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La première Fierté gaie d'un pasteur évangélique

Malheureusement, l'Église est à la traîne. Mais j'étais fier de défiler au côté d'autres chrétiens, de m'excuser auprès de mes concitoyens pour toutes les choses auxquelles certains religieux ont failli.
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Cette année, j'ai été invité à participer à ma première marche des fiertés. Robin, une amie, nous a proposé de rejoindre le char de son église et de marcher dans le cortège. Durant ces quatre derniers mois, l'église de Robin nous a énormément soutenus. Notre jeune église, qui a à peine un an, a été rejetée par notre hiérarchie à cause de notre volonté d'inclusion de la communauté LGBTQ.

Je milite depuis longtemps en faveur d'une théologie inclusive, estimant que nos églises doivent accueillir à bras ouverts nos ami-e-s gais, lesbiennes, bisexuel-le-s, transgenres, leurs familles et amis. J'ai affirmé qu'ils avaient leur place parmi nous, qu'il s'agisse de faire du volontariat, d'enseigner la Bible, d'augmenter les effectifs des ministères ou d'aider au service lors des communions. J'ai soutenu l'implication de la communauté LGBTQ à tous les niveaux pour deux raisons : premièrement, parce que je suis convaincu que Dieu aime tout ce que nous sommes, y compris notre identité sexuelle ; et deuxièmement, parce que notre église est récente, et que nous avons besoin de chacun. Vous voulez venir nous aider à faire de la limonade et à installer des chaises par une belle journée d'été? On vous attend!

Ce que je n'avais pas prévu, en revanche, c'est l'incroyable sentiment d'appartenance que j'ai ressenti en parcourant les rues et les quais de Portland.

Mon amie et collègue, le révérend Amy Piatt, m'a tendu une pancarte juste avant de rejoindre Robin et la First Christian Church dans le cortège, à North Park Blocks. On pouvait lire :

"En tant que chrétien, JE ME DÉSOLE de l'étroitesse d'esprit, des critiques, des mensonges et des manigances de ceux qui refusent l'égalité des droits à tant de personnes au nom de Dieu."

Cela faisait longtemps que j'admirais cette pancarte dans le bureau d'Amy. Je n'arrivais pas à croire que j'allais défiler avec !

Pendant trop longtemps, je me suis interdit de faire ainsi part de mes convictions, de peur qu'une photo ne fasse le tour des réseaux sociaux. Voilà ce que je ressentais dans mon ancienne confession, comme beaucoup d'amis et collègues qui en font toujours partie. "Mieux vaut rester dans le non-dit." Voilà ce que nous disait la hiérarchie. Nous n'avions pas le droit de célébrer des mariages entre personnes de même sexe, même si nous étions nombreux à être pour et à le faire discrètement depuis des années. Mais si quelqu'un tombait sur une photo de nous, on pouvait perdre notre place. Il était inconcevable de défiler avec une pancarte lors de la Fierté gaie.

Aujourd'hui, je n'ai plus de raison d'avoir peur. Nous avons déjà tout perdu : deux ans de financement, nos amis et le soutien de notre "famille de foi". Autant aller de l'avant, pas à pas, et voir ce que ce monde a à nous offrir.

Ce cheminement est tout simplement incroyable.

En descendant Burnside Avenue, j'ai compris que j'étais à mille lieues de mon habituelle promenade dominicale. Je portais mon étole rouge de pasteur (symbole de la Pentecôte) et une pancarte que personne ne pouvait rater.

Et j'étais sincère : je suis désolé pour toutes ces personnes qui ont dit, fait et exigé des choses inimaginables et dégradantes, et rejeté au nom de Dieu. Suis-je responsable de ces personnes remplies de haine, ou de celles qui s'appuient sur des dogmes cruels et obsolètes ? D'une certaine façon, je pense que oui. En tant que pasteur, je me préoccupe réellement du développement et du potentiel de chacun. Et quand une personne parle ou dénigre les autres au nom de Dieu, je dois redoubler d'efforts, indépendamment de la religion de chacun, ou de son désintérêt pour la foi. En tant que pasteur chrétien, je crois, comme le disait Jésus, que nous avons tous été créés de manière étrange et admirable, et que nous sommes conviés à aimer notre prochain.

