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Méganne Perry Mélançon: Gaspé «était dû pour une jeune candidate»

La jeune femme a réalisé un vieux «rêve discret» en devenant députée pour le Parti québécois. Mais elle a dû attendre un recomptage dramatique.
À 28 ans, Méganne Perry Mélançon a déjà de grands projets pour sa Gaspésie natale.
Facebook/Méganne Perry Mélançon
À 28 ans, Méganne Perry Mélançon a déjà de grands projets pour sa Gaspésie natale.

Lorsqu'elle a prononcé son discours de victoire, la députée de Gaspé, Méganne Perry Mélançon, a symboliquement porté la même robe que le 1 octobre – une façon pour elle de reculer dans le temps et de vivre la soirée d'élection qu'elle aurait voulu.

Le recomptage des bulletins de votes dans Gaspé a permis de faire élire l'élue péquiste avec 41 voix de majorité, alors que le décompte initial donnait le candidat libéral Alexandre Boulay vainqueur.

La victoire tant espérée a donc été célébrée le 14 octobre dernier, soit près de deux semaines après la soirée d'élections où elle avait perdu à la grande surprise de tous.

Méganne Perry Mélançon lors de son 5 à 7 de la victoire, qui s'est tenu le 14 octobre.
Facebook/Méganne Perry Mélançon
Méganne Perry Mélançon lors de son 5 à 7 de la victoire, qui s'est tenu le 14 octobre.

Des irrégularités ont été notées dans la boîte de scrutin 61, qui ne contenait que des votes libéraux. Malgré tout, Méganne Perry Mélançon se dit tout simplement soulagée de la tournure des événements.

«Ça a été difficile, autant pour moi que pour le candidat libéral, qui vivait l'inverse, dénote-t-elle. Il avait vécu une fausse victoire. Moi, on m'avait arraché la victoire. C'est un heureux dénouement, alors j'ai toujours eu une pensée pour lui qui a perdu son titre de député.»

Sa victoire était d'autant plus importante qu'elle hissait le Parti québécois (PQ) du 4 au 3 rang, légèrement devant Québec solidaire qui avait aussi fait élire 10 députés avec un total de 16% des voix. Le PQ a obtenu 17% des voix au Québec.

«C'était beaucoup de pression!» admet la jeune femme de 28 ans.

Pas péquiste de génération en génération

Celle qui a étudié en tourisme et travaillé comme attachée politique pour l'ancien député de Gaspé, Gaétan Lelièvre, était dans une mission commerciale au Pérou lorsque le député de Matane-Matapédia, Pascal Bérubé, lui a demandé si elle voulait se lancer dans l'arène politique.

«Il voyait le potentiel depuis longtemps chez moi, dit-elle. Une jeune femme dynamique, qui vient de la région... Pour lui, c'était tout à fait naturel que je sois la prochaine à me lancer.»

Les prochains à la convaincre de faire le saut étaient sa famille. Une cadette de trois filles, Méganne Perry Mélançon a beaucoup d'admiration pour son père – qu'elle surnomme affectueusement «l'encyclopédie» - et sa mère, qu'elle qualifie de «gestionnaire hors pair».

On était dus pour une jeune candidate!

«Il y a beaucoup de jeunes qui ont toujours voté selon ce que leurs parents leur ont inculqué. Mais chez nous, c'était vraiment très ouvert. Je n'ai jamais trop su les allégeances de mes parents. On n'est pas une famille péquiste de génération en génération.»

Elle sait cependant que sa famille a voté pour elle lors des dernières élections.

«On a toujours été libres de nos choix chez moi et c'est peut-être ça qui m'a intéressée au Parti québécois, poursuit-elle. Il y en a qui sont un peu plus à droite, d'autres un peu plus à gauche. C'est un parti qui a une raison d'être, où il y a un bel échange d'idées et qui a un projet de société qui est collectif quand même.»

Ses stages à l'étranger, dans le domaine du tourisme, lui ont aussi ouvert les yeux sur la souveraineté du Québec. Elle se souvient en particulier de son temps passé à Barcelone, où elle a appris à parler espagnol. Mais les locaux étaient insultés qu'elle ne leur parle pas en catalan.

