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Formule E: Denis Coderre n'a pas respecté les règles, selon l'inspecteur général de Montréal

Les services juridiques auraient averti l'ancien maire de l'illégalité de ses manoeuvres.
Handout via Getty Images

L'ex-maire de Montréal Denis Coderre aurait bafoué les règles d'octroi de contrats et ignoré les mises en garde de son propre service juridique lors de l'organisation de la course de Formule E, selon un rapport dévoilé lundi par le Bureau de l'inspecteur général (BIG).

Le rapport souligne l'importance du rôle pris par le cabinet du maire Coderre. Bien que la Ville de Montréal ait créé un organisme sans but lucratif, Montréal c'est électrique (MCÉ), pour présenter la course de Formule E, l'ensemble des décisions importantes auraient été prises par l'entourage de M. Coderre. Cela va autant pour la nomination du directeur général de MCÉ que pour les demandes de subventions et la négociation du contrat de promotion avec l'entreprise evenko, qui a finalement fait l'essentiel du travail sur le terrain.

«Malgré les avis d'un membre du Service des affaires juridiques de la Ville, le cabinet du maire n'a pas alloué l'indépendance requise à l'OBNL qu'il venait de créer. L'enquête démontre tout le contraire en ce sens que le cabinet du maire, a gardé un contrôle sur les décisions de MCÉ», lit-on dans le rapport.

Le BIG souligne qu'une municipalité a le droit de créer une OBNL pour présenter un événement. Cet OBNL doit toutefois fonctionner indépendamment de la Ville et son mandat doit être plus large que la seule présentation dudit événement.

L'inspecteur général Denis Gallant recommande que la Ville lance un appel de propositions la prochaine fois qu'elle souhaite attirer un événement comme le Grand Prix de Formule E. Il recommande également que les employés de la Ville et l'organisme Tourisme Montréal soient consultés «afin que la Ville puisse bénéficier de leur expertise, indépendance et impartialité, notamment dans le respect du cadre légal».

À cela s'ajouteraient potentiellement 6,3 M$ pour des droits de course impayés par MCÉ pour l'année 2017. MCÉ est aujourd'hui en faillite et tout semble indiquer que la Ville se retrouvera à payer ses dettes.

Coquille vide entre la Ville et evenko

La création de MCÉ est survenue après l'échec de négociations directes avec evenko, qui ne souhaitait pas présenter l'événement parce qu'elle envisageait des déficits de 11 M$ à 30 M$ pour chaque édition de la Formule E. À titre d'entreprise privée, evenko ne pouvait bénéficier des subventions provinciales et fédérales.

Le BIG confirme donc ce que plusieurs suggéraient déjà: MCÉ n'était qu'une coquille vide pour éviter les règles d'octroi de contrats.

«L'inspecteur général conclut que l'OBNL Montréal, c'est électrique a été utilisé afin de contourner les règles d'octroi de contrats prévu par la loi. Le cabinet du maire de Montréal a ignoré les avertissements et les recommandations [des services juridiques] et MCE n'était finalement qu'une courroie de transmission entre la Ville de Montréal et Evenko».

Evenko a réagi par voie de communiqué lundi. Elle affirme avoir collaboré avec le BIG.

«Nous avons cru dès le départ que ce projet était risqué financièrement, mais la Ville de Montréal et le maire de Montréal avaient partagé avec nous une vision à long terme. [...] Nous avons choisi de participer au processus sachant que parfois, il est nécessaire d'investir pendant quelques années afin de réussir de tels grands projets. À ce stade-ci, nous comprenons et respectons le choix de la nouvelle administration de Montréal de ne pas poursuivre l'événement pour les années à venir», lit-on dans le communiqué.

L'entreprise souligne qu'elle n'a pas été entièrement payée par MCÉ pour les services rendus. Elle fait partie des créanciers qui espèrent obtenir un paiement dans le cadre du processus de faillite.

La mairesse en colère

Valérie Plante, qui a délogé M. Coderre en novembre, a troqué son sourire habituel pour fustiger son prédécesseur. Elle a aussi tenté d'impliquer les élus actuels d'Ensemble Montréal, nouveau nom d'Équipe Denis Coderre.

«Clairement, Denis Coderre, son cabinet, son comité exécutif ont décidé de fermer les yeux et de laisser tomber les pouvoirs qu'on leur donne [...]. Ils ont carrément décidé de contourner les lois pour arriver à leurs fins. C'est grave», a lancé Mme Plante.

«La seule bonne nouvelle, c'est qu'ils ne peuvent plus prendre ces décisions. Ce ne sont plus eux qui gèrent l'argent des Montréalais», a-t-elle ajouté.

Rappelons que l'organisme qui organise le circuit de Formule E, Formula E Operations (FEO) tient la Ville de Montréal responsable des millions de dollars perdus en droits de course non payés pour l'édition 2017 et en droits de course à venir pour 2018 et 2019. La Ville pourrait donc être tenue de payer presque 16 M$ si elle perd une poursuite judiciaire.

Mme Plante s'est dite «préoccupée» de l'effet du rapport du BIG sur une éventuelle poursuite. Elle est en discussion avec les services juridiques.

Elle songe aussi à d'éventuels recours contre M. Coderre et les élus d'Ensemble Montréal.

Le chef intérimaire d'Ensemble Montréal, Lionel Perez, estime que la mairesse fait un amalgame indu. Selon lui, les membres du comité exécutif n'étaient informés ni de l'ampleur du rôle pris par le cabinet de M. Coderre, ni des avis négatifs émis par les services juridiques.

Le HuffPost Québec n'a pas été en mesure de joindre M. Coderre. En entrevue à TVA, il rejette les conclusions du BIG.

«Je suis en désaccord avec l'interprétation qui dit que ce n'était qu'une courroie de transmission. Pour moi, au contraire, c'était un organisme qui servait à faire de la promotion [de l'électrification des transports], mais on a tiré la plogue après six mois», dit-il.

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