Je sais que c'est très ambitieux. Mais je pense qu'en ces temps de division, de mépris et de désespoir, les gens aspirent à un élargissement du champ des possibles.

Je marchais donc sur Burnside, et les premiers spectateurs ont commencé à plisser les yeux pour lire ma pancarte. Je ne savais pas du tout à quoi m'attendre. Allaient-ils croire que je manifestais ma désapprobation? Accepteraient-ils mes excuses?

J'ai été bouleversé par leurs réactions. Ils ont commencé à applaudir. Nombre d'entre eux m'ont demandé de ralentir pour prendre des photos. D'autres essuyaient leurs larmes et murmuraient des "Merci" ou des "J'accepte [tes excuses]". Tout le long du cortège, nous avons été accueillis par des cris de joie, des applaudissements, des appareils photo et des larmes. J'étais content de porter des lunettes de soleil, car il m'est arrivé plusieurs fois de fondre en larmes.

C'était trop pour moi : impossible de ne pas être bouleversé par cette générosité, ce pardon, ce début de guérison de blessures incroyablement profondes.

Je n'avais qu'un sentiment : la fierté.

Et je pense que c'est précisément le but de la Fierté gaie, du moins pour moi : des personnes qui se réunissent et manifestent leur soutien pour dire que l'amour triomphe de tout.

Avec notre modeste char, nous faisions partie des quelques rares groupes religieux à participer à la Fierté gaie de dimanche dernier. Nous étions nettement moins nombreux que les associations à but non lucratif et les entreprises (Nike, Intel, Adidas, Comcast, Chipotle, etc.), qui avaient beaucoup plus d'impact que nous. Malheureusement, l'Église est à la traîne. Mais j'étais fier de défiler au côté d'autres chrétiens, de m'excuser auprès de mes concitoyens pour toutes les choses auxquelles certains religieux ont failli.

Comme je l'ai dit, je milite depuis des années pour inclure les personnes LGBTQ à tous les niveaux de l'Église. Mais je n'avais pas prévu les possibilités qui s'offriraient à nous si ces personnes n'étaient pas seulement intégrées (comme de nombreuses églises commencent à le faire), mais participaient activement à la création d'une meilleure communauté religieuse.

Déjà, leurs goûts musicaux sont bien meilleurs ! Blague à part, l'intégration ne fait pas tout. Lors de cette journée, j'ai appris que le fait d'accueillir les autres à bras ouverts nous transforme. Parce que c'est ce qui se produit quand on s'ouvre aux autres pour accueillir la foi, partager, discuter, se prendre en photos, demander pardon, tisser des liens et chercher la guérison.

Notre petite église a seulement un an, mais elle continue à évoluer dans la foi. Nous grandissons petit à petit, en retroussant nos manches pour la foi et la justice. Je suis très reconnaissant de l'hospitalité dont font preuve des congrégations bien établies, comme la First Christian Church, qui nous a intégrés dans ses locaux et dans sa vie. J'espère que certains de mes frères et mes sœurs d'Église cesseront un jour de se taire, ou de se tenir à l'écart, et trouveront le courage d'avancer pour rejoindre cette communauté grandissante de foi et d'inclusion.

J'espère surtout retrouver certains de ceux que nous avons croisés pendant le défilé, pour prendre un café et continuer à discuter. J'ai hâte de voir ce qui nous attend tous, sans exception aucune, d'ici à la Fierté gaie 2016.

Photo de Brooke Hoyer

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Ce blogue, publié à l'origine sur Le Huffington Post (États-Unis), a été traduit par Julie Engels et Bamiyan Shiff pour Fast for Word.

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