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Comportement déplacé sur Instagram: la réputation de Tony Clement n’est pas nouvelle, selon certaines femmes

« Je l’ai cru sur parole, quand il a parlé d’un événement isolé », mentionne Andrew Scheer.
Tony Clement
THE CANADIAN PRESS/Andrew Vaughan
Tony Clement

OTTAWA — Quand les manchettes concernant le partage d'images sexuellement explicites par le député conservateur Tony Clement sont sorties, mardi, Claire McWatt n'était pas surprise.

La jeune femme raconte avoir eu un premier contact avec Tony Clement en 2014, alors que le député de Parry Sound-Muskoka, marié et père de trois enfants, a commencé à la suivre sur Twitter et à lui envoyer des messages privés peu après minuit.

À la même époque, la consommation de drogues de l'ancien maire de Toronto Rob Ford, aujourd'hui décédé, faisait la une des journaux. Claire McWatt avait 23 ans, elle était présidente du Toronto Youth Cabinet, selon sa bio sur Twitter. Tony Clement lui a écrit qu'il voulait échanger avec elle sur la politique municipale.

Elle a senti qu'il avait franchi une limite.

«Il savait que j'étais jeune, dit-elle. Ça fait peur.»

Claire McWatt, qui est impliquée en politique municipale, explique avoir mis un terme à cette conversation très matinale en insultant Tony Clement. Elle s'est moquée de son «pavillon marketing» au lac artificiel des sommets du G8 et du G20, construit dans sa circonscription pour 100 000 $ de fonds publics. Malgré ce qu'elle qualifie de comportement «complètement inapproprié» de la part du député, il a commencé à la suivre sur Instagram quelques années plus tard.

«Il est remonté très loin sur le fil pour aimer d'anciennes photos, raconte Claire McWatt. Il aimait toujours des photos de femmes, accompagnées d'autres femmes.» Les habitudes du député sur les médias sociaux lui ont valu la réputation d'être «étrange sur Instagram» — et c'était connu des jeunes employés politiques de tous les partis, selon elle.

Demande d'extorsion financière

Le vétéran député conservateur a déclaré mardi avoir été « ciblé » après avoir partagé «des images et vidéos au contenu sexuel explicite» à une destinatrice qu'il croyait être une femme consentante. Il a mentionné que les images, envoyées au cours des trois dernières semaines, ont ensuite été utilisées à des fins «d'extorsion financière», quand le ou la destinataire a exigé de l'argent pour ne pas divulguer publiquement les images.

«Je reconnais avoir pris un mauvais chemin et avoir manqué de jugement», a-t-il dit, avant d'annoncer qu'il démissionnait de son rôle de porte-parole en matière de justice et de toutes ses fonctions au sein de comités parlementaires.

Jeudi, Tony Clement a publié une lettre à ses électeurs admettant que de « mauvaises décisions » dans sa vie personnelle et privée l'ont mené à des «actes d'infidélité». Il reconnaît aussi que son comportement sur les médias sociaux a pu rendre certaines personnes nerveuses.

«Je présente mes excuses aux femmes avec qui j'ai échangé ces messages, et je demande pardon à toute personne qui estime que j'ai dépassé les limites en ligne et que j'aurais pu rendre inconfortable, sans même le réaliser», a-t-il écrit. «Je suis profondément désolé.»

La GRC enquête sur l'extorsion présumée qui, selon Global News, constitue une demande de 50 000 euros.

Mais selon Claire McWatt, le problème dépasse la présumée extorsion. « Il y a un dénominateur commun ici, et ce sont les jeunes femmes». Elle explique que c'est ce qui l'a motivée à parler, espérant inciter d'autres personnes à se manifester.

Une autre femme provenant de Parry Sound, en Ontario, a raconté son expérience avec Tony Clement, qui a commencé à la suivre sur Instagram et à aimer ses publications. Dans un message détaillé sur Twitter, qui a été effacé depuis, elle affirmait que les messages du député étaient «inoffensifs» au début, avant de devenir intimes après quelques mois, après avoir établi un climat de confiance et d'amitié.

«Il m'a envoyé des messages, des photos et vidéos à contenu sexuel. Il flirtait avec moi. Il me disait qu'il s'était ennuyé, que j'étais incroyable», a-t-elle écrit. Elle a également mentionné avoir refusé des invitations à prendre un café ou à lui rendre visite dans sa maison de Port Sydney.

«Il m'a toujours assuré que j'étais la seule femme à qui il parlait, et que nos conversations devaient rester discrètes (je comprends maintenant pourquoi).»

Elle dit avoir appris il y a deux mois que Tony Clement flirtait possiblement avec d'autres femmes. «Il m'a mentionné que quelqu'un cherchait à le coincer, mais il ne m'a pas expliqué pourquoi.»

Cette femme nous a demandé de taire son nom, parce qu'elle craint que cela porte atteinte à sa réputation, mais elle a confirmé le contenu de sa publication supprimée.

HuffPost Canada a demandé au bureau de Tony Clement de répondre aux allégations.

L'ancien ministre du cabinet conservateur est resté discret cette semaine, mais il a déclaré au Globe and Mail avoir aimé «toutes sortes» de photos sur Instagram, mais «n'avoir jamais envoyé de messages indésirables non sollicités».

Mercredi matin, Andrew Scheer a affirmé à maintes reprises aux journalistes qu'il était déçu du «très mauvais jugement» de Tony Clement. Le chef du parti conservateur affirme qu'il a été mis au courant des présumées tentatives d'extorsion la semaine dernière et qu'il a rencontré le député pour en discuter lundi dernier.

THE CANADIAN PRESS/Sean Kilpatrick

«C'est un terrible manque de jugement qui nous déçoit tous. Tony va maintenant se dévouer à sa famille, à son mariage, et nous lui souhaitons la meilleure des chances», a dit Andrew Scheer. Il a esquivé les questions concernant l'avenir de Tony Clement chez les conservateurs en vue des élections l'an prochain.

Mais quelques heures plus tard, comme certaines publications sur les médias sociaux, dont celle de Claire McWatt et d'autres, ont gagné en visibilité et en popularité, Andrew Scheer a modifié sa position.

«Je l'ai cru sur parole, quand il a parlé d'un événement isolé. Depuis, de nombreux autres incidents et allégations ont été rapportés, et par conséquent, j'ai demandé à Tony de démissionner du caucus pour lui permettre de répondre à ces allégations.»

Tony Clement était député provincial de l'Ontario avant de remporter un siège à la Chambre des communes en 2006. Il était président du Conseil du Trésor sous le précédent gouvernement conservateur, et faisait partie d'un petit groupe de députés et sénateurs à bénéficier d'une cote de sécurité de haut niveau, à titre de membre le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement – une fonction qu'il a maintenant dû quitter.

Après une réunion de son caucus, le ministre de la Sécurité publique, Ralph Goodale, a indiqué aux journalistes qu'il ne pensait pas que Tony Clement avait été ciblé parce qu'il était membre du comité.

«Je ne crois pas que ce soit le cas, mais je ne suis pas en mesure d'émettre des commentaires sur la situation», a-t-il dit.

Tony Clement siégera comme député indépendant à son retour à la Chambre des communes.

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