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Élections 2018: 8 enjeux numériques dont on devrait entendre davantage parler

La technologie devrait pourtant être un questionnement important au 21e siècle.
SeventyFour via Getty Images

Internet haute vitesse, cybersécurité, aide technologique, logiciels libres... Ces concepts résonnent peu chez les partis politiques, mis à part quelques promesses ponctuelles.

Le HuffPost Québec en a discuté avec des représentants de Crypto.Québec, un média numérique à but non-lucratif qui vise la promotion des enjeux technologiques, de même qu'avec Facil, organisme qui vise l'adoption du logiciel libre par les ministères québécois. Voici huit enjeux qui devraient attirer l'attention de l'électeur avant de faire son choix le 1er octobre prochain.

La mise sur pied de centres de données publics

Qu'est-ce qu'un centre de données? C'est un immeuble qui va accueillir une multitude de serveurs. Ces derniers vont héberger des tonnes de services. Fréquemment, ils appartiennent à Ericsson, Amazon, Google et autres gros joueurs de l'industrie. Au Québec, plusieurs centres de données appartiennent à Vidéotron. Les centres de données sont la base matérielle de l'internet.

Crypto.Québec croit que le Québec pourrait devenir une référence mondiale dans ce domaine. Les centres de données seraient créés pour fournir un service aux entreprises québécoises, selon la Stratégie numérique mise de l'avant par le gouvernement libéral, avant les élections. Par contre, la Stratégie est floue sur plusieurs aspects, dont la propriété des centres. «On ne parle pas beaucoup de cet enjeu de privatisation des infrastructures avec de l'argent public. Va-t-on établir ces centres de données publics pour ensuite les laisser au privé?», questionne Anne-Sophie Letellier, co-directrice des communications de Crypto.Québec, doctorante à l'UQÀM et coordonnatrice de l'École de sécurité numérique.

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Mme Letellier déplore également qu'on n'expose pas comment le public en tirera bénéfice à l'heure actuelle. Est-ce une simple location, ou un système de redevances? «On n'a pas de débat sur comment on gèrerait ces centres comme on le fait pour les ressources naturelles, par exemple.»

Les bénéfices d'avoir des centres de données au Québec ne seraient pas qu'économique. Ce serait aussi bon pour l'environnement, comme l'énergie utilisée serait propre, et permettrait un meilleur contrôle de la sécurité des données, plaide Mme Letellier.

Améliorer l'efficacité numérique des ministères

Il y a, en ce moment, autant de façons de procéder au niveau informatique qu'il peut y avoir d'organismes publics. En entrevue avec le HuffPost Québec, le conseiller en communication numérique de Crypto.Québec, Jean-Christophe Gaudet, indique que, par exemple, les procédures numériques peuvent être différentes entre chaque Centre intégré de santé et de services sociaux, en plus d'être différent de celui du ministère de la Santé, ce qui complique la lourdeur de la tâche des spécialistes en informatique du gouvernement.

«On pourrait créer des bureaux de communication numérique à l'intérieur des ministères et organismes. C'est-à-dire d'avoir des personnes en charge pour faire avancer les dossiers du numérique autant avec les gens des ressources humaines, les gens des technologies de l'information, la finance, les approvisionnements. Il y a une panoplie de choses à revoir, comme la façon dont on octroie des contrats à des organismes.»

Accès à Internet haute vitesse pour toute la population

Crypto.Québec croit qu'il est temps de briser l'oligarchie des compagnies de télécommunications, qui, selon l'organisme, veulent seulement investir quand ça leur est profitable, et qui offrent un service coûteux. «Ça rejoint beaucoup la proposition de Québec solidaire de créer Réseau Québec», admet Anne-Sophie Letellier.

Évidemment au Québec on paie des prix de fou, et comme on a un grand territoire, il y a beaucoup de régions qui ne sont pas desservies à haute vitesse et c'est extrêmement problématique. Anne-Sophie Letellier

Augmenter les ressources pour les PME québécoises en cybersécurité

Si le gouvernement a des problèmes vis-à-vis la sécurité informatique, c'est tout aussi le cas des PME. «Ce n'est pas quelque chose qui est vraiment mis de l'avant quand une PME a besoin de se bâtir un site web. Ils vont prendre les solutions qui existent, qui sont clé-en-main, comme Shopify», argue M. Gaudet.

