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Un garçon autiste de 12 ans pourrait se retrouver en CHSLD

«Gabriel n'a pas l'âge pour se retrouver avec des vieux qui se laissent mourir», déplore sa mère.
Gabriel Morneau est lourdement handicapé: autiste, épileptique, semi-paralysé et quasi-aveugle.
Courtoisie
Gabriel Morneau est lourdement handicapé: autiste, épileptique, semi-paralysé et quasi-aveugle.

EXCLUSIF - Un garçon autiste de 12 ans est menacé d'être «placé» dans un CHSLD, faute de ressources adaptées pour lui sur la Côte-Nord.

Sa mère, Isabelle, refuse catégoriquement. «Gabriel n'a pas l'âge pour se retrouver avec des vieux qui se laissent mourir, lance-t-elle avec véhémence lors d'une entrevue accordée au HuffPost Québec. Il a besoin d'être stimulé, de bouger, d'un terrain pour courir, d'une piscine pour se baigner. C'est un enfant, pas un vieillard.»

Le CIUSSS de la Côte-Nord reconnaît être dans une impasse. Ainsi, le CHSLD serait, du moins pour l'instant, le seul endroit susceptible de répondre aux besoins de Gabriel Morneau qui habite Les Escoumins, une localité située à 150 km de Baie-Comeau.

«On ne commentera pas le cas de ce garçon pour une question de confidentialité, mais sachez que sur la Côte-Nord, on n'a pas de ressources pour les multi-handicapés. On essaie de regarder des alternatives transitoires pour trouver une ressource mieux adaptée», mentionne Pascal Paradis du service des communications du CIUSSS de la Côte-Nord.

Gabriel est lourdement handicapé: autiste, épileptique, semi-paralysé, quasi-aveugle. Il était mort-né. «À sa naissance, la réanimation cardiaque a été nécessaire, mais il a subi deux AVC laissant de lourdes traces dans son cerveau», raconte la mère de famille qui avait toujours refusé de le «placer» jusqu'à récemment.

«Les médecins m'ont proposé de le débrancher à sa naissance, car ils m'ont dit qu'il aurait un grand retard mental et physique pour le reste de sa vie. J'ai dit non, car il s'est battu pour rester en vie, il mérite de vivre», livre Isabelle Poitras-Morneau, avec des trémolos dans la voix.

Isabelle Poitras-Morneau a constaté la détérioriation de l'état de Gabriel après deux récentes crises d'épilepsie.
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Isabelle Poitras-Morneau a constaté la détérioriation de l'état de Gabriel après deux récentes crises d'épilepsie.

Mère monoparentale de 31 ans, son psychologue aussi lui a fortement recommandé de penser à elle et de trouver un hébergement permanent à Gabriel ailleurs qu'à la maison. Gabriel a marché pour la première fois à l'âge de 4 ans. Il a demandé la toilette qu'à l'âge de 8 ans. Il a une main et un pied plus petit.

«Je ne placerai pas Gabriel. Jamais il ne sera séparé de moi. C'est définitif et point final», disait encore récemment celle qui est infirmière auxiliaire de profession.

45 minutes de perte de conscience

Sauf qu'il y a deux mois, Gabriel a eu deux dangereuses crises d'épilepsie. Chaque fois, il est demeuré inconscient pendant 45 minutes. «Il était parti vers un autre monde. Il n'avait plus de son ni d'image. J'ai eu très peur de le perdre», raconte la gorge nouée par l'émotion celle qui est également la mère d'une petite fille de 4 ans en pleine santé.

C'est au réveil de ces deux crises, l'une en juin et l'autre en juillet, qu'Isabelle a constaté la détérioriation de son petit «trésor». «Il ne voulait plus manger. Il ne marchait plus. Son corps était mou. Il n'était plus là».

Depuis qu'il est grand, c'est très difficile de le faire garder, voire impossible.Isabelle Poitras-Morneau

Après être demeurée près de lui pratiquement jour et nuit pendant plus de 12 ans, Isabelle Poitras-Morneau est épuisée, plus capable de subvenir seule aux nombreux besoins de son fils. «Quand il était petit je pouvais le faire garder par un parent, une amie ou même la garderie, mais depuis qu'il est grand, c'est très difficile de le faire garder, voire impossible.»

Gabriel Morneau
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Gabriel Morneau

Déjà troublée d'avoir l'impression «d'abandonner» son fils, elle ne veut rien savoir que Gabriel se retrouve dans un CHSLD.

«La dernière fois que je suis sortie de l'hôpital, on m'a obligé de signer un papier comme quoi je refusais un CHSLD. J'ai insisté pour une autre solution et on m'a répondu de le ramener avec moi à la maison.»

Une première au Québec?

La présidente de la Fédération québécoise de l'autisme, Lili Plourde, croit qu'il s'agit d'une première au Québec. «Je n'ai jamais vu un enfant si jeune être obligé d'aller en CHSLD. Je connais de jeunes adultes qui sont dans un CHSLD, mais pas des enfants, c'est terrible.»

Mme Plourde souligne que la triste histoire de Gabriel Morneau démontre aux gouvernements l'urgence d'agir. «Les résidences actuellement en place peuvent répondre à des cas de personnes handicapées, mais pour des cas trop lourds, les services ne sont pas adaptés. Il faut revoir les modèles résidentiels au Québec afin d'être capable d'accueillir des petits bonhommes ou des petites bonnes femmes comme Gabriel.»

La présidente pousse encore davantage sa réflexion en reprochant aux élus de décider de «placer» ou non en CHSLD selon les services requis. «C'est-à-dire que si une personne nécessite trop de soins, par exemple plus de 50 heures par semaine d'aide pour rester à domicile, elle sera transférée dans un CHSLD, peu importe son âge.»

Sans même se connaître, Lili Plourde et Isabelle Poitras-Morneau souhaitent toutes les deux que le cas de Gabriel obtienne une attention particulière des différents candidats présentement en campagne électorale afin de trouver une solution mieux adaptée qu'un CHSLD pour un garçon de 12 ans.

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