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Gala les Olivier: François Morency prêt à aller au front

«En rentrant, il y aura un éléphant dans la pièce, il faut que je le tue vite.»
Karine Dufour via Radio-Canada

Pour une deuxième année consécutive, François Morency aura une grande pression sur les épaules en animant le Gala des Olivier, à Radio-Canada, dimanche prochain, le 10 décembre.

Lors de la dernière édition, au printemps 2016, il devait gérer la controverse qui avait éclaté quelques jours plus tôt au sujet d'un numéro sur la liberté d'expression écrit par Mike Ward et Guy Nantel. Le segment avait finalement été retiré du gala, à la demande de la compagnie d'assurances de l'Association des professionnels de l'industrie de l'humour (APIH) - producteur du gala -, qui voyait dans le texte des possibilités de matière à poursuites judiciaires. La communauté des humoristes avait soutenu ses deux confrères en se pointant à la cérémonie des Olivier avec un masque identifié d'une croix rouge et était montée sur scène en groupe, à un certain moment, le temps d'une courte manifestation silencieuse contre la censure.

Cette année, c'est le scandale causé par les inconduites sexuelles alléguées de Gilbert Rozon qui assombrit d'emblée la fête. Et c'est sans compter les petites tempêtes dans un verre d'eau impliquant des humoristes, qui alimentent presque chaque semaine les réseaux sociaux. Récemment, Guy Nantel et François Massicotte ont, entre autres, eu à défendre leur personne tant que leur contenu.

François Morency a vidé la question franchement à Tout le monde en parle, dimanche. Lui qui pilote la fête de l'humour pour une troisième année, après 2014 et 2016, et qui est également finaliste dans la catégorie de l'Olivier de l'année, n'a pas caché aux recherchistes qui travaillent avec Guy A.Lepage que, par les temps qui courent, son mot de prédilection, en se levant le matin et en se couchant le soir, est «tabarnac».

«C'est sûr que c'est de loin la situation la plus touchy, de par le sérieux de tout ce qui s'est passé, ne serait-ce que l'affaire de Gilbert, a commenté François Morency, à propos du défi qui l'attend. On parle d'agressions sexuelles, de la relation avec les gens de pouvoir, des relations hommes-femmes au travail... Tout ça est en redéfinition, et ce n'est pas moi qui vais régler tout ça dimanche prochain, mais je ne peux pas ne pas en parler. Je ne peux pas arriver et faire innocemment un numéro sur les chars électriques. En rentrant, il y aura un éléphant dans la pièce, il faut que je le tue vite. Mais moi, je suis un partisan de la théorie «arrache le Band Aid»...»

C'est d'ailleurs cette méthode qu'il avait préconisée pour «se débarrasser» rapidement de l'épée de Damoclès que constituait l'affaire Ward-Nantel, en 2016.

«C'avait eu deux effets : un, tu tues l'éléphant, et aussi, les gens en nomination, qui sont peut-être préparés à aller «péter une coche» au micro, font : «Ah, il l'a dit, c'est réglé»...»

«Ils sont déjà en retard»

François Morency était passé à Tout le monde en parle en octobre, lorsque les allégations concernant Gilbert Rozon avaient été rendues publiques. Il avait alors conseillé à l'organisation de Juste pour rire présentement en place de marquer une cassure nette avec Gilbert Rozon, sans quoi, il refuserait de prendre part à l'événement annuel.

Une position qu'il a réitérée sur le même plateau, dimanche, et ce, même s'il a été annoncé que le groupe Juste pour rire sera vendu. Pire, Morency ne croit même pas à la tenue en bonne et due forme d'une édition 2018 du Festival Juste pour rire, d'autant plus que personne de l'entreprise ne l'a contacté pour statuer sur le renouvellement, ou non, du gala hommage, qu'il animait depuis deux ans.

