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Notre printemps, leurs printemps

Pourquoi et comment ces mouvements révolutionnaires se sont répandus de Tunis au Caire, en passant par Tripoli? Et pourquoi ne se sont-ils pas répandus ailleurs, autour ou plus loin?
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Le 21 mars est toujours très attendu, puisqu'il annonce le début du printemps, ses rues ensoleillées, ses passants souriants et ses arbres colorés. Il l'est d'autant plus cette année que l'hiver a été long, froid et pluvieux.

Mais depuis deux ans, le sens du terme "printemps" s'est transformé. Il n'est plus que ça : il est plus que ça. C'est ce moment où des jeunes Tunisiens, puis des moins jeunes Tunisiens, puis des jeunes et des moins jeunes Égyptiens, puis des jeunes et des moins jeunes Libyens, puis les Syriens sont sortis planter les graines de la Démocratie. Et montrer à la terre entière, dans ce même moment, que l'espoir d'un monde nouveau est toujours possible. Qu'il est possible de déloger des militaires du pouvoir, de continuer à lutter lorsque des religieux essaient de se l'accaparer, de se libérer de ses chaînes d'opprimés et d'envoyer un message à plus qu'une région du monde.

Ces révolutions sont devenues les Printemps arabes: au milieu de l'hiver politique, l'arrivée du printemps démocratique. Ce message universel a fait naitre la furieuse envie de croire, en Orient comme en Occident, à un changement durable : à un renouveau véritable. Il a fait germer le désir que ce mouvement de l'Histoire, emportant une bonne partie du Maghreb et du Machrek, pourrait entrainer avec lui d'autres jougs. En Chine, la révolution de jasmin aurait pu donner de l'écho aux Printemps tunisiens et égyptiens si l'appareil politique chinois n'avait su l'enrayer aussi vite. Dans le Golfe, le Bahreïn de la dynastie Al Khalifa a éteint dans le sang la mèche révolutionnaire... alors que le Yémen vient tout juste de trouver une solution démocratique à ses tensions internes en élisant le président Abd Rabbo Mansour Hadi.

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Et alors que la portée de ce mouvement était de moins en moins universelle, le foyer régional des Printemps arabes lui-même s'est corrompu. Très vite, les peuples ont offert la place qu'ils retiraient aux opprimants à des tenants de l'Islam radical, à l'instar du parti Ennahda arrivé au pouvoir en Tunisie lors de l'élection de l'assemblée constituante de 2011, ou encore des Frères musulmans dont le président égyptien, Mohamed Morsi, est issu. Alors, le message que les jeunes révolutionnaires ont envoyé au monde s'est brouillé, malgré la flamme qu'ils essayent d'entretenir. L'automne s'est installé, annonçant un autre hiver bien rude. Et pour cause, nos grilles de lecture sont des matrices républicaines laïques. Dans nos sociétés, l'État et la Religion sont deux affaires bien différentes et distinctes : à l'État le souci, public, de l'intérêt général, et à la religion le souci de l'ordre privé. Cet automatisme du lien république-démocratie-laïcité nous empêche de penser que des peuples, emportés par les fracas de leur Révolution, ont pu vouloir rattacher leurs institutions politiques à leurs institutions religieuses. Automatisme qui va jusqu'à inciter certains, un peu trop nombreux, à préférer la situation antérieure à cette phase de libération. Mais aujourd'hui, il importe peu de savoir ce qui motive ces regrets - islamophobie, athéisme exacerbé, étatisme... Ce qui compte, c'est l'enlisement des Printemps arabes.

Le passé nous en effet a appris que les révolutions ne mettent pas forcément l'Histoire dans le sens du progrès. Il peut y avoir les belles déclarations puis Cromwell et Napoléon, de grands mouvements populaires puis Staline.

Alors, une question cruciale mérite d'être étudiée : pourquoi, malgré tout, des peuples décident de se révolter? En fait, à quel moment l'opprimé devient résistant, et à quel moment le résistant devient révolutionnaire? Qu'est-ce qui structure un mouvement révolutionnaire à l'échelle d'une Nation? Pourquoi et comment, malgré les pressions policières, parfois militaires, ces gens de tous âges ont tenu jusqu'à obtenir la démission des gouvernements qui les asservissaient parfois au prix de leur vie? Pourquoi et comment ces mouvements révolutionnaires se sont répandus de Tunis au Caire, en passant par Tripoli? Et pourquoi ne se sont-ils pas répandus ailleurs, autour ou plus loin?

Pour cerner ce questionnement, Youth Diplomacy organise cet été une étude collaborative: la Caravane des Printemps traversera des pays qui ont été ou qui auraient pu être touchés par ce mouvement historique. A l'heure où, en France, on se concentre davantage sur le Mali, dont l'actualité a chassé la Libye, le jour du printemps est l'occasion d'appeler les jeunes Français postuler pour participer à cette analyse de terrain des Printemps arabes.

Amine Abdelmadjid et Thomas Friang sont les créateurs de la Caravane des Printemps, un voyage d'étude porté par Youth Diplomacy. Plus d'informations sur le site du projet caravane-des-printemps.org

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