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On ne change pas les zébrures d'un tigre

Selon le premier ministre, sous-traiter au privé n'apporterait pas de gains énormes. « Les gains, on va les faire au Québec au cours des prochains mois et années par une simplification des structures», a soutenu M. Couillard.
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J'ai applaudi le ministre des Finances du Québec, Carlos Leitão, quand il a dit récemment que son gouvernement n'était pas dogmatique en termes de structure de livraison des services publics. « Ce que nous voulons, c'est que les citoyens aient accès à des services publics et si ça doit être fait par l'État, tant mieux; si ça peut être fait par des organismes à but non lucratif, tant mieux aussi » avait-il affirmé.

J'ai cependant déchanté quand le premier ministre a rappelé M. Leitão à l'ordre. Selon le premier ministre, sous-traiter au privé n'apporterait pas de gains énormes. « Les gains, on va les faire au Québec au cours des prochains mois et années par une simplification des structures», a soutenu M. Couillard.

Évidemment, je ne propose pas de tout privatiser. M. Couillard devrait néanmoins réviser les différentes missions de l'État en se posant la question suivante : le service offert est-il stratégique ou essentiel au point où seuls les employés de l'État devraient l'offrir? Sinon, il faut appliquer le test des Pages jaunes : si un service fourni par l'État l'est aussi par un fournisseur privé qu'on retrouve dans les pages jaunes, cette prestation de services devrait être offerte en appel d'offres. On permettrait aux employés du public qui offrent déjà le service de soumissionner en concurrence contre le privé. C'est ce qu'a fait l'ex-maire d'Indianapolis Steven Goldsmith. Dès son élection en 1991, le maire a entrepris de créer de la concurrence aux services municipaux ancillaires et non essentiels de sa ville en demandant à certains de ses employés de soumissionner contre le privé pour les contrats municipaux. Ce processus lui a permis de réduire les coûts de 400 millions $ par année. Une des surprises du maire Goldsmith dans ce processus fut de constater que plusieurs appels d'offres ont été remportés par les employés de la ville eux-mêmes. Ceux-ci, expérimentés dans leur domaine, savaient où se trouvaient le gaspillage et les pertes de temps et, une fois autorisée à changer l'organisation du travail, ont pu remporter plusieurs contrats en étant plus productifs et efficaces tout en ne diminuant pas leur salaire et en épargnant néanmoins des sommes importantes pour les contribuables.

Les exemples abondent à travers le monde où des services payés par l'État ont été sous-traités au privé à meilleur coût et à qualité égale ou meilleure. En santé, le cas de figure québécois est la clinique RocklandMD qui effectue des chirurgies pour 8% de moins qu'à l'hôpital Sacré-Cœur. En infrastructures, le cas classique est celui de l'autoroute 25. Le prolongement de l'autoroute 25 a commencé en mars 2008, s'est terminé quatre mois avant l'échéancier prévu et a fait épargner 226M$ au gouvernement tout en respectant son budget. On le voit tous les jours dans les municipalités du Québec qui sous-traitent des services municipaux d'enlèvement d'ordures ou de déneigement.

Ailleurs au pays et à travers le monde, la preuve de l'efficacité du privé est faite depuis des lustres. L'alcool en Alberta, les services municipaux à Sandy Springs, les autobus à Londres, les hôpitaux à Stockholm, l'équivalent d'Emploi-Québec en Australie, le système de rentes au Chili ne sont que quelques exemples de réussites spectaculaires quand on se sert intelligemment du privé pour livrer les services publics.

Je n'ai rien en soi contre les fonctionnaires du public, mais ils n'ont tout simplement pas l'incitatif d'être productifs. D'abord, ils ne dépensent pas leur argent - et les syndicats le savent! Ensuite, ils ne sont pas récompensés s'ils sont productifs ou pénalisés dans le cas contraire. De plus, la plupart œuvrent dans des monopoles qui ne sont pas soumis aux règles du marché. Les exemples de mauvaise gestion abondent. Les frais d'exploitation par dollar de vente de la SAQ sont près du double de ceux de Métro. Les coûts de commissions de vente par dollar de revenu de Loto-Québec sont environ la moitié plus élevés que Camelot, son équivalent au Royaume-Uni. Innergex construit des centrales au fil de l'eau à trois fois moins que le coût des petites centrales construites par Hydro-Québec. La liste d'horreur n'en finit plus.

Il semble malheureusement que l'exercice que je propose ne se fera pas sous les libéraux de M. Couillard. Ce n'est pas dans leur ADN que de réduire la taille de l'État. On ne change pas les zébrures d'un tigre. Je ne suis donc pas surpris que les propositions des Leitão /Coiteux du PLQ soient rejetées par leur propre parti, lui qui a contribué autant que le PQ à la croissance soutenue de l'étatisme québécois depuis 40 ans.

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