ou partir.

Ce texte a été coécrit avec Patricia Vera.

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