Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Gros plan sur le Festival du rire de Montréal à TLMEP

Jusqu’ici, environ 35 ou 40 humoristes ont joint la «coalition étendue» de ce nouveau festival.
Radio-Canada

«Un autobus d'humoristes», «le club de bowling le plus riche du Québec» : Guy A.Lepage s'est bien amusé de la grosseur de la délégation d'humoristes présents à Tout le monde en parle, dimanche.

Ceux-ci s'étaient déplacés en masse pour parler du nouveau Festival du rire de Montréal, événement qui verra le jour dès 2018 et qui constitue non seulement un pied de nez à Juste pour rire et Gilbert Rozon, mais aussi un nouvel espace créatif où les humoristes comptent mettre de l'avant des valeurs éthiques et sociales.

C'est d'abord à Martin Petit qu'on doit l'initiative du Festival du rire de Montréal. Dimanche, celui-ci était notamment entouré de Réal Béland, Marie-Lise Pilote, Michel Barrette, Philippe Laprise, Sylvain Larocque, Silvi Tourigny, Maxim Martin et Maude Landry, entre autres. Tous portaient un chandail où était inscrit le nom d'un autre humoriste supportant aussi la cause, mais n'étant pas autour de la table de Guy A.Lepage.

«J'ai été touché comme tout le monde au Québec, je me suis senti trahi», a commencé Martin Petit, avant de raconter que Gilbert Rozon terminait toutes ses conversations téléphoniques avec lui par la phrase «Merci de ta confiance».

D'après Petit, Gilbert Rozon a «abusé de la confiance de tout le monde». Dans la semaine suivant l'éclatement du scandale, l'auteur et comédien des Pêcheurs aurait dit à sa conjointe : «Ce qu'il va faire dans les prochains jours va déterminer ce qu'il est comme être humain.» Martin Petit a poursuivi :

«Moi, ce que j'aurais fait, dans cette semaine-là, j'aurais dit : «Écoutez, j'ai créé un festival (...) je l'ai créé grâce aux fonds publics, grâce à des milliers d'employés...» Je sais c'est quoi, tu te saignes à blanc, pour un événement où tu vas pour le fun, tu ne comptes pas tes heures. Le public a investi pendant 30 ans pour ce festival-là, et les artistes, on a donné notre talent pour ce festival-là. Moi j'aurais dit : «Je ne mérite pas votre confiance, je ne mérite pas ces clefs-là, arrangez-vous avec, je vous le donne».»

«Après sept jours, Gilbert Rozon est sorti dans les médias et a dit : «Ça, c'est à moi et je le vends à celui qui a le plus d'argent qui va me donner». Là j'ai fait : «Je décroche». Ce n'est pas comme ça. Ça ne se peut pas qu'au Québec, on n'ait pas d'options J'ai appelé mes meilleurs amis, on est allés prendre de la bière et on a échangé des idées. De ces idées-là est sortie l'idée de faire quelque chose de mieux.»

«Tout le monde en parle», les invités du 12 novembre 2017

À la télévision

Jusqu'ici, environ 35 ou 40 humoristes ont joint la «coalition étendue» du Festival du rire de Montréal. Martin Petit a soutenu que de tous les gens contactés, personne ne lui a dit non.

«Il y a des gens qui sont en retrait parce qu'ils nous regardent aller, par exemple, mais ils ne nous ont pas dit non», a spécifié Réal Béland.

L'objectif du Festival du rire de Montréal n'est pas nécessairement de faire baisser la valeur de Juste pour rire, a-t-on dit.

«Le but c'était de fonder un festival, c'était de se regrouper, a expliqué Réal Béland. Parce que, nous autres, on était inquiets. Qu'est-ce qui va se passer avec Juste pour rire? Faisons-nous un festival. On se regroupe, avec des meilleures valeurs, selon nous. Avec, pas quelqu'un en haut qui dirige le reste. Tout le monde à part égale. D'emmener la relève avec nous autres, de la faire rayonner encore plus, de respecter les femmes. Être une espèce d'exemple. On peut-tu donner l'exemple, parce que nous on est visibles en tant qu'artiste... Et si, nous, on donne l'exemple, j'espère que dans toutes les sphères de la société, j'espère que tout le monde va suivre ce mouvement-là.» Sa tirade a été chaudement applaudie par le public en studio.

En ce qui concerne les émissions produites par Juste pour rire, Maxim Martin a mentionné qu'il s'était réapproprié les droits de la comédie Max et Livia, présentée à VRAK, dans laquelle il joue avec sa fille de 16 ans, Livia. Au moment des révélations touchant Gilbert Rozon, la jeune Livia vivait le deuil de son amoureux, Clément Ouimet, cycliste décédé dans un accident de la route le 4 octobre dernier. Maxim Martin jugeait «inconcevable que [sa] fille de 16 ans soit impliquée dans une boîte où le dirigeant est accusé de ces gestes odieux», et inconcevable pour lui de «contribuer à la rentrée d'argent de cette boite-là».

Il a rapidement téléphoné à VRAK, qui a endossé sa décision. Il a même été question de retirer Max et Livia des ondes, mais Maxim Martin ne voulait pas imposer à sa fille le deuil de sa série en plus du deuil de son copain. Or, le papa souhaite protéger son adolescente de toutes représailles. «Je ne savais pas qu'il y avait autant de femmes victimes d'agressions. Le père embarque ; c'est, genre, je ne peux pas te protéger de tous les prédateurs sexuels, mais si lui, je peux le tasser, je vais le faire», a souligné Maxim Martin.

