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Une vidéo percutante de la SAAQ pour interpeller les piétons qui traversent n'importe où

Ça frappe, mais est-ce que le message passe?

Si elle voulait faire parler d'elle, la Société de l'assurance automobile du Québec (SAAQ) a réussi son coup avec sa dernière publicité pour sensibiliser les piétons aux bonnes pratiques de sécurité routière.

La vidéo, publiée sur Facebook lundi, a été vue plus de 184 000 fois et partagée par plus de 6800 personnes. Et il n'est pas difficile de comprendre pourquoi la vidéo est devenue virale. En deux mots: ça fesse!

Pour réaliser la vidéo, la SAAQ a transformé un abribus en une fausse machine à rayons x permettant aux passants de voir leur silhouette - ou plutôt leur squelette - s'animer devant leurs yeux. Après s'être amusés du trucage pendant quelques instants, les passants voient leur squelette être brutalement happé par un véhicule.

Les images sont évidemment troublantes, mais les effets sonores ajoutent au réalisme terrifiant de la pub.

Os contre acier. Les dommages sont incomparables.Publicité de la SAAQ

La vidéo fait partie d'une large campagne de sensibilisation de la SAAQ dans le cadre du Mois du piéton, qui a lieu chaque année en octobre. Selon la société, l'automne est une période particulièrement dangereuse pour les piétons, notamment en raison du manque de visibilité causé par la diminution du nombre d'heures d'ensoleillement.

En 2017, 69 piétons ont perdu la vie dans un accident de la route, tandis que 246 d'entre eux ont été gravement blessés et 2382 ont subi des blessures légères. La SAAQ estime que le tiers des accidents routiers se produisent à l'automne.

Efficaces, les pubs-chocs?

La publicité vise à décourager les piétons qui traversent ailleurs qu'aux intersections et aux passages piétons, soit la vaste majorité d'entre nous, selon un sondage publié en 2015.

Mais les milliers de personnes qui ont vu la publicité depuis lundi changeront-elles leur comportement pour autant? Rien n'est moins certain, selon Arnaud Granata, spécialiste du marketing et de la publicité.

«Non. On ne change pas les comportements uniquement avec de la publicité», admet d'entrée de jeu le journaliste, qui a réalisé il y a quelques années la série documentaire 30 secondes pour changer le monde, sur la publicité sociétale.

Le même constat avait d'ailleurs été fait par l'Organisation mondiale de la santé, qui concluait en 2004 dans un rapport qu'«à elles seules, les campagnes d'éducation et d'information du public ne produisent pas de résultats tangibles et durables en matière de réduction des accidents de la route graves ou mortels. [...] Ces campagnes se sont avérées très efficaces lorsqu'elles s'accompagnent de la mise en place d'un appareil législatif et répressif.»

Voyez aussi ces images terrifiantes partagées par la Société de transport de l'Outaouais:

Faire réagir

«L'idée d'un stunt comme celui-là, c'est de surprendre, de provoquer une discussion sur le sujet de la sécurité routière. Et je trouve que là-dessus, ils arrivent assez bien à le faire», estime M. Granata.

Quelques internautes qui commentaient la publication de la SAAQ ont critiqué la publicité, la trouvant trop «trop violente». Mais M. Granata rappelle que, lorsqu'il est question de sécurité routière, les concepteurs doivent redoubler d'imagination pour faire réagir, puisque le public voit de plus en plus d'images violentes au quotidien, notamment dans les oeuvres de fiction qui repoussent sans cesse les limites de ce qu'il est acceptable de montrer.

«Une publicité qui tente de nous choquer avec un accident violent, ce n'est plus suffisant. Il faut se sentir interpellé et, à mon avis, c'est ce qu'a voulu faire cette publicité-là: nous faire prendre conscience qu'on est au coeur du problème.»

Le spécialiste ne craint toutefois pas une surenchère de la violence dans les publicités sociétales au Québec, comme c'est le cas ailleurs dans le monde.

«En Australie par exemple, on est dans une surenchère de la violence. C'est une stratégie qui semble fonctionner pour eux», note-t-il. «Mais il est évident que ça fonctionne moins bien au Québec, donc il y a une autre ligne qui a été développée. La SAAQ ne fait pas dans la violence à tout prix.»

Les Irlandais sont aussi particulièrement réputés pour leurs campagnes de promotion de la sécurité routière, qui sont dignes des films Destination finale.

Voyez l'une de leurs premières publicités-chocs ci-dessous. Attention, les images sont choquantes.

Les publicités-chocs ont été utilisées à toutes les sauces - violence conjugale, tabagisme, prévention des incendies - depuis les années 1990. Et Arnaud Granata admet qu'il y a aujourd'hui une certaine «fatigue» face à ce genre de messages.

«Aujourd'hui, choquer pour attirer l'attention, ça ne fonctionne plus. Il faut que ça aie du sens», estime-t-il. «C'est sûr qu'en sécurité routière les dommages sont extrêmement graves donc on peut les exagérer. Dans le cas de certaines maladies, par exemple, je pense qu'il faut être extrêmement prudent dans la façon dont on équilibre la violence dans la publicité.»

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