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«SLĀV»: une pièce de qualité malgré la controverse au Festival de Jazz 2018

Si l’œuvre aurait pu bénéficier d’une plus grande participation d’Afro-descendants, elle est néanmoins intéressante.

C'est sur un fond de controverse qu'était présentée mercredi la première médiatique de SLĀV, la nouvelle collaboration entre le metteur en scène Robert Lepage, la chanteuse Betty Bonifassi et la compagnie multidisciplinaire Ex Machina.

S'il n'y avait pas comme la veille des manifestations devant le Théâtre du Nouveau Monde, où était présentée la pièce, Slav continuait tout de même à faire parler d'elle sur les réseaux sociaux.

C'est que le projet, qui s'intéresse notamment aux chants d'esclaves afro-américains, a été réalisé avec l'apport de très peu de membres de cette communauté et est taxé d'appropriation culturelle.

Des six choristes accompagnant Betty Bonifassi, deux sont Noires, tandis que les créateurs du spectacle sont Blancs.

En dépit de cette controverse, SLĀV constitue toutefois un visionnement intéressant, alors que la mise en scène et les arrangements vocaux sont particulièrement réussis.

Un bond dans le passé

SLĀV débute alors que Betty Bonifassi, dans un monologue qui se perpétuera à quelques moments clés de la soirée, relate les origines du mot «slave» (esclave), qui remontent à une région s'apparentant à la Croatie actuelle.

Après cette introduction, les chanteuses, grimées en esclaves afro-américaines, entament une complainte datant de l'époque.

SLĀV propose en parallèle l'histoire de Kattia, une Noire québécoise qui entame un voyage aux États-Unis et des chansons d'esclave datant d'époques variées. Ce ne sont pas que les chansons issues d'esclaves afro-américains qui sont à l'honneur, alors qu'une chanson irlandaise est également présentée. Un court segment portant sur la relation entre l'Irlande et l'esclavage est d'ailleurs présenté à cette occasion.

Une mise en scène soignée

Les interludes musicales sont intercalées dans le récit de façon chronologique, alors qu'on met successivement en scène des esclaves qui travaillaient dans les champs, d'autres qui se sont affairés à construire les voies ferrées pour enfin conclure avec un chant d'espoir mettant en vedette des ouvrières travaillant dans une usine de vêtement contemporaine.

«SLĀV»

Le décor et les costumes évoluent au gré des chansons, la mise en scène comptant sur plusieurs éléments visuels amovibles. Des projections sont également diffusées sur un écran à l'arrière de la scène. On a par exemple droit à des images d'archives, aux paroles (étrangement projetées de façon intermittente) des chansons et à des images des interprètes captées en temps réel par une caméra.

Les chansons sont quant à elle particulièrement puissantes, les chœurs omniprésents chantés par les artistes étant par moment saisissants. Le fait que certains chants soient entonnés a cappella ou avec seulement un instrument ajoute au spectacle.

«Juger après avoir assisté au spectacle»

Les trois créateurs principaux de SLĀV, Robert Lepage, Betty Bonifassi et Ex Machina se sont défendus des accusations d'appropriation culturelle lancées contre eux et ont suggéré à leurs détracteurs de «juger après avoir assisté au spectacle».

«Le métissage dans toute sa fécondité artistique et culturelle est au cœur de SLĀV, tout autant que l'esclavage. Avons-nous le droit de toucher à ces sujets ? Le public en jugera après avoir assisté au spectacle», ont-ils déclaré sur Facebook, via le compte d'Ex Machina.

«De notre point de vue, nous avons surtout, blancs ou noirs, un devoir, celui d'aborder les épisodes les plus sombres de l'histoire pour tenter d'en tirer un peu de lumière.»

Si l'œuvre aurait pu bénéficier d'une plus grande participation d'Afro-descendants, il n'en demeure pas moins qu'elle propose un spectacle visuellement et musicalement intéressant.

SLĀV sera présentée au Théâtre du Nouveau Monde du 26 juin au 14 juillet dans le cadre du Festival de Jazz de Montréal. Les billets pour la pièce d'une heure et demie sont disponibles à partir de 60,50 $.

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