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Richard Séguin: ne pas regarder derrière

Richard Séguin: ne pas regarder derrière
Richard Seguin / Facebook

Richard Séguin lançait l’an dernier Les horizons nouveaux, son quatorzième album solo original en 50 ans de carrière. Fidèle à son style comme à ses valeurs, celui qui «se voit vieillir dans le folk», dit-il, a choisi le titre de son disque comme le souhait d’un monde meilleur, celui qu’il chante depuis toujours, pour lequel il ne cessera jamais de se battre et s’exprimer.

Séguin porte aujourd’hui ses Horizons nouveaux sur les scènes du Québec, dont la Cinquième Salle de la Place des Arts, ce samedi, 17 juin, dans la foulée des 29 FrancoFolies de Montréal qui s’achèvent demain. Petit tour de «ses» horizons, en cinq questions.

Richard, après 50 ans de métier, quel est votre processus de création, lorsque vous élaborez du nouveau matériel?

«C’est comme avancer dans le bois. Si tu regardes tes traces en arrière, tu t’enfarges. L’idée, c’est de ne pas regarder le chemin parcouru, et de regarder ça comme une journée nouvelle. C’est drôle, parce que chacun a son rythme de travail. Je ne suis pas capable d’écrire en tournée, par exemple. Je ne suis pas capable d’écrire là où il y a du bruit. Je sais que certains s’installent dans des cafés, mais moi, j’ai besoin de zones de silence. J’ai besoin d’être isolé. Et je travaille à des heures très régulières. Je suis un peu influencé par Paul Auster, qui a son appartement à New York ; il a loué un petit bureau pas très loin de chez lui, où il peut se rendre à pied. Il prend son lunch en bas et il travaille de là. J’ai un peu tendance à travailler comme l’artisan et l’ouvrier. Je m’en vais, je m’installe, il ne se passe rien pendant deux ou trois jours, puis il se produit quelque chose le quatrième jour, qui ne serait pas survenu si je n’avais pas été là les jours précédents. Je crois beaucoup à ça, construire au fur et à mesure. L’avantage que ça me donne, d’écrire de cette façon, c’est que je ne traîne pas constamment mes couplets et mes refrains avec moi, dans la vie. Sinon, ça devient obsessif, et on est absent du reste du monde. Mes journées se promènent entre la lecture et l’écriture et, quand elles se terminent, je suis prêt à aller faire autre chose, avec les gens, être dans la vie.»

On a l’impression, à lire vos textes, que vous vous exprimez toujours au nom d’une communauté, d’une collectivité, que vous partez très peu de votre expérience personnelle. Est-ce exact?

«Au départ, une chanson naît d’une émotion. L’émotion ressentie dans l’indignation devant le comportement qu’on peut avoir, dans les villages, je le vis. Et je vais mettre en scène des personnages différents. C’est souvent ce qui arrive. Les premiers albums qu’on fait sont souvent très autobiographiques, très près de nous. On gratte le bobo. Moi, après toutes ces années, j’ai envie de raconter les gens autour de moi, les gens qui n’ont pas cette parole-là, en créant des petites histoires. Ce sont des sentiments soulevés par une colère, une indignation, une tristesse, qui passent à travers ma voix et mon émotion. Je n’ai pas besoin de dire «Je» à chaque chanson. L’émotion m’appartient, me traverse le corps.»

La colère et l’indignation sont donc encore de bonnes sources d’inspiration?

«Oui, ça peut l’être. Et je suis content que ça soit encore présent. Je pense que c’est quelque chose qu’on cultive. Je me souviens d’une citation de Pierre Bourgault, qui disait qu’il faut nourrir ses rêves de jeunesse, et la jeunesse de ses rêves. C’est la même chose pour l’indignation.»

À ce stade de votre vie, qu’est-ce qui vous indigne?

«Le manque de respect pour les régions. Je vis en région, je constate combien c’est difficile de porter la culture. On la porte souvent à bout de bras, par des bénévoles qui s’impliquent, des initiatives tenues par deux ou trois personnes qui allument des feux un peu partout pour qu’on puisse avoir des choses significatives.»

Est-ce que la tournée, les spectacles, sont le meilleur moyen pour un artiste d’entrer en contact avec le public?

«Il peut se passer n’importe quoi, dans tous les chambardements qu’on vit au niveau de la musique, mais la scène est là depuis des milliers d’années, et le besoin de rencontrer le monde va toujours être là. On dirait que la scène est immuable. Même dans les périodes difficiles, tout le monde s’adapte, les diffuseurs comme les artistes. On crée des collectifs, de nouveaux circuits s’implantent. Le besoin est toujours là, et je trouve ça bien intéressant.»

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