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Pout, pout, pout!

Depuis 2010, on compte 258 entreprises acquises à l'étranger par des entreprises québécoises contre 85 dans le sens inverse. C'est quoi, le problème?
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Sans surprise, nos deux «nationaleux» économiques en chef, le couple Pierre Karl Péladeau et François Legault, ont déchiré leur chemise et réclamé l'intervention de l'État pour bloquer la vente des actions du Groupe St-Hubert à Cara, qui exploite quelques-unes des marques de restaurants hautement reconnus au pays, dont Swiss Chalet, Kelsey's et Harvey's. La «fleuronnite» aiguë frappe encore à l'Assemblée nationale!

On ne s'attendait à rien d'autre du PQ, quoique M. Péladeau soit lui-même mal placé pour réclamer une intervention pouvant s'avérer aussi désastreuse que celle que la Caisse, pilotée par Jean-Claude Scraire et son bras droit, Michel Nadeau, a effectuée dans Québecor Média, un placement qui n'a pratiquement rien rapporté depuis 2001 (alors qu'un placement dans Rogers aurait, dividende compris, doublé en valeur pendant cette période, générant 3,2 milliards de $ de profits pour les déposants).

Là où l'incohérence nous laisse coi, c'est la position nationaliste de la CAQ de François Legault. Celui qui est si volubile à constater, avec raison, le manque d'investissement privé au Québec, est le premier à cracher sur un investissement de 537 millions de $ par Cara au Québec!

Jean-Pierre Léger a pourtant expliqué que cette transaction assurait la pérennité de l'entreprise. M. Léger a affirmé en entrevue que le modèle québécois, si ardemment défendu par tous les partis politiques représentés à l'Assemblée nationale, abaissait le revenu disponible des Québécois au plus bas niveau au Canada, leur laissant peu d'argent pour fréquenter ses restaurants. C'est cette inquiétude, entre autres, qui l'a poussé dans les bras de Cara.

L'approche nationaliste de MM. Legault et Péladeau voulant isoler le Québec sous un dôme de verre ne fera que faire fuir les capitaux et les entrepreneurs. Qui voudra investir au Québec, prendre des risques, travailler d'arrache-pied pour se faire dire, après avoir monté une affaire avec succès, que c'est l'État qui allait décider à qui cet entrepreneur pourrait vendre ses actions?

Et cessez de me parler de protéger des sièges sociaux! Michael Bloom, du Conference Board, a produit une étude qui démontre, après une analyse macro-économique de quelque 200 compagnies et de 540 transactions et une étude détaillée de quelque 30 acquisitions, que les acquisitions de compagnies canadiennes par des compagnies étrangères sont généralement neutres à positives pour le pays.

Bien que dans certains cas, les emplois liés à la gouvernance (ex. : membres de conseil d'administration) diminuent après une acquisition par une firme étrangère, il n'y a aucune preuve de diminution de l'emploi dans les sièges sociaux canadiens. Par contre, l'impact au niveau opérationnel est plutôt positif car il y a souvent moins de dédoublements de produits ou de territoires. De plus, après leur acquisition, les entreprises bénéficient d'investissements accrus et le nombre d'emplois augmente. Elles profitent également de l'expertise et du savoir-faire étranger. Enfin, l'impact d'une acquisition sur les communautés (ex. : philanthropie) semble minime.

Les conclusions de M. Bloom se confirment dans la réalité québécoise. Le meilleur exemple est Van Houtte. Ses ventes sont en hausse significative depuis son acquisition par l'américaine Green Mountain, propulsées par les ambitions canadiennes confiées par sa nouvelle compagnie-mère. Elle appartient maintenant à Keurig. Les propriétaires ont investi plus de 55 millions de $ pour moderniser les installations de Saint-Michel, où ont été consolidées les opérations canadiennes et où sont produits à toutes les semaines des millions de K-Cup pour les États-Unis. L'usine a reçu le mandat nord-américain pour la production de l'ensemble du portfolio de café en grains de Green Mountain. Tous les sacs partent maintenant de l'usine montréalaise. Pas mal, pour ce que François Legault appelle une vilaine «succursale»!

On peut espérer une pareille croissance chez St-Hubert. Le réseau de restaurants de Cara offre un débouché pour les produits (sauces, salades et autres) fabriqués par près de 500 employés à Blainville et Boisbriand, ce qui pourrait générer des revenus de plus de 100 millions de $ additionnels à cette entreprise mature coincée au Québec. Les fournisseurs ont aussi une belle opportunité. Pensons aux producteurs de poulet comme la Coopérative Exceldor de Lévis, Olymer Flamingo de Saint-Hyacinthe ou les cultivateurs de choux à travers le Québec.

Et nos bureaucrates feraient mieux? Rappelons que la Société générale de financement (SGF), pendant son existence, a fait subir un coût d'opportunité de 7,4 milliards de $ aux Québécois. Et qui a oublié les pertes causées par des investissements dans Steinberg, Noranda, Asbestos, etc.

Le dirigisme étatique détruit notre richesse collective. Le Fonds de développement économique, l'instrument utilisé par le gouvernement pour ses interventions dans l'économie, estime lui-même qu'il perdra 50 cents pour chaque dollar prêté!

De toute façon, les Québécois sont bien plus des prédateurs que des proies. Depuis 2010, on compte 258 entreprises acquises à l'étranger par des entreprises québécoises contre 85 dans le sens inverse. C'est quoi, le problème?

Les collectivistes québécois ont le «nous» facile. Faut-il rappeler que Groupe St-Hubert n'est pas le fleuron des Québécois, mais le fleuron d'un Québécois, qui a investi et travaillé fort et qui mérite ce succès extraordinaire?

Avant de discuter d'intervention de l'État dans les affaires de St-Hubert, MM. Legault et Péladeau devraient goûter à leur propre médecine en allant manger une poitrine de poulet dans la cafétéria d'un hôpital public... On verra ensuite.

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