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Christchurch: la théorie complotiste du «grand remplacement» français, obsession du terroriste

Le présumé auteur de l'attentat en Nouvelle-Zélande aurait décidé d'agir après un voyage en France et la défaite de Marine Le Pen face à Macron.

L'attentat terroriste islamophobe de deux mosquées à Christchurch en Nouvelle-Zélande a fait au moins 49 morts et une quarantaine de blessés, ce vendredi 15 mars.

Sur ses comptes Twitter et Facebook - depuis supprimés - le présumé tireur a exprimé son adhérence à la théorie du complot du "grand remplacement", régulièrement dénoncée par de nombreux spécialistes et historiens.

Les traces que l'homme a laissées sur ses réseaux sociaux montrent un internaute baignant dans l'idéologie d'extrême droite. Sur la plateforme Scribd, l'intéressé avait mis en ligne un manifeste intitulé le "grand remplacement", théorie conspirationniste et islamophobe en vogue dans les milieux d'extrême droite à travers le monde, y compris au sein de partis politiques bien établis.

La défaite de Marine Le Pen l'a "désespéré"

Dans ce texte, il pointe plusieurs éléments majeurs l'ayant poussé à commettre ce massacre dont l'un étant ce qu'il appelle la "balkanisation des États-Unis" et l'autre concernant l'élection présidentielle française en 2017.

En effet, le face-à-face entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen -qui selon lui aurait pu agir contre l'immigration - puis la défaite de cette dernière, l'ont "désespéré". "La possibilité d'une victoire par la candidate quasi-nationaliste était au moins, pour moi, un signe que peut-être une solution politique était encore possible", écrit-il. Mais lors de la victoire du candidat LREM, sa "croyance en une solution démocratique a disparu".

Il explique également qu'un voyage en France lui a permis d'avoir une sorte de prise de conscience. Dans ce document, il affirme en effet avoir perçu l'"invasion de la France par les non-Blancs", ce qui l'a définitivement convaincu que le "grand remplacement" était en marche.

Le terroriste évoque ainsi "l'invasion de la France, le pessimisme des Français, la perte de culture et d'identité et la farce des solutions politiques proposées" et les soldats français tombés au combat lors de la Seconde Guerre Mondiale pour lutter contre l'envahisseur (allemand), "morts en vain" puisque l'on permet aujourd'hui à d'autres "envahisseurs de nous conquérir", "sans broncher".

Son voyage en France, "la goutte d'eau"

Enfin, selon lui, "la goutte d'eau qui a fait déborder le vase" a été de voir l'état des villes et villages français. "Dans chaque ville française, dans chaque village, les envahisseurs étaient là", " les Français étaient souvent en minorité", écrit-il dans son message, évoquant des Français "seuls, sans enfant ou d'un âge avancé" alors que les migrants "étaient jeunes, pleins d'énergie et avec de grandes familles et beaucoup d'enfants". "J'en avais vu assez", conclut-il.

Des mots qui rejoignent donc la théorie complotiste du "grand remplacement" - introduite par Renaud Camus, écrivain français d'extrême droite - selon laquelle il existerait un processus de substitution de la population française et européenne par une population non européenne, originaire notamment d'Afrique et du Maghreb. Un changement de population qui impliquerait en l'occurrence un changement de civilisation et qui serait soutenu par l'élite politique, intellectuelle et médiatique européenne, par idéologie ou par intérêt économique. Un "fantasme" et une "sinistre farce", comme l'analysent plusieurs spécialiste interrogés par Le Monde.

Cette idée a notamment été soutenue par Jean-Marie Le Pen en 2014: "Les Noirs et les Arabes vont remplacer les Français 'de souche'; ils veulent saper la 'civilisation' française; il suffit d'ouvrir les yeux pour s'en rendre compte mais les élites nient cette réalité". Michel Houellebecq lui aussi s'est vu reprocher d'accréditer cette théorie dans son livre "Soumission" en 2015, mais s'était défendu de toute "provocation" ou "satire" dans sa politique-fiction où le chef d'un parti musulman prend le pouvoir en France.

Mais aussi par Éric Zemmour qui a régulièrement évoqué "le grand remplacement" ces dernières années, comme n'ont pas manqué de rapidement le noter plusieurs personnalités sur Twitter. "Pensée particulière pour le pyromane le plus amplifié de France", écrit notamment le journaliste Olivier Tesquet à l'adresse de Zemmour après avoir découvert le manifeste du terroriste australien. Edwy Plenel rappelle pour sa part que Mediapart s'était justement penché sur cette "idéologie potentiellement meurtrière" dont Zemmour "se fait le propagandiste".

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