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La CAQ à Montréal, ça passe par Pointe-aux-Trembles

La mairesse Chantal Rouleau affronte la vedette péquiste Jean-Martin Aussant dans ce bastion du PQ.
Olivier Robichaud

Elle est populaire chez elle, il est connu partout. La mairesse de l'arrondissement Rivière-des-Prairies-Pointe-aux-Trembles affronte l'ex-mutin Jean-Martin Aussant, récemment revenu au bercail du Parti québécois. Sa victoire aux élections du 1er octobre marquerait l'histoire de la Coalition avenir Québec (CAQ), qui ferait une première percée sur l'île de Montréal.

Chantal Rouleau aime l'eau. En fait, elle ne cesse d'en parler. Le fleuve Saint-Laurent est même à la base de son engagement politique.

«J'ai travaillé longtemps pour la décontamination du Saint-Laurent, pour la protection du Saint-Laurent et pour la réappropriation du Saint-Laurent aussi. C'est ce qui m'a amené en politique», raconte-t-elle.

Mme Rouleau était d'ailleurs responsable de l'eau dans l'ancienne administration montréalaise de Denis Coderre. Et c'est l'eau qui l'a mise en contact avec François Legault, chef de la CAQ qui, en 2013, préparait son livre Cap sur un Québec gagnant — Le Projet Saint-Laurent.

Mais Mme Rouleau pourra-t-elle naviguer les eaux de Pointe-aux-Trembles pour que la CAQ débarque à Montréal? Jusqu'ici, la métropole a toujours boudé cette formation politique. Et Pointe-aux-Trembles est un bastion du Parti québécois (PQ).

Le champion de l'indépendance

Devant elle se dresse d'ailleurs Jean-Martin Aussant, indépendantiste pressé récemment revenu au PQ après avoir claqué la porte pour fonder Option nationale. M. Aussant espère se faire élire pour diriger le secrétariat sur l'indépendance qui serait créé par un éventuel gouvernement péquiste.

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«Ce qui m'a amené en politique, de tout temps, c'est la souveraineté du Québec. Dans mes discussions avec Jean-François Lisée, avant mon retour, je tenais à ce que les études sur les divers aspects de la souveraineté soient mises à jour. Que ce soit sur le plan économique, sur le plan social, le plan juridique, le plan environnemental, etc. C'est ce qu'on va faire avec le secrétariat qu'on va créer et dont j'aurai la charge», rappelle-t-il.

Son chef, Jean-François Lisée, a toutefois reporté à 2022 le débat sur l'indépendance du Québec. M. Aussant se défend de revenir à un parti qui ne parle pas suffisamment de cette question.

«Ça dépend de qui on parle quand on dit qu'on ne parle pas de souveraineté. Il y a des souverainistes qui en parlent, il y a même des adversaires qui en parlent pour essayer de faire peur. Par rapport à il y a quelques années, il y a des étapes précises qui sont identifiées [pour arriver à la souveraineté]», dit-il.

Tant M. Aussant que Mme Rouleau avancent qu'il est temps que l'Est de Montréal obtienne sa part du gâteau et que leur parti est celui qui livrera la marchandise. Le PQ a d'ailleurs fait une sortie en règle sur ce thème la semaine dernière, promettant «des milliards de dollars» pour l'Est.

Clientèle de choix pour la CAQ

Les sondages publiés récemment montrent une possible percée de la CAQ dans Pointe-aux-Trembles, ainsi que dans la circonscription voisine de Bourget. Que ce soit dans les projections du site Too Close to Call, diffusées dans Le Journal de Montréal, ou celles de l'agrégateur de sondages Qc125.com, la bataille paraît serrée entre M. Aussant et Mme Rouleau. Et cette dernière semble être en position de tête.

Pour Catherine Côté, professeure à l'École de politique appliquée de l'Université de Sherbrooke, une percée de la CAQ dans l'Est de Montréal ne serait pas du tout une surprise.

«Ça va dans le sens des gains qu'ils ont fait d'une élection à l'autre. Ils mènent une lente progression dans les banlieues de Montréal, c'est leur clientèle de base», dit-elle, soulignant que l'extrémité est de Montréal est une banlieue au même titre que Longueuil ou Laval.

«Et la stratégie de la CAQ, c'est d'aller chercher la clientèle du PQ», ajoute-t-elle.

Mme Côté souligne aussi une tendance dangereuse pour les «vieux partis»: les électeurs sont beaucoup moins fidèles qu'auparavant.

«Il y a un changement de valeurs dans toute la société. Les gens ne perçoivent pas les partis de la même façon, l'attachement au parti n'est plus le même», souligne-t-elle.

Les bastions d'autrefois ne tiennent donc plus nécessairement. Le Pointe-aux-Trembles de Nicole Léger, qui a tiré sa révérence après plus de 20 ans de service comme députée, pourrait bien décider qu'un bleu plus pâle lui convient tout autant que le bleu foncé.

M. Aussant affirme toutefois qu'il faut faire attention aux chiffres tirés de sondages nationaux.

«Un sondage local avec une méthodologie crédible, il n'y en a pas eu pour l'instant», lance-t-il.

Des «amoureux du pouvoir»

Mme Rouleau traîne toutefois une petite controverse, puisqu'elle a été réélue comme mairesse d'arrondissement il y a moins d'un an et elle continue de siéger pendant les élections. Le HuffPost Québec a relevé l'inconfort soulevé par cette position au sein de son parti municipal lorsqu'elle a refusé de se prononcer sur le Grand Déblocage, un vaste chantier de mobilité proposé par le PQ. Quelques mois plus tard, elle appuyait un plan semblable proposé par la CAQ, pourtant moins généreux pour l'Est de Montréal.

«Ce n'est pas normal qu'une mairesse, qui devrait s'occuper du bien-être de tous ses citoyens, ne parle qu'à un seul parti par partisannerie», lance M. Aussant.

Mme Rouleau réplique que c'est la mairesse suppléante qui prend sa place dans toutes ses fonctions officielles.

Chez Québec solidaire (QS), la candidate Céline Pereira estime toutefois que M. Aussant n'est pas en meilleure posture que sa rivale caquiste.

Olivier Robichaud

«Avec la candidate de la CAQ qui joue sur deux tableaux et le candidat du PQ qui a fondé son parti et qui est parti vivre à Londres ensuite... pour moi ce sont des exemples assez parfaits de personnes qui sont amoureux du pouvoir», dit-elle.

Mme Pereira mène un combat de négligée pour Québec solidaire. Loin de la clientèle habituelle de son parti, dans le centre de Montréal, elle tente néanmoins de faire sa place en parlant de certains enjeux locaux.

«Je parle aux gens du fait que Pointe-aux-Trembles est un désert alimentaire. Je propose de créer des jardins collectifs à la grandeur de Pointe-aux-Trembles», avance-t-elle à titre d'exemple.

Le candidat libéral Éric Ouellette abonde dans le même sens.

«Comme citoyen de Pointe-aux-Trembles, je trouve ça un peu plate de voir cette décision de ne pas faire complètement son mandat [de mairesse]. Les gens sont un peu cyniques de la politique et des comportements comme ça, ça n'aide pas», dit-il.

M. Ouellette souligne que rien n'est joué, dans Pointe-aux-Trembles comme ailleurs, puisqu'un électeur sur deux pourrait changer d'idée. Un phénomène particulièrement présent chez les caquistes.

Courtoisie - Parti libéral du Québec
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