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De Simon Bolivar à Hugo Chávez: les métamorphoses d'une icône

En Argentine, Perón a laissé derrière lui le péronisme. Au Nicaragua, Sandino est devenu l'icône vénérée du sandinisme. Mais sans Chávez, que restera-t-il demain du chavisme ?
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AFP

Hugo Chávez, président du Venezuela, n'a pas attendu d'être mort pour entrer au panthéon bolivarien du socialisme du XXIe siècle. Il y a été porté de son vivant par les foules enthousiastes qui se pressaient sur son passage afin de recueillir un peu de sa présence avant de revenir à la maison chargées d'émotion, de souvenirs et de promesses révolutionnaires. Vu de l'extérieur, le culte de la personnalité qui entourait l'ancien militaire putschiste pouvait surprendre. Il se comprend mieux quand on se replace dans la tradition hagiographique d'un pays qui avait fait de Simon Bolivar une idole vénérée, une icône intouchable, avant même la prise du pouvoir de celui qui se présentait comme son héritier spirituel.

Ernesto "Che" Guevara, présenté comme un modèle indépassable par les dirigeants vénézuéliens a connu le même sort, et on peut penser que dans les mois qui viennent les t-shirts, bibelots, bijoux et images diverses du leader décédé inonderont les rues de Caracas et des autres capitales des principaux pays membres de l'ALBA : La Havane (Cuba), La Paz (Bolivie), Quito (Équateur) et Managua (Nicaragua). D'autres, pendant ce temps, se frotteront les mains, en particulier du côté de Washington et de Bogotá, en tablant sur l'épuisement de la rhétorique bolivarienne...

Mais il ne suffit pas de parler fort et haut pour devenir une figure emblématique. Il est vrai que Chávez, contrairement aux autres membres de son équipe et en particulier à Nicolas Maduro, son successeur désigné, était un vrai tribun charismatique, passionné, exubérant, provocateur. Les discours de Chávez avaient le don d'électriser les foules, comme savait le faire Fidel Castro en son temps, quand il pouvait pérorer pendant des heures sur la Place de la Révolution, à La Havane. Habile manipulateur des mass médias, Chávez s'adressait régulièrement à son peuple par le biais de la télévision, dans des programmes taillés à sa mesure. Il avait le don d'inventer des formules chocs et n'hésitait pas à imposer son verbe dans les forums internationaux - ce qui lui a valu de recevoir un cinglant "tais-toi", de la part du roi d'Espagne, en 2007 au Chili, au cours d'une réunion du XVII Sommet ibéroaméricain.

Au-delà des expressions qui ont fait la renommée de Chávez (sans oublier son style vestimentaire inimitable oscillant entre nationaliste kitsch et militaire putschiste) , il faut aussi prendre la mesure des discours qui ont façonné son image de leader révolutionnaire. Fermement opposé à l'impérialisme nord-américain et au capitalisme globalisé incarné par Wall Street, il a affiché des amitiés douteuses du côté de Mohamad Khadafi et de Mahmoud Ahmadinejad. Si le premier ne peut plus présenter ses condoléances au peuple vénézuélien, le second s'est tout de suite empressé d'affirmer le soutien de l'Iran à un grand défenseur des valeurs révolutionnaires.

Cependant, résumer son engagement politique à des relations considérées comme sulfureuses par les locataires de la Maison-Blanche serait pour le moins réducteur. En créant l'Alliance bolivarienne pour les peuples d'Amérique (ALBA) il a voulu affirmer qu'un autre monde, non dirigé par les marchés financiers, était possible et, grâce à lui, le Venezuela est devenu un acteur important sur la scène géopolitique internationale. Sur le plan intérieur, il a engagé une politique économique et sociale volontariste qui lui a valu la haine des élites locales et l'affection, pour ne pas dire l'amour, des classes populaires.

Son message et son image resteront néanmoins ambigus. En Argentine, Perón a laissé derrière lui le péronisme. Au Nicaragua, Sandino est devenu l'icône vénérée du sandinisme. Mais sans Chávez, que restera-t-il demain du chavisme ?

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