SANTÉ - Du courage, il lui en a fallu. Dans un long message partagé sur son compte Twitter jeudi 4 avril, Adam, 21 ans, a décidé d’être honnête avec ses quelque 1100 abonnés. Il se confie pour la première fois au sujet des 84 kilos qu’il a perdus et de l’impact que cela a eu sur sa santé mentale.
“Je vais la faire court en disant que j’ai toujours été obèse, explique-t-il en préambule. J’ai toujours souffert du regard des autres, de la grossophobie quotidienne, familiale, extérieure et médicale. [...] Dites-vous que j’ai vécu ça pendant les dix-neuf premières années de ma vie.”
Discriminations, humiliations, moqueries. C’est ce qui l’a poussé, à l’aube de ses 19 ans, à subir ce qu’on appelle une sleeve gastrectomie, en juin 2016. Il s’agit d’une opération lourde pour traiter l’obésité sévère. Elle consiste à retirer les deux tiers gauches de l’estomac.
Entre les risques d’hémorragie, d’infection ou de mauvaise cicatrisation, une telle opération n’est pas sans danger. Certaines personnes, comme la blogueuse Julie Katz, ont préféré la refuser de peur de souffrir, de mourir ou de se faire “charcuter”.
Même si de nombreux témoignages sur le sujet, comme celui de l’ancienne star de télé-réalité Loana, s’accordent à dire que l’intervention leur a été bénéfique, il en existe d’autres, beaucoup moins connus, qui démontrent le contraire.
De 174 à 90 kilos
C’est le cas de celui d’Adam. De 174 kilos avant l’opération, ce dernier n’en fait aujourd’hui plus que 90. Heureux, libéré et fier de son nouveau corps, il n’a pas arrêté de se prendre en photo dans un premier temps. Mais voilà, l’euphorie des débuts n’a pas duré bien longtemps.
Lors d’un séjour à Londres, loin de chez lui, le jeune homme s’est senti dépassé. Il ne se reconnaissait plus. “Pendant ma perte de poids, bien qu’elle ait été rapide, je n’ai pas vraiment pu remarquer les changements directs comme je me regardais tous les jours dans le miroir. Mais quand mon poids s’est stabilisé, je me suis mis petit à petit à réaliser que c’était désormais mon corps et que je devais apprendre à vivre avec”, concède Adam, contacté par Le HuffPost.
Il poursuit: “D’un côté, j’ai les excédents de peau et les vergetures qui me rappellent que j’ai été gros et que j’ai toujours cette impression de l’être. De l’autre, je me retrouve dans un corps de corpulence normale qui apparaît comme tel aux yeux de tout le monde.”
L’absence de suivi psychologique
Cet égarement, Adam n’arrive pas à en parler autour de lui. “Les gens minimisent un peu ce ressenti et ne comprennent pas que l’on puisse se sentir mal dans sa peau malgré la perte de poids”, confie le jeune homme originaire de Rouen qui, aujourd’hui encore, manque de confiance en lui.
Alors qu’on lui avait affirmé à plusieurs reprises qu’il pourrait bénéficier d’un suivi psychologique avant et après l’intervention, il n’en a finalement eu à aucun moment. Il le regrette. “J’ai l’impression qu’il est un peu trop tard pour être aidé, concède l’étudiant en anglais. Le mal a déjà été fait.”
Il n’est pas le seul à être dans ce cas. Depuis sa publication, de nombreux internautes lui ont apporté son soutien. Certains lui ont aussi fait part du même sentiment. Aucune de ces personnes n’a reçu d’encadrement psychologique satisfaisant après leur sleeve, assure Adam.
Comme le rappelle la militante Catherine Lemoine au HuffPost, à ce jour, seuls 12% des patients sur les cinq années qui suivent l’opération reçoivent ce genre d’aide. Elle demande à ce qu’un système d’accompagnement pris en charge par l’assurance maladie soit encadré par les autorités de santé.
Comme elle, Adam estime que l’impact d’une telle opération est minimisé par le corps médical. “J’ai vraiment le sentiment que les chirurgies de l’obésité sont présentées comme des interventions bénignes, aussi bien dans la société que chez les professionnels de santé, observe-t-il. On m’a toujours présenté ça comme une opération miracle, une intervention de la dernière chance, si bien que je ne me suis jamais posé de question sur les risques ou les conséquences négatives.”
Une relation compliquée ”à vie”
D’après Adam, être gros en France est un vrai problème. “On ne peut pas aller chez un professionnel de santé sans qu’il ne ramène absolument tous nos problèmes à notre poids, sans vraiment chercher à comprendre ce qui ne va pas”, déplore ce dernier.
À l’heure actuelle, le jeune homme de 21 ans ne sait pas ce qui lui permettrait d’aller mieux. Réussir à mettre des mots sur son mal-être et à pointer du doigt ce qui ne va pas a déjà été une première étape, selon lui.
Adam doit bientôt subir une première chirurgie réparatrice. Il s’agit d’une abdominoplastie, une opération qui consiste à retirer l’excès de peau de son ventre. Même si cela doit lui permettre de dire adieu à l’un de ses plus gros complexes, Adam n’est pas très optimiste. Il pense qu’il aura “une relation compliquée avec son corps toute sa vie”.
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