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Steve Rasier, ex-gérant de Rachid Badouri, s’explique à «Tout le monde en parle»

Rasier a défendu l’institution pour laquelle il officie et qui est l’objet de vives controverses depuis une semaine.
Karine Dufour/Radio-Canada

«Représentant ministériel et pasteur de vocation au sein de l'église Parole qui libère, un centre apostolique chrétien d'environ 450 fidèles qui existe depuis une vingtaine d'années à Saint-Léonard». Voilà comment Guy A. Lepage a présenté son premier invité de la soirée, Steve Rasier, à Tout le monde en parle, dimanche.

Désormais ex-gérant de Rachid Badouri (il a démissionné de cette fonction lundi dernier après des révélations du Journal de Montréalmettant l'église Parole qui libère dans l'eau chaude), Rasier a défendu l'institution pour laquelle il officie et qui est l'objet de vives controverses depuis une semaine.

À ceux et celles qui lui ont posé la question sur Twitter pendant la diffusion de Tout le monde en parle, Guy A. Lepage a précisé que le journaliste à l'origine de l'enquête, Camille Garnier, avait été invité à l'émission, mais que la direction du Journal de Montréal avait refusé que celui-ci n'y participe. Voilà pourquoi Steve Rasier était seul à expliquer son point de vue et n'avait personne pour le contredire ou le relancer.

L'homme dit avoir «très mal» réagi face au reportage du Journal de Montréal dénonçant les pratiques de l'église Parole qui libère (PQL).

«Moi, personnellement, ça fait 17 ans que j'œuvre dans l'église de la Parole qui libère. Je connais notre éthique, je connais notre transparence au niveau des finances. Nous sommes une église chrétienne qui se tient sur des valeurs chrétiennes. Ce sont des allégations qui étaient très fortes et violentes.»

Steve Rasier soutient que ce ne sont pas 450, mais plutôt des milliers de personnes, qui ont pris part aux activités de PQL au fil des ans. Il va jusqu'à affirmer que les allégations citées dans le Journal de Montréal et le Journal de Québec sont fausses.

«De savoir également, que c'étaient des personnes anonymes, avec tous les milliers de personnes, qui avaient toutes des bons témoignages, on n'a pas pu les entendre, c'est sûr que c'était très difficile pour nous de le vivre», a ajouté Steve Rasier.

Offrandes volontaires

Quant aux obligations financières auxquelles seraient soumis les membres de PQL – verser l'intégralité de leur premier salaire de l'année à la communauté, ainsi que 10% de leurs revenus -, Steve Rasier les nie.

«On n'impose rien, a-t-il martelé. Dans la conviction chrétienne, selon les saintes écritures, on ne peut pas imposer quelque chose à un chrétien. Ça doit être volontaire. Le principe des dîmes et des offrandes est volontaire. Maintenant, c'est un enseignement qu'on enseigne dans le cheminement chrétien. C'est gratuit, les services sont gratuits, mais le Journal a essayé de dépeindre qu'on demandait de l'argent en échange des miracles. Et ça, ça amène un gros problème à nos convictions chrétiennes. Parce que c'est volontaire. Il n'y a personne qui est imposé de donner.»

Même son de cloche de la part de Rasier au sujet des cotisations des membres de PQL qui auraient permis à Patrick Isaac, apôtre de l'église, et son épouse, de s'offrir de luxueux cadeaux, comme des Porsches et des Mercedes : la notion aurait été grossie par le Journal de Montréal, selon lui.

«Ce n'est pas le cas, encore une fois. En 20 ans de ministère, c'est arrivé une fois qu'on a offert une voiture à l'apôtre Isaac. Et le contexte est le suivant : on allait célébrer son anniversaire pour 2009, et on s'est mis quelques personnes ensemble, de l'assemblée, pour savoir quel genre de party on pourrait faire pour souligner son anniversaire. Il y en a un qui a dit : «Hé, ce serait cool de lui offrir une voiture» (...) Donc, on s'est lancés dans ce projet. Volontairement, les gens donnaient ce qu'ils voulaient. L'apôtre Isaac n'était pas au courant du tout du cadeau, ce n'était pas imposé. Et lorsque c'était le temps de son anniversaire, malheureusement, on n'avait pas atteint notre objectif, on a juste pu mettre un down payment(acompte) sur la voiture, et il était agréablement surpris de la chose.»

«Mais la façon dont le Journal l'a dépeint, c'est comme si on lance des voitures ici et là, sur son désir personnel, et quand il veut une voiture, les fidèles doivent le financer... Ça n'a rien à voir, c'est pas du tout dans la culture qu'on...»

Il serait également faux que PQL exige des «offrandes sacrificielles» pour l'accomplissement de miracles ou de faveurs divines. Les montants perçus par l'église serviraient en réalité à faire avancer l'œuvre, étant donné que l'organisation n'est pas subventionnée par le gouvernement. Rasier a dit ignorer si l'église PQL paie des impôts. Il a été ajouté en sous-titre, à Tout le monde en parle, dimanche, comme le Journal de Montréal le rapportait ce week-end, que PQL n'a pas de permis de culte lui permettant d'exploiter le bâtiment qu'elle occupe.

