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Aux États-Unis, un bébé d'un an sans ses parents devant le juge de l'immigration

Le juge s'est dit «gêné» de lui demander s'il comprenait les procédures juridiques.
Des enfants jouant dans un centre de jour pour migrants au Texas, en février 2018.
John Moore via Getty Images
Des enfants jouant dans un centre de jour pour migrants au Texas, en février 2018.

Surréaliste. Alors que la justice américaine tente désormais de réunir les familles d'immigrés qu'elle a séparées sous le décret anti-immigration "tolérance Zéro" de Donald Trump, des témoignages circulent sur des enfants présentés seuls face au juge afin d'être renvoyés dans leur pays d'origine. Dernière situation invraisemblable en date: celle d'un enfant d'un an, présenté face à la cour d'Arizona, en pleurs et sans ses parents.

À la cour, le bébé appelé Johan et originaire d'Honduras a "bu une bouteille de lait", "joué avec une petite balle" mais aussi "pleuré de façon hystérique, relate l'Associated Press ce dimanche 8 juillet. Face au juge, le bébé était accompagné d'un avocat - ce qui en fait l'un des enfants les plus "chanceux", parmi les centaines de cas similaires, car il est rare que ces derniers puissent bénéficier d'une aide juridique. Il a tout de même reçu un "ordre de départ volontaire" afin que le gouvernement le ramène au Honduras où son père avait déjà été renvoyé. Il avait été séparé de son père à la frontière américaine en vertu de la politique d'immigration de Donald Trump.

Le juge en charge de l'audition a avoué avoir été "gêné" de demander à Johan s'il comprenait les procédures juridiques dont il faisait l'objet. "Je ne sais pas à qui vous pourriez les expliquer, à moins que vous pensiez qu'un enfant d'un an pourrait apprendre la loi sur l'immigration" a simplement rétorqué l'avocat du bébé.

Les défenseurs de l'immigration se sont plaints de l'ambiance des tribunaux vis à vis des enfants, les qualifiant de stressants et effrayants. Il n'y a aucun logement pour les enfants, dont beaucoup ne peuvent même pas voir au-dessus des tables de défense sans réhausseur.

"Il n'y a pas de siège d'appoint ... pas d'ours en peluche. C'est un tribunal d'immigration froid, et ces enfants sont assis sur des chaises qui sont trop grandes pour eux; leurs pieds ne touchent même pas le sol", a expliqué l'avocat de l'immigration Lindsay Toczlowski sur CNN.

Plus de 2300 enfants séparés de leur famille

Plus de 2300 enfants, dont environ 100 de moins de cinq ans, avaient été séparés de leur famille en quelques semaines et hébergés dans des centres d'accueil gérés par le ministère de la Santé (HHS). Plusieurs centaines d'entre eux ont déjà retrouvé leurs parents mais le gouvernement peine à tenir le rythme. Le HHS a admis jeudi devoir recourir à des tests ADN et à des procédures accélérées pour identifier les enfants et leurs parents.

"Le juge a dit clairement qu'il n'allait pas laisser l'administration Trump traîner des pieds pour réunir les enfants avec leurs parents", s'est félicité Lee Gelernt, directeur adjoint du projet sur les droits des migrants d'ACLU, l'organisation de défense des droits civiques à l'origine de l'injonction contre la police de l'immigration (ICE). D'après un responsable gouvernemental, le juge n'a toutefois pas formellement exclu de rallonger un peu ce délai, et une autre audience aura lieu ce lundi.

Loren Elliott / Reuters

Au total, quelque 11 800 mineurs migrants sont actuellement retenus par les autorités américaines après avoir franchi illégalement la frontière, mais 80% d'entre eux sont des adolescents arrivés seuls.

Dans sa requête à la cour de San Diego, le ministère de la Justice (DOJ) assurait que le HHS "travaille d'arrache-pied pour réduire le fardeau de la confirmation de parenté et accélérer les vérifications par ADN". "Dans certains cas, toutefois", affirme le DOJ, "cette procédure n'est pas concluante pour établir une parenté et l'étude de documents disponibles peut être nécessaire". Cette procédure peut aussi prendre du temps si les parents ont été libérés des centres de rétention. "Dans ces cas-là, il pourrait être plus difficile de réunir certaines familles dans les délais de la cour", arguait le ministère.

Le ministère de la Justice demandait également à la cour de supprimer un paragraphe de la décision du 26 juin, qui interdit la détention de migrants sans leurs enfants car il pourrait être interprété comme une demande de libération des parents qui n'auraient pas retrouvé leurs enfants passé le délai.

Face au tollé créé par les images de jeunes enfants en pleurs, le président Donald Trump avait mis fin par décret le 20 juin aux séparations. Il appelle maintenant le Congrès à réformer les lois sur l'immigration.

Ce texte a été publié originalement dans le HuffPost France.

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