Martin Petit, de son côté, a indiqué sur Twitter qu'il produira désormais lui-même Les pêcheurs, si l'émission est reconduite par Radio-Canada.

Les femmes et la relève

Marie-Lise Pilote a quant à elle relaté comment les femmes humoristes qui arrivent à percer dans le métier ont souvent peur de donner leur opinion.

«Parce qu'on a peur de passer pour une chialeuse (...), pour une fille qui se lamente, qui est compliquée», a avoué Marie-Lise Pilote. Celle-ci a martelé son intention de faire partie du conseil d'administration du nouveau festival.

«Je le dis devant tout le monde (...) Je n'ai pas de billets d'humour à vendre, je ne cherche pas de producteur, je ne veux pas être gérant d'humoristes, ni produire d'émissions de télévision avec des humoristes, je n'ai pas d'intérêt personnel. Le seul que j'ai, c'est de veiller à ce que les femmes aient leur place en humour. Parce que je crois que c'est important (...)»

Silvi Tourigny a renchéri en abordant le fait que, souvent, dans un gala Juste pour rire, il n'y a qu'une seule femme humoriste sur scène, versus plusieurs hommes.

«T'as intérêt à être bonne, sinon on renforce le stéréotype que les femmes en humour, c'est pas drôle, c'est pas bon... Ça prendrait plus de filles sur les galas!»

Julien Lacroix s'est prononcé au nom des talents de la relève, qui auront peut-être plus le loisir de s'exprimer dans ce nouveau contexte.

«Avec la nouvelle formule qu'on essaie de créer, je pense qu'il va y avoir plus de place à divers styles d'humour, plus de place à la relève, qui travaille vraiment beaucoup. On est dans les bars tout le temps, on a un public qui nous suit (...) On dirait que ce n'était pas pris en considération avec le Juste pour rire d'en ce moment, mais avec le nouveau festival, je considère que ça va être pris.»

Plan d'affaires

Dominique Anglade accompagnait Martin Petit et ses collègues humoristes dimanche. La ministre de l'Économie, de la Science et de l'Innovation a fait valoir que le gouvernement libéral priorise l'économie sociale et l'entreprenariat collectif et souhaite faire la promotion d'OSBL ancrés dans la communauté. C'est son organisation qui a contacté Martin Petit pour supporter son nouvel engagement.

«On a une responsabilité de les accompagner, de voir comment on peut faire en sorte qu'ils arrivent avec un plan d'affaires qui tienne la route. C'est l'objectif qu'on s'était donné», a détaillé Dominique Anglade. Le mouvement Desjardins a également annoncé son partenariat avec le Festival du rire de Montréal, plus tôt cette semaine.

«Le modèle qu'on a connu, nous autres, c'est une pyramide où les profits s'en vont en haut, à une ou deux personnes, a exposé Martin Petit. On voit ce que ça donne, quand il se passe quelque chose de pas correct avec la personne en haut. Tout tombe, et nous autres, on est des fournisseurs, mais les employés sont touchés directement, à cause des agissements d'une personne. Nous autres, on a trouvé un véhicule que, il y a 50 personnes qui se disent : «Nous autres on est le contenant, c'est nous autres qui va faire qu'il y a un festival». On va engager des gens, c'est nous autres qui va les engager, et s'il y en a un de nous autres qui fait des niaiseries, on le sort, et tout continue pareil.»

La prochaine étape, pour Martin Petit et ses troupes, sera de bâtir un plan d'affaires solide, a avancé Dominique Anglade.

«Avec le plan d'affaires, on peut voir ce qui est faisable», a noté cette dernière.

Déjà, un directeur général par intérim, l'ancien maire de Bois-des-Fillion, Paul Larocque, surnommé le «maire incorruptible», qui n'a aucun scandale à son dossier, est en charge d'examiner les curriculums vitae reçus pour former une direction générale au Festival du rire.

«C'est notre Serge Savard à nous», a relevé Réal Béland. Martin Petit a enchaîné en indiquant qu'il souhaite mettre à contribution l'expertise des gens qui font le succès des différents festivals à Montréal.

«On va gérer ensemble ce qui se passe, être beaucoup plus créatifs, aller plus loin dans nos démarches artistiques», a dépeint Marie-Lise Pilote.

Les organisateurs du Festival du rire aspirent à vendre des billets moins chers que le coût qui était fixé à Juste pour rire.

«Si on met l'argent à la bonne place, je pense qu'on va réussir à le faire, a insisté Réal Béland. Je ne sais pas ça va être quoi le prix du billet, mais je ne peux pas croire que ça va être ce prix-là. Moi j'aimerais ça que la première joke qu'on fasse, c'est le prix du billet.»

«Si on n'a plus à payer la pointe de la pyramide, admettons qu'on va avoir plus d'argent, on s'entend là-dessus», a-t-il ajouté.

Martin Petit et sa bande ont envoyé une flèche à Juste pour rire en affirmant qu'ils ne veulent pas annoncer la date de leur festival avant d'avoir une programmation à dévoiler. Rappelons que le Festival Juste pour rire 2018 doit en principe se tenir du 14 au 28 juillet prochain, mais aucun spectacle n'y a encore été officialisé.

Martin Petit et ses acolytes rencontreront la Ville de Montréal et la ministre du Patrimoine canadien, Mélanie Joly, mardi, pour établir la suite des choses. Petit a en outre lancé l'invitation à Guy A.Lepage de se joindre au groupe, pour appuyer le volet de la télévision internationale, lui qui a l'expérience du domaine grâce à Un gars, une fille.

«Okay», a simplement répondu Guy A.Lepage.

Voir aussi:

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.