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Les pompiers n'auront pas de quotas d'embauches pour les femmes et les minorités

Le Service de sécurité incendie veut tripler le nombre de femmes, d'Autochtones et de minorités visibles d'ici 2025.
Susan Chiang

La Ville ferme la porte à l'imposition de quotas d'embauche pour augmenter la représentation des femmes, des Autochtones et des minorités visibles au Service de sécurité incendie de Montréal (SIM). Les écoles de pompiers ne fournissent tout simplement pas suffisamment d'étudiants de ces groupes.

À travers le Québec, le métier de pompier demeure largement blanc, masculin et francophone. À Montréal, où 30% de la population s'identifie à une minorité visible, c'est le cas de seulement 1% des pompiers, soit 24 individus dans une force opérationnelle de 2360 personnes. Les femmes forment 1,2% de ce groupe et les Autochtones, 0,2%.

Le SIM est le service le plus blanc, le plus masculin et le plus francophone de la Ville de Montréal.

Mardi, le SIM présentait aux élus son plan pour diversifier ses effectifs. Il souhaite tripler le nombre d'employés issus des groupes sous-représentés pour qu'ils atteignent 7% de la main-d'oeuvre d'ici 2025. Cela représente environ 120 embauches. Le conseiller d'opposition Abdelhaq Sari a demandé s'il serait possible d'avoir «un minimum de femmes ou de minorités visibles par cohorte d'embauche» afin d'atteindre ce résultat.

«On est toujours soumis à notre processus de sélection. Il faut être équitable envers tout le monde, donc c'est le même processus», affirme Suzanne Desjardins, conseillère stratégique en climat de travail au SIM.

Celle-ci ajoute toutefois que des mesures préférentielles peuvent s'appliquer entre deux candidats qui obtiennent les mêmes résultats.

Les futurs pompiers sont aussi très blancs

Selon l'administration Plante, le SIM est aussi tributaire du nombre de personnes qui s'inscrivent au DEP à l'Institut de protection contre les incendies du Québec (IPIQ), puis au DEC en prévention des incendies.

«Il faut qu'ils soient formés. Donc on a beau établir un quota, s'il n'y a pas assez de gens formés pour le remplir, ça ne voudra rien dire. C'est une idée bien intentionnée, mais elle ne m'apparaît pas pratique dans la réalité du SIM», affirme le conseiller municipal Alex Norris, président de la Commission de la sécurité publique.

M. Sari a ensuite précisé sa pensée, disant que ce pourrait être une autre piste de solution si le plan avancé par le SIM ne donne pas les résultats escomptés.

Fo Niemi, directeur du Centre de recherche-action sur les relations raciales (CRARR), estime que les quotas sont une mauvaise idée.

«Il faut toujours éviter les quotas parce que c'est très rigide. Ça peut créer beaucoup de controverse et de divisions qui ne sont pas nécessaires. Je pense qu'il faut avoir un bon plan d'équité en matière d'emploi», affirme-t-il.

Le plan présenté par le SIM comprend une participation aux salons de l'emploi et de l'immigration, ainsi que des partenariats avec l'IPIQ et le cégep Montmorency. Selon le document, ces deux institutions auraient d'ailleurs noté une forte augmentation du nombre de femmes et de minorités visibles lors de leurs journées portes ouvertes.

En mars dernier, lors de l'accueil de la dernière cohorte de pompiers, près du quart des recrues provenaient d'un des trois groupes sous-représentés. Une première pour le SIM.

Revoir les tests physiques

Selon le SIM, les différents examens que doivent passer les candidats sont constamment revus pour déceler des biais envers certains groupes. Même les tests physiques pourraient être modifiés afin de favoriser l'embauche des femmes.

«Une des choses que nous vérifions, c'est si le test reflète bien la réalité du terrain. On doit s'assurer que les exigences physiques et psychologiques reflètent ce qui est nécessaire pour un pompier aujourd'hui», affirme le directeur adjoint du SIM, Richard Liebmann.

«Le métier tend à se transformer. Si on recule de 10, 15 ou 25 ans, le métier était beaucoup plus physique. Il y avait beaucoup plus d'incendies avec un équipement beaucoup plus lourd. Quand j'ai commencé comme pompier, l'appareil respiratoire que je portais était en acier et il était extrêmement lourd. Aujourd'hui, c'est de la fibre de carbone», illustre le chef du service, Bruno Lachance.

Selon Mme Desjardins, le test physique est le principal obstacle des femmes.

«Systématiquement, les femmes ne le passent presque jamais. Même les femmes qui sont très, très en forme», dit-elle.

D'ailleurs, le SIM effectue des projections d'embauche en fonction des admissions et de la diplomation des écoles de pompiers. Selon Mme Desjardins, les perspectives seraient bonnes pour les minorités visibles, mais Montréal ne triplera vraisemblablement pas le nombre de pompières ni le nombre de pompiers autochtones.

Selon M. Liebmann, augmenter la diversité au sein des services de sécurité incendie du Québec pourrait prendre plus de temps que dans d'autres métiers ou professions, puisque le taux de roulement y est particulièrement faible.

Pas de demandes d'accommodements

Questionnée sur la possibilité d'accorder des accommodements pour des vêtements religieux, Mme Desjardins affirme que le sujet ne s'est jamais posé au SIM. Elle ne ferme toutefois pas la porte à permettre le port du turban ou du hijab, si la santé et la sécurité peuvent être assurées.

«Nous devons prendre en considération les accommodements avec les questions de santé et sécurité. Mais ce n'est pas un non au départ», dit-elle.

Au début du mois, le conseiller municipal Marvin Rotrand a lancé un pavé dans la mare en demandant que le Service de police de la Ville de Montréal permette le port du hijab ou du turban. Le débat s'est rendu jusqu'à l'Assemblée nationale, où les chefs du Parti québécois et de la Coalition Avenir Québec se sont opposés à cette idée.

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