«Encore une fois, c'est faux, a plaidé Steve Rasier. On ne peut pas offrir quoi que ce soit en échange d'un miracle. Dieu n'a pas besoin d'argent pour bénir. Toutes ces allégations de toujours échanger argent contre miracles, est (sic) totalement erronées. Ça ne fait pas partie des saintes écritures. Dieu nous parle plutôt de donner selon ton cœur, selon les capacités que tu as...»

Dieu guérit

Alors que le Journal de Montréal maintient avoir mené ses recherches sur l'église Parole qui libère pendant trois mois, Steve Rasier, lui, réplique qu'on l'a approché deux jours avant la parution de l'article pour avoir son témoignage.

À Tout le monde en parle, il a dévoilé le salaire que se versent l'apôtre Patrick Isaac et son épouse : «Un salaire de professeur de cégep, un peu plus de 75 000$». «Ça, c'est pour être le pasteur responsable pour toutes les activités au sein de l'église», a spécifié Steve Rasier, qui dit pour sa part être bénévole.

Ce dernier dit croire à la guérison par l'imposition des mains, par le biais d'un «ministère de guérison» et par la prière, des éléments évoqués dans le Journal de Montréal. Lui-même aurait été l'artisan de guérisons, par l'apport de Dieu à travers lui, par la prière, d'une femme victime de problèmes lombaires, et d'une femme qui avait du mal à tomber enceinte.

«Elle a pu enfanter par la suite et maintenant elle est mère de deux enfants. On a les papiers médicaux et tout qui le prouvent. Dieu existe, et Dieu guérit encore en 2018, certainement.»

Selon Steve Rasier – qui parle «d'équipe» et non de «pyramide» pour définir la structure de PQL - Patrick Isaac aurait voulu aller s'exprimer à Tout le monde en parle, dimanche, mais des procédures judiciaires en cours de démarches l'ont dissuadé de se présenter. Lui-même fait face aux caméras de son propre chef, jure-t-il.

«On ne m'a pas envoyé, c'est moi qui est sorti. (...) On a dépeint une église chrétienne avec des valeurs chrétiennes, comme une secte, avec un gourou à la tête, qui recrute des personnalités connues, pour essayer de forcer les gens à donner de l'argent (...) Les allégations voulant qu'il y avait un motif à profit d'argent derrière ça, maintenant, ça venait à une atteinte de ma foi chrétienne», a dépeint Rasier.

À Guy A. Lepage qui est revenu à la charge sur le fait que l'enquête du Journal de Montréalétait sans doute rigoureuse et véridique, Steve Rasier a répété qu'il doute du sérieux de la démarche.

«Je suis le premier surpris. J'ai plusieurs témoignages, où des gens m'ont appelé pour me dire : «Fais attention, Steve, parce qu'ils m'ont demandé de dire quelque chose que je n'avais pas dit». Comme je dis, trois mois, on ne m'a jamais appelé. À ce jour, j'ai laissé trois messages sur la boîte vocale de Ève Lévesque (adjointe au directeur de l'information du Journal de Montréal, ndlr), et à ce jour, je n'ai pas reçu de retour d'appel. On ne m'a pas contacté. On n'a jamais contacté l'apôtre Isaac. Toute la procédure, le fait qu'on n'a pas retenu les témoignages positifs des milliers de personnes qui ont fréquenté l'église de la Parole qui libère, me laisse de lourds soupçons sur l'intérêt de l'enquête», s'est défendu Steve Rasier.

Rachid Badouri

Jusqu'à lundi dernier, Steve Rasier était, et depuis 13 ans, le gérant de Rachid Badouri. Il était également son grand ami, et Rasier a même célébré le mariage de l'humoriste. Rachid Badouri serait d'ailleurs dévasté par les récents événements. Steve Rasier craint-il de causer du tort à la carrière de son ancien partenaire professionnel?, a questionné Guy A. Lepage.

«C'est pour ça que j'ai rompu mes liens. Cette sortie du Journal de Montréal était majeure, comme je l'ai exprimée, pour moi avant tout. Je sortais dans les médias et j'exprimais mes convictions, et toute cette histoire-là l'associait, parce que j'étais son gérant. Chaque fois qu'on nommait mon nom, on disait : aussi gérant de Rachid Badouri.»

«Rachid n'a jamais parlé de sa foi en ondes ou dans les médias. Il a toujours dit qu'il croyait en Dieu, mais il n'a jamais fait notion de quelle église ou quelle mosquée il fréquenterait. Il a toujours été très respectueux de ma vocation pastorale et de mes convictions chrétiennes, mais là je sentais que ma sortie allait mettre de l'ombrage sur sa carrière. Avec tout l'excellent travail qu'il fait, qu'on a fait à travers toutes ces années, je n'étais pas prêt à, soit me taire pour continuer dans l'aspect de gérance, ou de parler et faire ombrage à sa carrière. Donc j'ai décidé d'y aller avec ma foi, défendre mes convictions, et de, malheureusement, rompre mes liens avec lui», a détaillé Steve Rasier.

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