POLITIQUE - La vidéo a beaucoup tourné ce week-end sur les réseaux sociaux de la France insoumise, des Républicains, du Rassemblement national ainsi que sur ceux de certains gilets jaunes. Ce vendredi 18 janvier, dans la foulée du second débat-marathon d'Emmanuel Macron devant près de 600 édiles à Souillac, René Revol, maire (France insoumise) de la commune de Grabels dans l'Hérault, postait un message pour dénoncer la "mascarade" du grand débat national.
Ce grand débat, affirme-t-il, est "pour Monsieur Macron un moyen de faire campagne, parce qu'on est dans une campagne électorale, clairement, en utilisant les moyens de l'État". Et de citer ces "milliers de gendarmes, de policiers, tous les moyens de réception, toutes les autorités [...] présidents de région, ministres, députés de toute la région... Tous ces gens mobilisés pour entourer de petites centaines de maires dont une toute petite partie a pu parler".
Emmanuel Macron engagé dans une "campagne qui ne dit pas son nom" en vue des élections européennes, le tout aux frais du contribuable? C'est bien la petite musique qui monte depuis quelques jours dans les rangs de l'opposition, de gauche comme de droite.
"Il est urgent que le président Macron cesse de faire campagne pour sa liste aux Européennes sur le dos des Gilets jaunes et répare ce qu'il a cassé", s'étranglait encore ce dimanche la députée LR Valérie Boyer. Peu avant, la porte-parole LR Laurence Saillet mettait les pieds dans le plat. Emmanuel Macron "s'engage-t-il pour mettre fin au chaos ou est-il seulement en campagne pour les européennes? Combien coûtent aux contribuables ses 'one-man shows' et combien sera intégré dans les comptes de campagne d'En Marche?"
"Propagande électorale"
A l'extrême droite comme à l'extrême gauche, le constat est identique et il inquiète. D'autant plus que le chef de l'Etat excelle dans ces débats-marathons dépassant à chaque fois plus de six heures face à des maires souvent remontés mais plus conciliants que les gilets jaunes tenus à distance par le service d'ordre.
Difficile d'ailleurs de ne pas voir dans ces exercices de stand-up une réédition des meetings de campagne présidentiels du fondateur d'En Marche!. Emmanuel Macron, qui était déjà venu à Souillac en février 2017, a de fait retrouvé ses accents naturels de candidat, mêlant humour et fermeté, bienveillance et bons mots tout en ôtant sa veste, debout au centre de l'agora et micro à la main, avant de retourner son auditoire. "On retrouve le Emmanuel Macron qu'on a connu" pendant la présidentielle, reconnaissait mercredi dernier le député LREM du Val-d'Oise Aurélien Taché au lendemain du premier débat. Un aveu qui nourrit les suspicions alors que la majorité n'entend pas s'arrêter en si bon chemin.
Le gouvernement n'a pas encore officialisé s'il entendait adresser la "Lettre aux Français" du président de la République à tous les foyers par voie postale. Mais le ministre des Comptes publics, Gérald Darmanin, s'y est montré favorable ce dimanche 20 janvier. Interrogé sur France 3 sur le coût d'une telle opération postale, Gérald Darmanin a estimé que "lorsqu'on décide en général de faire un référendum et donc d'adresser à tous les Français une propagande électorale, ça coûte entre 5 et 7 millions d'euros". L'opposition appréciera la comparaison.
Ce n'est pas tout. L'exécutif entend dupliquer la formule étrennée cette semaine jusqu'à la mi-mars, fin officielle du grand débat. Une nouvelle rencontre avec des élus est d'ores et déjà prévue le 24 ou 25 janvier, dans un lieu que l'Elysée doit encore dévoiler. "L'idée est d'avoir une à deux rencontres par semaine, en fonction de l'agenda international, et garder des rencontres qui soient à taille humaine", a expliqué Sébastien Lecornu, ministre chargé des Collectivités territoriales et co-animateur du grand débat.
Équité du temps de parole
Autant de rendez-vous qui vont rythmer l'actualité politique ces deux prochains mois, offrant une intense couverture médiatique au président de la République au détriment des gilets jaunes et de l'opposition. Car, depuis le lancement de cette concertation inédite, les chaînes d'information en continu, qui donnent le ton de l'actualité politique, ont fait le choix de diffuser en intégralité ces débats-marathons.
Pour Priscillia Ludosky, une des figures emblématiques des gilets jaunes "c'est un moyen d'endormir un petit peu l'affaire et de se dire: 'les manifestations ne vont plus se faire, on va faire un petit débat et on va les endormir'". "Avec SON grand débat, Macron érige la campagne permanente en méthode de gouvernement et impose une nouvelle tyrannie de la communication", s'étrangle encore l'orateur national de la France Insoumise François Cocq.
L'inquiétude est telle dans les rangs de l'opposition que plusieurs partis ont alerté le CSA sur le décompte du temps de parole d'Emmanuel Macron pour qu'il soit amputé de celui de La République En Marche. "Bien entendu, le show multiplex à la Castro (6 heures d'affilée tous les 3 jours) d'Emmanuel Macron sur toutes les chaînes d'info sera décompté du temps d'antenne de LREM pour les européennes?", a notamment alerté le parti centriste UDI sur Twitter.
Joint par FranceInfo, le gendarme de l'audiovisuel a fait savoir qu'"a priori, les propos tenus par le président de la République, en raison de leur contenu et de leur contexte, pourraient être considérés comme relevant du débat politique national". Et donc attribués au temps de parole dédié au parti présidentiel.
>> Et vous, que voulez vous changer? Participez à notre grand débat:
À voir également sur Le HuffPost:
LIRE AUSSI
- Le grand débat, conçu pour "endormir" les gilets jaunes, selon Priscillia Ludosky Pour l'acte X, les gilets jaunes comparent le grand débat de Macron à Hanouna Grand débat national: 500 réunions déjà programmées