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«L’homme de l’ombre» : premier roman policier historique pour Laurent Turcot

Après plusieurs livres de vulgarisation historique, Laurent Turcot prend pour la première fois la tangente de la fiction.
Laurent Turcot.
Julie Artacho
Laurent Turcot.

Au milieu de l'hiver 1770, un crime sanglant est commis, alors que les habitants de la Nouvelle-France vivent dans une période de grand flou juridique. Accusé par certains d'être l'auteur du meurtre, Pierre Dubois, un Français qui s'est établi depuis peu à Québec en espérant se fondre dans la masse, tente de prouver son innocence en menant sa propre enquête, aidé par un soldat irlandais et une prostituée vieillissante, qui a accès à l'envers des portes closes et aux confidences sur l'oreiller.

Après plusieurs livres de vulgarisation historique, Laurent Turcot prend pour la première fois la tangente de la fiction historique.

Quelle place occupait le projet d'un roman dans tes rêves?

L'une des histoires que je pratique est l'histoire de la sensibilité et de la vie quotidienne. J'essaie de faire l'archéologie de la manière de vivre à l'époque et la façon dont on la perçoit aujourd'hui. Et je pense que lorsqu'on provoque une émotion chez le lecteur, la distance entre les gens d'il y a 300 ans et ceux de nos jours est réduite.

Je suis obsédé par l'idée de faire comprendre aux gens que leur quotidien est l'équivalent de celui d'avant. D'ailleurs, quand j'ai obtenu mon poste de professeur d'histoire du 18e siècle canadien à l'Université du Québec à Trois-Rivières, en 2008, j'étais spécialiste de Paris au 18e, et je leur ai vendu mon truc en expliquant que je voulais faire l'histoire du Canada vue de Paris et de Londres. Ils ont aimé ça. Alors, je me suis mis à tout lire sur l'histoire canadienne du 18e. À un moment donné, je me suis dit qu'une manière ludique d'aborder la chose serait d'écrire un roman.

La création permet de délaisser le fait scientifique pour aller vers le fait vécu et ressenti. Les faits historiques deviennent alors accessoires.

As-tu débuté l'écriture il y a 10 ans?

En 2008, j'ai écrit 60 pages, mais je les ai mises de côté pour commencer à écrire des livres plus «sérieux». En 2017, on m'a approché pour voir si j'avais envie d'écrire un roman historique. J'ai envoyé mes 60 pages sans les relire. Mais lorsque j'ai décidé d'y jeter un œil, j'ai eu envie de finir le roman, avant même d'avoir la réaction de l'éditrice. Je lui ai envoyé la version achevée. Elle a accepté de publier. Et en janvier 2018, j'ai débuté l'écriture du deuxième tome, que j'ai terminé en août dernier.

Pourquoi un roman historique du genre policier?

Je voulais explorer le système judiciaire complexe de l'époque, et il n'y avait pas meilleur moyen qu'un meurtre pour faire ça. Puisque la Nouvelle-France était en plein mélange de régimes, c'est une période hyper intéressante : entre la Proclamation royale de 1763 et l'Acte de Québec de 1774, on ne savait pas trop ce qui se passait. Il y avait une présence britannique, l'élite française était encore là et les Canadiens ne savaient pas trop de quel bord aller. C'était un joyeux mélange dans lequel tout n'était pas clair.

Comment maintiens-tu l'équilibre entre le récit et les informations historiques?

Je ne veux pas que les lecteurs voient l'histoire avec un grand H, mais qu'ils se concentrent sur celle avec un petit h. Un peu comme dans mes cours à l'université : si j'insiste trop sur le contexte historique, sans faire de lien avec la vie de mes étudiants, il y a un problème.

J'utilise beaucoup la culture pop pour enseigner. Par exemple, je peux parler de néoplatonisme à l'époque de la renaissance en expliquant que selon cette théorie, quelqu'un qui a une belle âme va avoir un beau corps... un peu comme dans Occupation Double. Les étudiants partent à rire. J'ai accroché leur attention. Je leur donne alors plus d'explications et ils se souviennent du néoplatonisme grâce à ça.

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Pourquoi avoir mis en scène trois individus que tout pourrait éloigner?

Je voulais défaire l'idée selon laquelle les Canadiens-français sont toujours bons et qu'ils se sont faits oppresser, et contredire la théorie voulant que les Britanniques formaient un bloc monolithique. Il y avait aussi des Irlandais, des Écossais, des Galois, et ils n'étaient vraiment pas tous mauvais. Mon méchant est un Canadien-français, une grosse pute qui est prête à tout faire.

Au fond, la fiction est un autre moyen pour toi d'intéresser les gens à l'histoire. Un peu comme tu le fais avec ta chaîne YouTube, L'Histoire nous le dira.

Absolument! Mon but est d'essayer toutes les formes de transmission d'histoire. Je veux être un intermédiaire culturel et allumer la flamme chez les gens. Cela dit, je ne veux pas refaire 1000 fois la même affaire.

Déjà, sur ma chaîne, j'intègre de plus en plus de collaborateurs. J'ai coécrit la vidéo Féminazie avec Manal Drissi et j'ai récemment diffusé une vidéo sur Champlain expliqué par un enfant de neuf ans. Je veux prouver que tout le monde a quelque chose à apporter sur l'histoire.

Bientôt, je veux aussi tenter de faire du stand up sur scène, en testant du matériel pendant cinq minutes devant public. Sans m'obliger à raconter des blagues, je veux raconter des bouts d'histoires drôles et voir si ça fonctionne.

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