«Même si une PME voulait assurer une meilleure sécurité, les ressources sont compliquées et difficiles à trouver. Il y a aussi un manque d'incitatifs», ajoute Mme Letellier, qui donne en exemple la loi sur la protection des données personnelles, qui régit plus sévèrement les services en ligne.

La sécurité informatique est souvent incompatible avec la recherche de profit, pense Jean-Christophe Gaudet. «Si on dit que la sécurité doit faire partie de vos priorités, et que ça se traduit par une augmentation de 5, 6 ou 7 fois le montant qu'on doit débourser pour de l'hébergement, par exemple, pour une organisation, dire qu'on va dépenser 15 000 $ par année plutôt que les 3 000 $ qu'on payait depuis les 10 dernières années, il y a un gros argumentaire qui doit être bâti pour justifier cette dépense-là.»

Récolter les taxes des produits et services sur Internet

C'est un enjeu que le Parti libéral s'est engagé à régler. Pour M. Gaudet, le monde numérique est inégal dans ce domaine. «Si on va sur Newegg, qui vend des produits informatiques, comme leur siège social est en Ontario, ils font seulement payer les taxes applicables dans cette province. Si t'achètes un produit là au lieu d'Amazon, tu peux sauver parfois 30 $. Quand on se rend compte que la province se prive de ces ressources-là, c'est un énorme enjeu.»

Cet argent pourrait ensuite être réinvesti dans les priorités numériques. «Je ne sais pas à quel point ça peut être réalisable législativement, mais on pourrait utiliser l'argent de ces taxes des produits culturels numériques et de la vente en ligne pour financer les infrastructures numériques», plaide-t-il.

Libérer et pérenniser la documentation publique de l'État

Le processus qui entoure la demande d'accès à l'information est compliqué et arriéré, juge Crypto.Québec. «Rendre cette documentation plus transparente fait partie d'un plan numérique qu'il faut parler et ça permet de tisser des liens entre différents enjeux politiques. Il faut que le gouvernement soit plus transparent pour empêcher la corruption, et ça, ça passe par la liberté de l'information sur une plateforme intuitive et qui rend des documents publics de facto», plaide Anne-Sophie Letellier.

Moderniser le cadre législatif des partis politiques pour protéger leurs bases de données

Les partis politiques, particulièrement en période électorale, tentent d'accumuler des données sur leurs sympathisants et les électeurs en général. «Il y a des personnes dans la rue qui ramassent les noms, les codes postaux, les adresses. Souvent, tout ça est géré par des bénévoles, ils n'ont pas de plan très clair pour sécuriser les données qu'ils vont ramasser. Donc, il faut établir des cadres plus sévères parce que sinon, on s'enligne vers des désastres.»

Il faut donc les obliger à avoir des serveurs d'hébergement sécuritaires et indépendants, pour éviter que ces données soient récupérées.

Utilisation du logiciel libre dans la fonction publique

L'organisme Facil travaille à implanter l'utilisation du logiciel libre dans la fonction publique. Un logiciel est considéré libre si ses utilisateurs ont la liberté d'exécuter, de copier, de distribuer, d'étudier, de modifier et d'améliorer le logiciel, ce qui n'est pas le cas pour, par exemple, la suite Microsoft Office.

Facil croit que l'adoption des logiciels libres permettrait de modifier les logiciels pour combler les besoins de la fonction publique sans payer de redevances à de multinationales pour leur utilisation, en plus de pouvoir les modifier pour les améliorer ou assurer la sécurité des données, explique le président, Mathieu Gauthier-Pilote.

À chaque élection depuis quelques années, Facil tente de faire signer son Pacte du logiciel libre par les différents candidats à l'élection. Jusqu'à maintenant, seul Québec solidaire, parmi les partis majeurs, s'est engagé à faire signer ses candidats d'ici le 1er octobre.

De plus, l'organisme présente une page Wiki qui présente sous forme de tableaux les engagements des différents partis dans le domaine numérique.

Correction: Jean-Christophe Gaudet avait d'abord indiqué que le siège social de Newegg était en Colombie-Britannique. Il est plutôt en Ontario. Nos excuses.

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