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«Les Barbelés»: Marie-Ève Milot libère la parole avant qu’il ne soit trop tard

La pièce sera jouée au Quat'Sous du 4 au 26 septembre 2018.
Courtoisie Théâtre Quat’Sous

Un an après avoir défendu les mots d'Annick Lefebvre au Théâtre de la Colline à Paris, la comédienne Marie-Ève Milot montera sur la scène du Quat'Sous, afin de personnifier une femme dont les mots doivent être expulsés avant que les barbelés n'envahissent sa gorge et sa bouche.

Tu as souvent porté la parole d'Annick Lefebre au théâtre. Qu'est-ce qui t'interpelle dans son travail?

Je trouve que dans son écriture, il y a toute la beauté et le tragique de l'humanité. J'aime qu'elle me surprenne à tout coup et qu'elle finisse elle-même par écrire autre chose que ce qu'elle voulait. Par exemple, la pièce J'accuse devait être un cabaret sur le travail qui est devenue une série de portraits de femmes. Son écriture est souvent beaucoup plus large que son désir initial.

Dans Les barbelés, les spectateurs vont rencontrer une femme qui laisse déborder les mots trop longtemps contenus. Sauront-ils pourquoi elle s'est retenue autant?

Le personnage se questionne sur l'espace de la parole et à quel point ses paroles ont eu un pouvoir ou non sur les autres, sur le cours de son histoire. Puisqu'elle a un enfant, elle s'interroge aussi sur la transmission via la parole. Et elle réalise que les barbelés poussent en elle lorsqu'elle choisit de garder certaines choses pour elle et lorsqu'elle s'exprime. C'est une question complexe.

Comment évoques-tu la progression des barbelés sur son corps?

J'ai toujours trois niveaux de jeu en même temps: la parole, les barbelés qui poussent et le fait que mon personnage s'accroche à un objet durant la pièce. Tout du long, je dois exécuter plusieurs tâches en même temps. J'ai travaillé sur le mouvement avec Anne Thériault, une chorégraphe et danseuse contemporaine. On veut évoquer un corps qui traverse une épreuve sur scène. C'est très intéressant, ce qu'on propose.

Ton personnage s'exprime sur quoi?

Sa parole est relativement fragmentée. Elle revisite des souvenirs qui surgissent malgré elle dans son esprit: des trucs reliés à la famille, au travail, aux amitiés et ce qu'on traverse comme humains dans nos parcours de vie. Face à chacun d'entre eux, elle se questionne. C'est à la fois dramatique, lumineux et léger, intime et politique.

Qu'est-ce que ça signifie pour toi de jouer seule sur scène?

Il y a quelque chose de l'ordre du marathon dans la livraison d'un spectacle solo. Ça exige qu'une grande force mentale soit activée pour aller au bout de la course. C'est vertigineux d'être la seule sur qui je me reposer, puisque je n'ai personne pour me donner la réplique, une intention ou une émotion. Mais au théâtre, même quand on est seul sur scène, ça demeure un art d'équipe. Quand je visualise le spectacle avant de le jouer, je replonge dans tous les choix artistiques qui ont été faits collectivement. Les interprètes ne sont pas uniquement en contact avec leurs partenaires de jeu, mais aussi avec l'espace, le son et la matière avec laquelle ils jouent.

Toi-même, tu t'exprimes de plus en plus artistiquement, en écrivant du théâtre et un essai. À quel besoin réponds-tu en prenant la plume?

J'ai envie de réfléchir à ma pratique, à la responsabilité artistique, à la présence et à la représentation des femmes. C'est un moteur pour moi. Je ne veux jamais arrêter de me questionner ni devenir confortable.

Mon écriture nourrit mon interprète et ma militance, et vice-versa. Tout est interrelié.

En mars 2019, la pièce que tu as écrite avec Marie-Claude Saint-Laurent, Guérilla de l'ordinaire, sera jouée à la salle Jean-Claude Germain du Théâtre d'Aujourd'hui. Que peux-tu révéler sur le projet?

C'est notre deuxième création en résidence, après Chiennes. Cette fois, l'intrigue tourne autour de la disparition d'une femme, durant une vigile à sa mémoire, qui rassemble plusieurs personnes qui ne se seraient probablement jamais rencontrées autrement. Pendant la vigile, on va avoir accès à des chroniques théâtrales sur différentes formes de violence faites aux femmes et aux personnes marginalisées.

En plus de revenir dans la 4 saison des Pays d'en haut à l'hiver 2019, les téléspectateurs vont te voir dans 5 rang, la nouvelle télésérie des auteurs Pierre Poirier et Sylvie Lussier (4 et 1/2, L'auberge du chien noir). Quel est ton personnage?

C'est une histoire de famille autour du personnage de Maude Guérin, qui est à la tête d'une ferme familiale. Je joue l'une de ses deux filles, qui habite à l'étranger pour terminer ses études. Tout le monde attend son retour, mais elle prend plus de temps que prévu pour revenir, et ça crée des tensions familiales. La série débute sur un événement tragique qui poussera mon personnage à rentrer chez elle un certain temps.

La pièce Les barbelés sera jouée au Quat'Sous du 4 au 26 septembre 2018. Cliquez ici pour plus de détails.

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