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Philippe Pichet suspendu jusqu'à nouvel ordre

Martin Prud'homme est nommé administrateur civil chargé de redresser la situation au sein du SPVM.
La Presse canadienne/Graham Hughes

Le ministre de la Sécurité publique, Martin Coiteux, a nommé un administrateur externe pour prendre les rênes de la police montréalaise, à la suite du dépôt d'un rapport dévastateur sur la gestion des affaires internes. Le chef Philippe Pichet est suspendu jusqu'à nouvel ordre.

Le ministre Coiteux, en compagnie de la mairesse de Montréal Valérie Plante, a nommé Martin Prud'homme comme administrateur chargé de redresser la situation au sein du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM). M. Prud'homme, qui a fait carrière au sein du ministère de la Sécurité publique, est le directeur général de la Sûreté du Québec (SQ) et retrouvera son poste à la SQ après son travail au SPVM.

Son mandat sera d'une durée de 12 mois et commence dès maintenant. Il sera également le directeur général par intérim du SPVM durant son passage à la tête de la police montréalaise. Son adjoint à la SQ assumera la direction du corps policier provincial pendant son absence.

M. Prud'homme aura le mandat de restructurer la Division des affaires internes, entachée par des allégations de fabrication de preuve contre des policiers. Il devra aussi développer des mécanismes de contrôle des enquêtes internes et proposer des correctifs au Règlement sur la discipline interne des policiers.

L'administrateur devra aussi poser un diagnostic sur les tensions qui existent entre la gendarmerie, qui patrouille dans les rues de Montréal, et les enquêtes.

Le sort final du directeur du SPVM, Philippe Pichet, sera également décidé par M. Prud'homme. Le ministre Coiteux décidera de lancer ou non un processus de destitution selon le contenu de ses rapports. L'administrateur pourra aussi recommander un processus de nomination d'un nouveau directeur, ainsi que le profil de candidat recherché.

M. Pichet est en poste comme directeur du SPVM depuis 2015. Son mandat, qui devait se terminer en 2020, a été entaché par de multiples scandales.

L'émission JE a notamment révélé des cas de fabrication de preuves aux affaires internes du Service de police de la Ville de Montréal. Cette révélation a mené à une enquête de l'avocat Me Michel Bouchard, dont le rapport a été dévoilé mercredi.

M. Pichet a été relevé de ses fonctions mercredi. Il est en congé avec solde.

Tutelle déguisée?

M. Coiteux a souligné que la nomination d'un administrateur en lieu et place du chef de police ne constitue pas une tutelle.

«Je suis aussi responsable des Affaires municipales. Quand on met une municipalité sous tutelle, le ministère prend le contrôle de la municipalité. Ce n'est pas ce qui se passe ici», affirme-t-il.

L'opposition officielle à Québec a tout de même qualifié la manœuvre de «tutelle déguisée». Elle estime que le gouvernement a choisi le pire des scénarios en nommant Martin Prud'homme à la tête du SPVM. Non seulement sa nomination va «déstabiliser» la Sûreté du Québec, mais elle va aussi miner la crédibilité de Philippe Pichet.

«Soyons clairs, mettons fin à l'hypocrisie. Si on ne veut plus de Philippe Pichet, qu'on lui dise maintenant», affirme Pascal Bérubé, porte-parole du Parti québécois en matière de sécurité publique.

Le rapport de Me Bouchard note toutefois une absence de volonté claire de changer la culture du SPVM de la part de M. Pichet. Cette absence a penché dans la décision de le suspendre.

«Les informations dont nous avons été saisis récemment dans le cadre de notre enquête nous rendent sceptiques sur l'existence d'une réelle volonté de la direction de vouloir opérer un changement radical dans les façons de faire au SPVM», note l'avocat.

La mairesse Valérie Plante s'est dite confiante que le nouvel administrateur sera en mesure d'apporter la volonté de changement recherchée. Le chef de l'opposition à l'hôtel de ville, Lionel Perez, s'est dit troublé par les constats en ajoutant que M. Coiteux avait une décision importante à prendre.

Problèmes majeurs et profonds

Le rapport fait état de plusieurs problèmes majeurs. Des allégations de nature criminelle qui ne sont jamais enquêtées par les affaires internes. Une absence de suivi des dossiers. Traitement préférentiel pour les cadres visés par des allégations.

Les problèmes proviendraient non pas des enquêteurs, mais des gestionnaires qui émettaient des directives fort problématiques.

Le rapport note également que les tensions entre la gendarmerie et les enquêtes feraient en sorte que le groupe dont est issue la direction tend à favoriser les siens lors de promotions.

Toutes les plaintes au BEI

Par ailleurs, le rapport de Me Bouchard recommande que le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) soit la seule entité responsable d'enquêter sur les crimes commis par des policiers ou de nommer une autre entité qui mènera l'enquête. L'avocat retient de nombreuses incongruités dans le fait que, dans la majeure partie des cas, des policiers enquêtent sur leurs propres collègues de travail.

Actuellement, le BEI n'enquête que lorsqu'il y a mort d'homme ou blessure grave lors d'une opération policière.

Le ministre Coiteux ne s'est pas prononcé sur cette éventualité, affirmant seulement que cette recommandation et toutes les autres seront évaluées au cours des prochaines semaines.

Avec la collaboration de Catherine Lévesque.

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