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Que souhaitent les humoristes au milieu de l’humour en 2018?

Après des mois de tumultes...

2017 fut une année charnière, au Québec comme ailleurs dans le monde. À lui seul, le mot-clic #MoiAussi a entraîné une vague de dénonciations sans précédent et fait éclater au grand jour des facettes sombres, jusque-là méconnues, de personnalités publiques ayant gravi les plus hauts sommets de la gloire.

Dans le petit monde du rire d'ici, la secousse sismique a été particulièrement puissante, avec les révélations concernant les inconduites alléguées de Gilbert Rozon, le père du Festival Juste pour rire, institution majeure de l'industrie culturelle s'il en est.

Dimanche, au 19 Gala les Olivier, on avait autant envie de festoyer avec les finalistes et les gagnants que de se désoler des témoignages qui ont récemment tapissé toutes les tribunes. Sur le tapis rouge qui précédait la cérémonie, nous avons demandé aux artistes ce qu'ils souhaitent au milieu de l'humour à l'aube de 2018, après ces mois de tumultes. Voici leurs réponses.

Pierre Hébert : «C'est correct. On a brassé des affaires importantes. Je me rappelle, il y a des gens qui me demandaient si on avait hâte qu'on arrête d'en parler, et moi je répondais : non. Ça fait des années qu'on n'en parle pas. Je pense qu'à un moment donné, il faut brasser, il faut aller au bout des affaires, il faut le faire une fois pour toutes, et tant mieux. (En 2018, je souhaite) l'authenticité de brasser les affaires quand ça brasse, de fêter quand ça fête, de parler des vraies affaires. L'authenticité, je pense que c'est ce qu'il y a de mieux dans notre milieu.»

Alexandre Barrette : «Il s'est passé des choses dans la société. C'a commencé, si je ne m'abuse, avec (Harvey) Weinstein, et après... On dit que c'est beaucoup l'humour, mais honnêtement, le courant #MoiAussi, j'ai vu plein d'ami(e)s, que je ne me serais jamais douté, qui ont écrit des témoignages, dans mille et un domaines et métiers. Ça m'a un peu perturbé de me dire : tabarouette, c'est ça, les gars? Les gars, c'est ça, de forcer des filles?

J'ai vu des textes qui m'ont touché. Moi, je le vois comme un phénomène de société, avant ce qui s'est passé en humour. J'ose espérer que ce n'est pas temporaire, qu'il y a un réel changement qui va s'opérer suite à tout ça, et que les gars vont comprendre... Moi, j'ai toujours ri de moi, parce que ça m'est arrivé de dire, dans des dates : «Je peux-tu t'embrasser?», et je me trouvais loser. En lisant tout ce qui s'est passé, on dirait que je suis fier, d'être le gars un peu chicken, finalement. En tout cas, j'ose espérer que, peu importe, l'humour ou dans tous les métiers, ça va être un changement de société qui va s'opérer, et qu'on va être dans une meilleure époque à ce niveau-là.»

Katherine Levac : «Il y a eu quand même ce qu'on pourrait appeler un petit wake up call de plus, cette année. J'espère que ça va se poursuivre, que ce n'est pas juste un petit feu de paille de prise de conscience, j'espère que ça va rester. Pas cette ambiance un peuweird, mais cette prise de conscience-là, j'espère que ça va persister. C'est ce que j'espère pour le restant de ma vie de créatrice en humour.»

Mathieu Cyr : «Un prompt rétablissement! Vraiment. Je trouve qu'il s'est bâti des belles choses en plus de 50 ans d'humour au Québec, et c'est de ça qu'il faut se rappeler. C'est ça qu'il faut se remémorer aujourd'hui. Il y a plein d'artistes qui ont super bien travaillé cette année, et j'ai hâte de voir les nominés, les gagnants, les gagnantes, et je souhaite bonne chance à tous!»

