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Itinérance: les refuges pour femmes manquent de ressources

La surpopulation semble bien moins criante du côté des hommes.
Shaun Best / Reuters

Les refuges pour femmes débordent en ces temps de froid polaire, alors que les ressources destinées aux hommes semblent moins sollicitées. Les intervenants s'expliquent mal ce déséquilibre.

Les matelas installés par terre sont monnaie courante à l'organisme La Rue des Femmes. Malgré ses dix lits supplémentaires (60 au total), les itinérantes qui y dorment sont en surnombre nuit après nuit.

«On déborde tout le temps. Au Chaînon, c'est toujours plein aussi», affirme la fondatrice de La Rue des Femmes, Léonie Couture.

Celle-ci doit même refuser des gens tellement les ressources sont étirées. Heureusement, ceux-ci peuvent utiliser une navette pour se rendre, par exemple, au pavillon Patricia-McKenzie de la Mission Old Brewery.

Matthew Pearce, président et directeur général de la Mission Old Brewery, souligne que ce pavillon doit également installer des matelas par terre. Mais il y a encore des possibilités d'accueil.

«Si elles sont refusées ailleurs, on peut les accueillir. On va s'occuper d'elles», dit-il.

Embellie chez les hommes?

Étrangement, M. Pearce remarque que son refuge pour hommes est loin d'être aussi fortement utilisé que le pavillon féminin, malgré les temps froids qui se sont installés depuis plus de deux semaines. Aucun matelas n'est installé sur le sol et quelques lits demeurent vides.

C'est la première fois que M. Pearce voit une telle situation.

«Dans le passé, on voyait des débordements extrêmes pour les hommes. Il y avait des soirs où on avait 80 hommes couchés dans la cafétéria et tous les 300 lits étaient remplis», note-t-il.

Le pdg s'explique mal ce phénomène. Il croit toutefois que les efforts déployés par la Mission Old Brewery et d'autres pour installer des itinérants dans des logements plus stables commencent à porter fruit.

Même son de cloche du côté de la Maison du Père et de la Mission Bon Accueil.

«Effectivement, je pense qu'on commence à avoir un impact sur la fréquentation des refuges. Les différents projets qui existent en matière de logement ont probablement un impact direct», affirme Nancy Tremblay, coordonnatrice du refuge de la Maison du Père.

«Il y a au moins 600 personnes en situation d'itinérance chronique ne sont plus là», ajoute Sam Watts de la Mission Bon Accueil.

Mme Tremblay ajoute toutefois que les débuts de mois sont généralement moins achalandés. Les chèques d'aide sociale, de pension ou d'autres sources commencent à entrer et plusieurs personnes en profitent pour dormir plus confortablement en louant une chambre pendant quelques nuits. Elle s'attend à se trouver à pleine capacité dès ce soir.

Pas aussi simple pour les femmes

Alice Lepetit, porte-parole du Réseau d'aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal (RAPSIM), confirme que le manque de ressources affecte beaucoup plus les refuges pour femmes que ceux pour les hommes, qui sont beaucoup plus gros.

Selon Léonie Couture, les logements pour itinérants sont moins facilement accessibles aux femmes. Celles-ci seraient moins souvent en situation d'itinérance chronique, jugée prioritaire. Elles accepteraient parfois de se faire loger par des hommes, sachant qu'elles se feraient probablement agressées sexuellement.

«J'ai hâte qu'on comprenne qu'il doit absolument y avoir des services pour tout le monde. Actuellement, ce n'est pas le cas», lance-t-elle.

L'organisme de Mme Couture offre 20 chambres aux femmes par le biais de la Maison Olga. C'est toutefois bien moins que les 300 unités de la Mission Old Brewery, par exemple.

Les efforts pour loger les itinérants, une approche souvent appelée «logement d'abord», serait aussi plus difficile à appliquer pour une clientèle féminine.

«Les ressources sont souvent calquées sur les besoins des hommes. [...] Avec les femmes, la solitude est très difficile dans les logements. Les hommes sortiront beaucoup plus de chez eux, alors que les femmes le font moins. Elles nécessitent plus de ressources même une fois qu'elles sont logées», dit-elle.

Manteaux, bottes et sous-vêtements

Outre les nuitées, d'autres besoins demeurent criants auprès de toute la population itinérante. L'Accueil Bonneau, un centre de jour, note que les vêtements chauds disparaissent rapidement.

«Le froid a un impact sur notre vestiaire. [...] On manque de bottes, on manque de manteaux chauds. Tous les jours, quelqu'un arrive mal vêtu. On ne peut pas le laisser partir comme ça. On a du stock mais ça part vite», indique André Leroux, chef d'équipe aux premières lignes de l'Accueil Bonneau.

La Mission Bon Accueil vient de lancer sa campagne «bas et bobettes». Sam Watts souligne que les itinérants passent souvent à travers une paire de bas par jour.

Avec le froid qui se prolonge, les besoins ne feront que s'accentuer. Selon Environnement Canada, le froid, la neige et le vent seront de retour samedi. La température commencera à grimper dimanche, lorsqu'on connaîtra un maximum de -13 degrés, mais la neige tombera presque toute la semaine. Des températures maximales plus saisonnières de -10 à -2 degrés arriveront à partir de lundi.

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