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Le REM: quand la consultation et la transparence déraillent

Le REM, pour Philippe Couillard, c’est le « projet d’une génération », une « nouvelle Baie-James ». Oui, mais, confidentiel.
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Philippe Couillard
LA PRESSE CANADIENNE
Philippe Couillard

Sacré Philippe Couillard, il a toujours le mot pour rire ! Impatient de faire taire les récriminations sur son projet chéri du REM, il a tonné récemment : « tous les dialogues possibles et nécessaires ont été faits » !

Lorsqu'on a suivi comme moi la suite ininterrompue de refus de dialogue autour de ce projet, on ne peut s'empêcher d'éclater de rire.

D'abord, son gouvernement a ordonné la tenue d'un BAPE accéléré, de six mois, sur ce projet qui pourtant introduisait une technologie nouvelle, multipliant tunnels et viaducs. Les organisations participantes n'ont eu que quatre semaines pour préparer leurs dossiers, avec une documentation pourtant parcellaire de la Caisse.

Même les ministères du gouvernement, dont les mémoires ont dû être relus à la loupe, s'en sont plaints. Le ministère de l'Environnement posait des questions sur l'impact sur les GES des montagnes de ciment nécessaires à sa construction. Sans réponse. Le ministère des Municipalités voulait savoir quelle pression sur l'étalement urbain serait provoquée par le choix du DIX30 comme porte d'entrée du REM sur la Rive-Sud. Il ne le saura jamais. Le ministère des Transports voulait savoir pourquoi la technologie du Skytrain était choisie plutôt qu'une autre. Il ne le saura pas.

Le ministère des Transports voulait savoir pourquoi la technologie du Skytrain était choisie plutôt qu'une autre. Il ne le saura pas.

En février 2017, le BAPE rendait un de ses rapports les plus sévères de son histoire. Voici ce qu'il disait des « dialogues » ayant entouré la formulation du projet :

« Le promoteur a manqué à ses obligations de transparence en ne rendant pas publiques, dans un délai raisonnable, les prévisions d'achalandage des trois antennes de l'ouest, qui font partie intégrante du projet de REM soumis à l'analyse de la commission » (pages 216 et 217)

« Le promoteur a déployé une série d'outils de communication qui visaient principalement à informer les participants sur le projet, plutôt qu'à associer les parties prenantes et la population à la conception et la réalisation du projet. » (page xvi)

« L'Agglomération de Longueuil et le RTL estiment ne pas avoir été suffisamment consultés par le promoteur. Ils précisent qu'ils n'ont eu qu'une rencontre et un échange téléphonique et qu'ils ne considèrent pas avoir été partie prenante du projet. » (page 32)

Un refus répété de consulter

Le rapport du BAPE a été reçu par le gouvernement libéral avec mépris. Le maire de Montréal Denis Coderre, la Chambre de commerce du Montréal Métropolitain ont traité les commissaires comme des écolos farfelus qui ne connaissaient rien aux transports. Un jour sombre pour une de nos institutions les plus crédibles et les plus utiles. (Il est vrai que les commissaires du BAPE en fonction n'étaient pas ceux nommés par Jean Charest, mais ceux nommés par le gouvernement Marois. Bref, ils faisaient correctement leur travail.)

Comme porte-parole du dossier, j'ai évidemment voulu offrir aux Québécois un « dialogue possible et nécessaire ». J'ai déposé une motion à l'Assemblée nationale demandant que la Commission des transports et de l'environnement, dont c'est le rôle, étudie le projet de REM et entende les participants impliqués.

Un à un, les ministres et députés libéraux se sont levés pour voter contre cette motion, pour interdire le dialogue.

Rapprochons-nous dans le temps à la semaine du 12 mars dernier. Les villes et sociétés de transport membres de l'Autorité régionale de transport métropolitain reçoivent une liasse de documents et de cartes marqués « confidentiel » qui impose ni plus ni moins la tutelle du REM sur les décisions locales. Les autorités locales auraient voulu un trajet parallèle aux stations du REM ? Interdit. Une configuration où les bus répondraient à d'autres besoins ? Ils doivent rabattre la clientèle sur le REM. Pour 99 ans. Renouvelable pour un autre 99 ans.

Bousculées, étonnées, agacées, deux des plus grandes villes du Québec, Laval et Longueuil, votent contre les ententes secrètes lors de la réunion de l'ARTM. Mais ils sont en minorité dans cet organisme savamment dessiné par Denis Coderre et Martin Coiteux pour donner tout le pouvoir au maire de Montréal.

Le REM, pour Philippe Couillard, c'est le « projet d'une génération », une « nouvelle Baie-James ». Oui, mais, confidentiel. Nous avons demandé ce mardi à l'Assemblée la divulgation des ententes secrètes. Les Libéraux ont refusé. Je ne suis pas surpris.

Mais je sens que je suis trop sévère avec Philippe Couillard. Il a quand même consulté un peu. C'est ce que nous a révélé La Presse de ce samedi. Je cite : « La première mouture du REM, présentée au ministère des Transports, ne dépassait pas l'aéroport Pierre-Elliott-Trudeau du côté ouest. Il aura fallu une intervention percutante de Geoffrey Kelly et les pressions de Martin Coiteux et de Carlos Leitão pour que le REM se prolonge vers l'ouest, vers leurs électeurs.

On se demandait pourquoi le REM se rendait à grands frais si loin dans l'ouest de l'île, là où aucune étude d'achalandage ne pouvait justifier un investissement aussi important. On le sait maintenant. Le premier ministre a eu avec ses ministres libéraux de l'ouest de l'île « tous les dialogues possibles et nécessaires ».

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