Julien Lacroix : «C'est un mélange du milieu de l'humour, du milieu (artistique) en général. Je trouve ça très motivant ce qui se passe, qu'on dénonce de plus en plus, un peu partout. On pourrait penser que ça mine un peu la soirée, mais non, au contraire, c'est beau, les gens parlent, le disent haut et fort... Je souhaite, à la limite que ça continue à dénoncer, que le ménage soit fait. Tassez-vous, les «tout croches»!»

Yves P.Pelletier : «Je souhaite qu'on règle tout. À un moment donné, il faut prendre le temps de bien tout régler, et de ne pas précipiter les choses. Moi, je suis persuadé que, quand tout va être réglé, il va y avoir des fleurs qui vont pousser de ça. Il va y avoir quelque chose de positif qui va sortir de tout ça.»

Yannick de Martino : «Je renvoie souvent ces questions vers les victimes. Je ne pense pas que je suis extrêmement concerné. J'ai de la misère à répondre à ce type de questionnement-là, puisque je n'ai été ni victime, ni témoin. Je pense que la parole doit nécessairement aller aux victimes, mais ma position est évidente, je suis du côté des victimes, évidemment. (En 2018), je souhaite que les gens continuent à rire, c'est ce qui fait en sorte que l'humour existe, le rire.»

Patrick Groulx : «Qu'on se réunisse, qu'on ait du plaisir, qu'on retrouve le plaisir, qu'on s'amuse dans ce qu'on fait. Il y a eu beaucoup de débats, il y a eu toutes sortes d'affaires ; on parlait de tsunami, à un moment donné, et c'est carrément ça. C'a bousculé beaucoup de vies, c'a dérangé beaucoup de monde, il y a eu beaucoup de problèmes collatéraux. Mais de se réunir et d'avoir du fun en 2018, c'est ce qu'on essaie de faire, en tout cas, et on va monter des shows super le fun

Mehdi Bousaidan : «Beaucoup de changements. Là, je pense qu'on est partis sur une belle lancée. J'espère juste que tout se concrétise, que toutes nos idées arrivent, que les gens prennent ça au sérieux et qu'on arrive au résultat qu'on espère. Parce que, là, on a commencé le changement, et il faut voir si tout le monde sera capable de garder ça. On a tous les ingrédients pour faire un gâteau ; est-ce que la pâte va prendre... C'est beaucoup d'allusions culinaires, c'est parce que j'ai très faim (rires). Mais je pense que c'est ça que je souhaite, que le changement aboutisse, qu'on atterrisse sur quelque chose, cette année.»

Martin Vachon : «Un peu plus de calme! Pour qu'on puisse se concentrer sur faire rire les gens, leur faire du bien, et arrêter de faire des vagues. En même temps, je pense que c'est un mal pour un bien. Il y a plein de belles choses qui sont sorties à travers ça. Je pense que le nouveau festival va amener quelque chose de différent aussi. J'ai hâte de voir ce qui va se passer pour la suite. Je nous souhaite de l'amour, du respect et beaucoup de rires!»

Jonathan Roberge : «Du monde qui ne tripote pas des gens! Je pense que c'est la moindre des choses. C'est assez simple, c'est juste ça qu'on demande. Si vous le faites, foutez le camp et laissez le milieu de l'humour tranquille, ça serait le fun qu'on puisse juste faire nos jobs de faire rire du monde, et non de les tripoter...»

Les gagnants du 19e Gala Les Olivier

Virginie Fortin : «En ce moment, on a l'impression qu'il est un peu fragmenté, le milieu de l'humour, mais je ne pense pas que ça soit si malsain, que le milieu de l'humour se «déshomogénéise», qu'il devienne un peu plus hétéroclite. On est quand même tous des individus qui faisons chacun notre métier. Notre métier est le même, mais nos propos et nos ambitions ne sont pas les mêmes. Je pense que c'est très sain, ce qui se passe en ce moment. Ce que je souhaite au milieu de l'humour, c'est juste de s'écouter, de se parler, de ne pas avoir peur de dire la vérité quand on est dans des situations qui nous déplaisent, et de ne pas se laisser avaler par des structures de pouvoir qui sont là depuis trop longtemps.»

