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Des objets sacrés disparaissent des églises du Québec

Plusieurs églises du Québec ont été la cible de vols dans les derniers mois.
Radio-Canada

Plusieurs églises du Québec ont été la cible de vols dans les derniers mois. Ces églises qui auraient perdu la trace des objets religieux peuvent se tourner vers certains diocèses comme celui de Montréal, qui tient une réserve secrète de milliers d'objets pour remplacer les biens disparus.

Un texte d'Éric Plouffe

À Yamaska, la Sûreté du Québec a arrêté un homme de 65 ans, Pierre Bouchard, accusé de s'être introduit par effraction dans une église de cette petite municipalité de la Montérégie dans la nuit du 3 juillet dernier.

La police tente de trouver les propriétaires des objets religieux saisis dans sa résidence. La SQ poursuit son enquête.

L'église de Yamaska a été la cible de voleurs dans le passé. « Il y a deux ans, il y a un groupe qui s'est essayé », dit le prêtre-curé Lionel Émard. La nuit du 3 juillet dernier, « un voisin a entendu des bruits » autour de l'église et a appelé la police alors que le religieux dormait paisiblement dans sa chambre du presbytère à deux pas de l'église.

Quand j'ai vu ça, j'ai dit au sacristain : cache les affaires!Lionel Émard, prêtre-curé de l'église de Yamaska

Lorsque nous l'avons rencontré, le curé Émard nous a montré la vieille porte en bois massif sur le côté de l'église qui aurait été forcée par l'accusé et qu'il aurait franchie pour se rendre dans la sacristie. À l'intérieur de son église, il nous raconte que, lorsque les policiers ont arrêté l'individu, ils ont retrouvé dans son sac différents objets religieux appartenant à la paroisse. Le curé nous montre quelques-uns des objets comme un encensoir et une petite coupe de couleur or. « Mais c'est pas de l'or ça! Pas du tout », lâche-t-il en riant.

L'homme à la chevelure blanche dit qu'il avait été avisé quelques semaines plus tôt par son diocèse d'une vague de vols dans les églises de la région. « Ils nous disaient d'être prudents et de surveiller les gens qui s'offrent comme bénévoles et de faire attention pour ne pas se faire avoir », précise-t-il. « Quand j'ai vu ça, j'ai dit au sacristain : cache les affaires! »

Le prêtre croit que les voleurs font d'abord une visite de reconnaissance dans l'église le jour avant de commettre leur larcin la nuit. « Moi j'ai l'impression que c'est ça : ils font du repérage parce que, eux autres, il ne faut pas qu'ils brettent trop longtemps », lance-t-il l'air songeur entre les rangées de bancs vides de son église.

Vague de vols et réseau

Lionel Émard ne sait pas trop ce que des voleurs peuvent faire des objets religieux subtilisés dans les églises.

C'est des choses qu'ils peuvent revendre comme des calices, des ciboires et des antiquités comme l'ostensoir.Lionel Émard

« Qu'est-ce que ça vaut? Je ne le sais pas, mais c'est une antiquité. Et ils les vendent à des antiquaires. J'ai l'impression qu'il y a un réseau. »

Les policiers de la Sûreté du Québec ont découvert et saisi une trentaine d'objets religieux dans la résidence de l'accusé située à Saint-Jude, le patron des causes désespérées. Les enquêteurs tentent de retrouver les propriétaires des objets dont au moins un appartiendrait à l'église de Thetford Mines, une municipalité située à près de 200 kilomètres de la maison de l'homme arrêté.

« Pour les autres objets, on est toujours à recherche des propriétaires », indique la sergente au service des communications de la Sûreté du Québec, Ingrid Asselin. Elle demande aux propriétaires des objets de se manifester et de contacter les enquêteurs de la Sûreté du Québec de la MRC de Pierre-de-Saurel.

Réserve secrète

Les églises qui ne peuvent pas remplacer des objets volés peuvent se tourner vers certains diocèses comme celui de Montréal. L'endroit où sont conservés environ 3000 objets depuis le début des années 1970 est toutefois secret. « On ne veut pas trop diffuser l'endroit où c'est parce qu'on veut justement éviter qu'il y ait des vols », explique Caroline Tanguay, adjointe au vicaire général pour les questions liées à l'art sacré et au patrimoine religieux au Diocèse de Montréal. « La réserve n'est pas ouverte au public. »

Caroline Tanguay nous fait visiter la réserve où le silence qui règne est brisé par le grésillement des néons qui éclairent les lieux. Nous parcourons les différentes allées où se dressent des statues du Sacré-Coeur ou de la Vierge Marie et où s'empilent des boîtes remplies de crucifix.

On peut voir plusieurs étagères où s'alignent par exemple des coupes de différentes tailles.

Les objets liturgiques sont mis à la disposition des paroisses. « Ça peut être parfois des objets qui ont été volés et qui pourraient être remplacés de cette façon-là », ajoute Caroline Tanguay. « Ils sont vraiment mis à leur disposition. La philosophie de la réserve, c'est que des objets de culte resservent au culte. »

Les pièces religieuses proviennent pour la plupart d'églises qui ont fermé leurs portes, de communautés religieuses ou de particuliers, et chaque nouvel objet qui entre dans la réserve est identifié. « Donc, on prend une photo, on catalogue l'objet avec ses dimensions. Chaque objet a une fiche », précise Caroline Tanguay.

L'abbé Lionel Émard entrepose aussi ses objets de grande valeur dans un endroit secret. Et les portes de son église sont presque toujours verrouillées et il s'en désole. « Aujourd'hui, c'est le seul endroit où les gens pourraient être en paix. Ils viennent [à l'église], mais la porte est barrée. »

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