Ce combat pour sauvegarder le catalan, elle le compare à celui de la protection du français au Québec.

La politique, un ancien «rêve discret»

Méganne Perry Mélançon n'était pas certaine d'accepter de chausser les souliers de Gaétan Lelièvre au départ. La politique était un «rêve discret» qu'elle entretenait à petit feu, en attendant de terminer ses études en administration à l'Université Laval et de prendre davantage d'expérience sur le marché du travail.

L'ex-député de Gaspé avait quitté le caucus du PQ en 2017 en raison d'allégations entourant ses liens avec la firme d'ingénierie Roche lorsqu'il était directeur général de la ville de Gaspé et a siégé comme indépendant.

Son ex-attachée politique reste prudente sur le sort de son ancien patron. Selon les gens du coin, dit-elle, toute cette affaire était une «tempête dans un verre d'eau» et il est «malheureux» que Gaétan Lelièvre ait terminé son mandat de la sorte.

Il a confirmé qu'il ne sollicitait pas un autre mandat en juin dernier. C'est à ce moment-là que Méganne Perry Mélançon a présenté sa candidature pour l'investiture. Elle l'a remporté haut la main contre l'ancien député bloquiste Yvan Bernier.

Les 10 députés élus du Parti québécois, dont le chef intérimaire Pascal Bérubé (au centre) et Méganne Perry Mélançon (complètement à droite).
La Presse canadienne
Les 10 députés élus du Parti québécois, dont le chef intérimaire Pascal Bérubé (au centre) et Méganne Perry Mélançon (complètement à droite).

«On était dus pour une jeune candidate», dit celle qui ne cache pas sa fierté d'être la première femme élue dans Gaspé.

Les défis ne manqueront pas dans la région, alors que les jeunes quittent et que la population se fait de plus en plus vieillissante. Le problème est tel que les épiceries et autres services de proximité ferment dans les villages, qui se vident de leur monde.

C'est sans compter le transport, rarissime et coûteux pour se rendre jusqu'à la pointe gaspésienne, déplore Méganne Perry Mélançon.

La jeune députée compte bien être l'une des porte-paroles de la jeunesse dans sa région et de donner le ton afin de convaincre d'autres jeunes de venir ou de revenir habiter en Gaspésie. Elle est elle-même dans le processus de déménager de Québec – où elle habitait pour les études – jusque dans son coin de pays.

Remettre le projet au goût du jour

Sa confirmation comme 10 députée du PQ a été perçue comme un «baume» sur les plaies des membres, qui ont connu la défaite la plus cinglante depuis la création du PQ, il y a maintenant 50 ans.

La nouvelle élue dans Gaspé continue cependant de dire que la population a voulu lancer un message clair aux libéraux en votant en bloc pour la Coalition avenir Québec.

«Les gens ne nous ont pas reniés, c'est plutôt un message lancé au Parti libéral. Les gens ont voulu sortir les libéraux et l'alternative possible dans leur tête, c'était [la CAQ]. Le monde a voté stratégique, mais le Parti québécois reste dans le cœur de bien des gens», analyse-t-elle.

Les nouvelles générations sont peu informées sur le projet de société qui a été piloté par notre cher René Lévesque.

Pour ce qui est du projet souverainiste, c'est une toute autre histoire. La jeune politicienne croit qu'«il va falloir travailler avec les autres formations souverainistes» et «remettre le projet de société au goût du jour», mais «sans perdre chacun notre identité comme parti».

«Les nouvelles générations sont peu informées sur le projet de société qui a été piloté par notre cher René Lévesque. Donc, de soulever les passions à nouveau, c'est un travail qui doit se faire autant avec les gens qui ont vécu cette époque-là que les gens qui, comme moi, n'ont pas connu les référendums de 1980 et de 1995.»

«Je pense qu'on a un gros, gros travail à faire, admet Méganne Perry Mélançon. On sait où on s'en va, mais les moyens qu'on va prendre pour y arriver restent à définir.»

Isabelle Charest (Brome-Missisquoi, CAQ)

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