François Bellefeuille : «L'automne a été difficile, mais le temps passe, il y a des actions qui ont été faites. On est dans l'attente, tout le monde, de ce qui va se passer exactement, plus tard. Je pense que les humoristes, on aime ça, quand il y a un malaise, on va en parler le plus rapidement possible. C'est nos réflexes. S'il y a un éléphant dans la pièce, c'est sûr qu'on va en parler. Donc, j'ai hâte de voir, je sais que le gala va en parler, je ne sais pas comment les remerciements vont se faire, tout le monde a probablement planifié sa petite affaire.

Mais, n'empêche, le milieu de l'humour en général va bien. On sent que le public québécois est présent dans les salles, est là. On a du plaisir. La qualité de l'humour n'arrête pas d'augmenter, il y a de plus en plus d'humoristes extraordinaires. Je pense que ça aurait été une très mauvaise nouvelle que ça ne se passe pas cet automne, parce que ça aurait voulu dire qu'on aurait pu continuer des comportements qui sont inacceptables. Donc, c'est bon, tout ça, même si ça fait mal. C'est comme péter un abcès ; moi, je suis un ancien vétérinaire, comme vous savez. Péter un abcès, sur le coup, ça fait mal, mais tout de suite après, pas longtemps après, c'est un soulagement, le pus sort, ça fait beaucoup moins mal, et on dort bien! L'automne, c'a été le moment où on a fait ça, mais j'ai l'impression que ça va juste s'améliorer à partir de maintenant. Le milieu de l'humour va bien, on le voit.»

Dominic Paquet : «Moins de controverses! Je pense qu'on ne fait pas d'opérations à cœur ouvert dans notre métier. Il faut qu'on se tienne. Il ne faut pas courir après ces niaiseries-là, et agir comme des humains normaux, et respecter les humains. C'a l'air quétaine comme phrase, mais il y a tellement de controverses, ça sort à toutes les semaines. C'est plate, parce que ce n'est qu'une couple de personnes qui viennent entacher le milieu au complet ; s'il était sorti qu'un joueur de hockey avait fait ça, ça ne voudrait pas dire que tous les joueurs de hockey sont comme ça. Moins de controverses l'année prochaine! Est-ce qu'on peut juste arrêter de se chicaner sur Twitter et toutes ces cochonneries-là...

Moi, je ne suis pas tellement sur les réseaux sociaux, alors ça ne me touche pas vraiment, mais quand je vois des affaires de même, je me dis : voyons, il me semble que, dans le temps, on s'appelait et on se disait : «La farmes-tu, ta yeule ?» Il me semble que c'était bien plus simple! (rires) Au lieu que tout le monde embarque, tout le monde met son opinion, les gens ne sont pas au courant de l'histoire complètement... Ça fait juste grossir l'affaire pour rien. C'est une boule de neige qui grossit, mais pour rien. C'est vide en dedans.»

Korine Côté : «D'être bien! De la santé... (rires) Quand les Fêtes arrivent, on se souhaite de la santé. Juste d'être bien, de bien retomber sur ses pieds. Après un volcan, il faut en laisser un peu retomber avant que la belle nature pousse. Je souhaite au milieu de l'humour de se faire confiance, aussi!»

Philippe Bond : «Juste du bonheur, et de la tranquillité, et des spectacles... Hier soir, j'étais en spectacle à Pointe-aux-Trembles, et les gens attendaient aux autographes. J'ai fait une heure et demi d'autographes. Les gens étaient tellement contents d'être là. Les gens ont besoin de rire, alors je ne souhaite que du bonheur en 2018 pour tout le monde.»

Fabien Cloutier : «De continuer de se remettre en question, encore plus profondément.»

Le tapis rouge du 19e gala Les Olivier

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