«On est tous spectateurs de voir ce que Juste pour rire va faire, qui va acheter, quand, a hasardé François Morency. Je sais qu'ils ont annoncé des dates, je ne vois pas comment ils peuvent faire un festival comme on l'a toujours connu. Ils sont déjà en retard. C'est impossible qu'ils fassent huit galas... Donc, je ne sais pas comment ils vont gérer ça, ce qu'ils vont faire. On est spectateurs de voir qui va l'acheter, comment il va gérer ça, quel genre de ménage il va faire, quel genre de message il va envoyer, un, au public, deux, aux humoristes. Je n'ai aucune information, outre celles que les médias laissent transpirer de temps en temps, sur les acheteurs potentiels. Il faut que ça soit vendu, et «au p.c», parce qu'autrement, je ne vois pas comment ils peuvent faire un festival. Ils sont déjà en retard. À ce temps-ci de l'année, il faut que les animateurs de galas soient sous contrat, que les équipes se construisent, les décors...»

C'est cet instant qu'a choisi Dany Turcotte pour révéler que le Groupe Sanguin devait être la vedette du gala hommage Juste pour rire 2018, une information que la communauté journalistique savait, mais qui était jusque-là sous embargo.

«Je trouve ça triste pour mon ami Dominique (Lévesque, décédé l'an dernier, NDLR), a déploré Dany Turcotte. Je trouvais ça le fun qu'enfin on puisse lui rendre hommage... Mauvais timing encore pour le Groupe Sanguin!»

«On fera ça dans la cour chez nous», a blagué François Morency en guise de réponse. À ses amis Martin Petit et Réal Béland, qui lui ont demandé de joindre la coalition à l'origine du nouveau Festival du rire de Montréal, Morency a prié de laisser passer le Gala des Olivier avant de leur offrir une réponse définitive.

Guy Nantel

Guy A.Lepage a également questionné François Morency quant à son opinion sur le tollé qu'a dû affronter Guy Nantel dans les dernières semaines. L'invité s'est montré le plus neutre possible.

«Je ne ferai pas l'erreur que neuf personnes sur dix font, de commenter sur quelque chose qu'ils n'ont pas vu. Je ne ferai pas cette erreur-là, de un. De deux, il y a comme eu... Comme s'il y avait un mouvement anti-Guy Nantel, en humour. Si c'est ça, moi, je plaide non-coupable, parce que le premier gala Juste pour rire qu'il a fait, c'est moi qui l'avais invité. J'avais milité auprès de la programmation, j'avais dit : «Ce gars-là, il est prêt». Je l'avais engagé, quand j'avais un talk-show, il était un de mes chroniqueurs. La première fois qu'il était venu faire un numéro aux Olivier, c'était quand j'animais. Moi, je n'ai absolument rien contre Guy, au contraire. Et il ne me doit rien, je ne dis pas ça dans le sens qu'il me doit quelque chose...»

Martin Matte est alors intervenu en dévoilant que lui-même avait assuré la première partie d'un spectacle de Guy Nantel à Alma en 1997, avant qu'Yves P.Pelletier ne lance un appel au calme, en rappelant que Nantel est d'abord et avant tout un humoriste.

«Des fois, tu entends des commentaires, il est quasiment traité comme un animateur d'affaires publiques, sur la place publique. Comme si, dans le contenu d'un show humoristique, tu devais être redevable de chacun de tes propos, chacune de tes blagues, peu importe le ton que tu utilises. C'est un comique, c'est un comédien, et il ne se cache pas derrière ça. C'est dans ce cadre-là qu'on devrait juger de la pertinence ou non de ses blagues», a analysé Yves P.Pelletier.

«Il faut voir le spectacle pour juger», a complété Martin Matte.

«Si c'est répréhensible, ce qu'il dit dans son spectacle d'humour, il y a des gens qui se manifesteront. Mais, sur la place publique et les médias sociaux, à un moment donné, il y a un amalgame de toutes sortes d'opinions, tout est mêlé. C'est un humoriste...», a répété Yves P.Pelletier.

«C'est sûr que la menace de mort, c'est injustifié, à lui et à qui que ce soit, a terminé François Morency, en échappant un petit rire courroucé. Je vais arrêter là...»

François Morency, qui animera par ailleurs la nouvelle émission Ouvrez les guillemets, en janvier, à Radio-Canada, et qui planche sur une adaptation télévisée de son recueil comique Discussions avec mes parents, a enfin dit haut et fort que les gens rappellent de plus en plus les humoristes à l'ordre, sur les réseaux sociaux, en leur balançant des phrases du genre : «Pouvez-vous juste faire des jokes?» Un conseil avec lequel il semblait particulièrement en accord, tanné des chicanes de toutes sortes.

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