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Résultats présidentielle 2017: Marine rattrapée par Le Pen ou l'échec de la stratégie de "la France apaisée"

Marine rattrapée par Le Pen: l'échec de la stratégie de la «France apaisée»

Sentant poindre la défaite, Marion Maréchal Le Pen avait déjà préparé le terrain, bien avant qu'Emmanuel Macron ne remporte le second tour de l'élection présidentielle. "L'objectif, c'est la victoire, et, à défaut, 40% nous positionnerait particulièrement bien pour être l'opposition". Ajoutant même: réunir 40% des voix "serait déjà une énorme victoire qui nous positionnerait à l'avenir comme la seule véritable opposition crédible". Las, alors que ce plancher semblait à portée de main il y a une semaine, les résultats du second tour de cette élection présidentielle ont douché les espoirs -mêmes revus à la baisse- du Front national.

En recueillant 35% des suffrages selon les premières estimations, Marine Le Pen fait certes deux fois mieux que son père il y a quinze ans de cela en progressant de 14 points par rapport au premier tour. Reconnaissant rapidement -et brièvement- sa défaite, Marine Le Pen s'est empressée de saluer "un résultat historique et massif" pour mieux présenter son "alliance patriote" comme la première force d'opposition du pays. "Les forces politiques qui ont pris la responsabilité de faire élire M. Macron sont discréditées elles-mêmes et ont perdu toute légitimité à représenter une force d'alternance ou même d'opposition crédible", a-t-elle ajouté.

Mais la présidente "en congé" du parti d'extrême droite se heurte une nouvelle fois au plafond de verre qui lui ferme la porte des principaux exécutifs du pays depuis des décennies. Et sa dernière semaine de campagne chaotique est riche d'enseignements sur la longueur du chemin à parcourir avant d'espérer entrer à l'Elysée.

Une chute libre dans la dernière semaine

Qu'il est loin le temps où Marine Le Pen espérait incarner le visage d'une "France apaisée". Depuis son accession à la tête du parti d'extrême droite, la fille de Jean-Marie Le Pen n'a eu de cesse de pousser la normalisation de sa formation politique, parachevant sa dédiabolisation en excluant son père et toutes les brebis galeuses susceptibles de ressusciter le procès en antisémitisme et en racisme qui place le FN à l'indexe de la République.

Cette stratégie qui avait tant réussi au Front national lors des élections intermédiaires, au point que celui-ci s'était rebaptisé "premier parti de France" après les européennes, a littéralement volé en éclat dans la seconde moitié de la campagne d'entre-deux-tours. Et pour une fois, ce n'est pas son entourage mais Marine Le Pen elle-même qui en fut la cause.

Alors qu'elle pointait à 40% d'intentions de vote, sa prestation calamiteuse pendant le débat d'entre-deux-tours, mêlant provocations, agressivité, manque de propositions de fond et sous-entendus calomnieux a coïncidé avec une rechute très marquée dans les sondages. Loin de rectifier le tir, sa dernière journée de campagne aura été un pot-pourri des dérives du Front national d'antan: déplacement perturbé par des manifestations, vulgarité et fausses nouvelles partagées sans vergogne par son plus proche entourage. Jusqu'à ce tweet posté par son bras gauche Florian Philippot tentant de surfer sur les MacronLeaks à quelques minutes de la clôture de la campagne officielle.

Le Front national va disparaître

Si les langues ne manqueront pas de se délier pour expliquer ce naufrage qui vaut à Marine Le Pen un score bien en-deçà de ce qu'elle pouvait espérer, l'heure n'est pas encore aux règlements de comptes. Se projetant d'emblée vers l'avenir, la candidate du Front national a dès ce dimanche soir écarté toute contestation interne en se posant en cheffe de file des élections législatives à venir.

Et la fille de Jean-Marie Le Pen entend bien poursuivre le travail de transformation de sa formation politique pour franchir une étape de plus vers la conquête du pouvoir. "Le second tour engage une recomposition majeure autour du clivage entre mondialistes et patriotes", a-t-elle affirmé en expliquant que le Front national devait "lui aussi profondément se renouveler".

"Je proposerai donc d'engager une transformation profonde de façon à créer une nouvelle force politique", a-t-elle annoncé. Changement de nom, élargissement de la base en ouvrant la porte à la "droite hors les murs" ainsi qu'aux souverainistes de gauche... Voilà le chantier des mois à venir.

L'opération n'a rien d'évident. Comme l'illustre ce second tour de scrutin, la famille Le Pen inspire encore et toujours une puissante répulsion dans l'opinion. Nicolas Dupont-Aignan, premier ministre désigné en cas de victoire de Marine Le Pen, a d'ailleurs fermé la porte à toute fusion entre le FN et Debout la France: "Debout la France reste indépendant" a-t-il démenti sur Francer2.

Robert Ménard a de son côté réclamé un aggiornamento sur la question de l'euro, un sujet qui divise dans le camp "patriote".

Mais malgré la déception du résultat ce soir, la cheffe de file de l'extrême droite française a bien des raisons de ne pas perdre espoir. Pour la première fois, elle dépasse le seuil des 11 millions de voix réunies dans un scrutin, a forgé des alliances, été reçue par des chefs d'Etat étrangers. Et elle est en position de retrouver un groupe parlementaire à l'issue des législatives, ce qui n'était pas arrivé depuis 1986.

Pourra-t-elle, comme elle le proclame, devenir la principale force d'opposition? C'est tout l'enjeu de la nouvelle campagne qui s'engage.

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Marine Le Pen

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