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En pleine pénurie de main-d'oeuvre, Québec veut diminuer ses cibles d'immigration de 50 000 à 40 000 personnes par année

Le ministre de l’Immigration veut mettre son plan temporaire à exécution dès 2019.
Simon Jolin-Barrette, ministre de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion, a déposé son plan pour réduire les seuils d'immigration le 4 décembre 2018.
La Presse canadienne
Simon Jolin-Barrette, ministre de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion, a déposé son plan pour réduire les seuils d'immigration le 4 décembre 2018.

QUÉBEC – Tel que prévu, le gouvernement Legault abaisse les seuils d'immigration du Québec d'environ 50 000 à 40 000 dès 2019. Pour y arriver, il compte sabrer dans l'immigration économique, entre autres, alors que la province connaît une pénurie de main-d'œuvre.

Le ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, Simon Jolin-Barrette, a déposé son plan en immigration mardi après-midi à l'Assemblée nationale.

Il prévoit que la province va accueillir entre 38 000 et 42 000 nouveaux arrivants cette année, avec une cible souhaitée de 40 000. De ce nombre, 23 450 personnes seraient issues de l'immigration économique – dont 19 500 travailleurs qualifiés et 3200 gens d'affaires.

Il s'agit d'une baisse marquée des prévisions de 2018, où il est prévu que 30 200 personnes soient accueillies grâce à l'immigration économique.

Du côté de la réunification familiale, le gouvernement Legault compte accueillir 8900 personnes, alors que ces seuils en 2018 étaient de 11 500.

Pour la catégorie des réfugiés – même si c'est Ottawa qui a le dernier mot – Québec veut en diminuer le nombre également. La province en aurait accueilli 8600 en 2018 – ces chiffres devraient descendre à 6950 selon la CAQ.

Le gouvernement Legault compte baisser toutes les catégories d'immigration de 23,8% en moyenne.

Simon Jolin-Barrette estime que le Québec peut toucher à la réunification familiale et au nombre de réfugiés, même s'il s'agit d'une compétence fédérale.
La Presse canadienne
Simon Jolin-Barrette estime que le Québec peut toucher à la réunification familiale et au nombre de réfugiés, même s'il s'agit d'une compétence fédérale.

Le ministre se défend

Critiqué par les partis d'opposition dès le dépôt de son plan, à la période des questions, le ministre Jolin-Barrette s'est défendu de faire perdre des travailleurs économiques alors que le Québec connaît une pénurie de main-d'œuvre dans plusieurs secteurs.

«Nous, à la CAQ, on a fait le choix du succès de l'immigration. On a fait le choix de décider d'investir pour chaque personne qui fait le choix courageux de choisir le Québec, de quitter son pays d'origine et d'avoir un accueil qui est respectueux au Québec», a-t-il dit.

Estimant que son plan est signé à «l'encre du courage», le ministre croit qu'une baisse du seuil d'immigration temporaire se traduira en une «réelle volonté de mieux franciser et de mieux accompagner chaque immigrant dans son intégration».

Il soutient que la promesse de la CAQ s'inscrit dans un «fort consensus québécois» – étant donné la majorité acquise par son gouvernement – et que son exécution enverra un «puissant message» en faveur d'une meilleure intégration.

Le ministre précise que des consultations seront en cours dès l'an prochain pour établir la prochaine planification pluriannuelle en matière d'immigration pour 2020-2022. C'est à ce moment-là qu'il compte revoir le nombre de nouveaux arrivants accueillis au Québec.

Le ministre fédéral Dominic LeBlanc prône la bonne humeur pour tenter de se sortir de ce dossier épineux.
La Presse canadienne
Le ministre fédéral Dominic LeBlanc prône la bonne humeur pour tenter de se sortir de ce dossier épineux.

Qu'en dit Ottawa?

Le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, a déclaré plus tôt en journée que le moment était mal choisi pour réduire les seuils d'immigration au Québec en raison de la pénurie de main-d'œuvre dans la province, entre autres.

Son ministre des Affaires gouvernementales, Dominic LeBlanc, s'est dit déçu, mais «pas surpris» du plan de la CAQ. Il compte poursuivre les discussions sur cette question avec M. Jolin-Barrette.

«Vous me connaissez assez bien, moi, je ne suis pas quelqu'un qui veut me chicaner, moi, je suis toujours de bonne humeur», a claironné le ministre LeBlanc en réponse aux questions des journalistes.

Malgré cette bonne humeur, Ottawa a exprimé ses inquiétudes à Québec sur ses obligations internationales pour les réfugiés et les risques d'un système à deux vitesses pour la réunification familiale, entre autres.

Le ministre LeBlanc n'a pas voulu dire si le plan de la CAQ va modifier l'Accord Canada-Québec relatif à l'immigration qui prévaut depuis 1991 et qui garantit des centaines de millions de dollars au Québec de la part du fédéral pour l'accueil des immigrants et des réfugiés.

L'ex-ministre libérale Dominique Anglade se désole de voir que la CAQ va aggraver le problème de main-d'oeuvre au Québec.
La Presse canadienne
L'ex-ministre libérale Dominique Anglade se désole de voir que la CAQ va aggraver le problème de main-d'oeuvre au Québec.

L'opposition furieuse à Québec

«Ce plan, à notre avis, est non seulement illogique, mais il est également anti-économique», a déploré Dominique Anglade, porte-parole libérale en matière d'économie et d'immigration, à la suite du dépôt du document.

L'ex-ministre rapporte que le président de l'Union des municipalités du Québec et maire de Drummondville, Alexandre Cusson, dit avoir «presque poussé un soupir de soulagement» lorsqu'une entreprise qui voulait s'installer dans sa ville est allée en Ontario.

«Combien d'entreprises vont vivre ce scénario-là? Combien d'entreprises vont vouloir venir au Québec, ne pas trouver la main-d'œuvre et aller ailleurs? On sous-estime grandement l'impact que ça a sur la capacité d'attraction des investissements étrangers», critique Mme Anglade.

Catherine Fournier, porte-parole du Parti québécois en matière d'immigration, se désole de voir que la CAQ ne s'est pas fiée aux opinions d'experts pour établir un seuil d'immigration. Elle s'inquiète aussi de voir que seulement 41% des nouveaux arrivants devront parler français.

«C'est fort préoccupant parce qu'on sait que la connaissance du français, c'est le critère principal pour assurer une intégration des nouveaux arrivants à la société québécoise», ajoute Mme Fournier.

Andrés Fontecilla, de Québec solidaire, croit que la CAQ parle des deux côtés de la bouche lorsqu'elle dit, au moment de la mise à jour économique, que la pénurie de main-d'œuvre va affecter l'économie du Québec, puis qu'elle dépose un plan pour réduire l'immigration le lendemain.

Précision: Une version précédente de cet article indiquait les seuils minimaux et maximaux à atteindre, ainsi que les diminutions prévues dans chaque catégorie. Afin de ne pas mélanger les lecteurs, nous avons préféré indiquer les cibles à atteindre seulement, et la baisse moyenne des seuils d'immigration.

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